La lecture à portée de main
180
pages
Français
Ebooks
2021
Écrit par
Isa-Belle St-Sauveur
Publié par
Béliveau Éditeur
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Ebook
2021
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Publié par
Date de parution
24 juin 2021
Nombre de lectures
19
EAN13
9782897931070
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Publié par
Date de parution
24 juin 2021
Nombre de lectures
19
EAN13
9782897931070
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Conception de la couverture : Jean-François Szakacs
Illustration de la couverture : iStock by Getty Images
Tous droits réservés
© 2020, Béliveau Éditeur
Dépôt légal : 1 er trimestre 2020
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Bibliothèque et Archives Canada
ISBN 978-2-89793-106-3
ISBN Epub 978-2-89793-107-0 567, rue de Bienville Boucherville (Québec) J4B 2Z5 Téléphone : 450 679-1933 www.beliveauediteur.com admin@beliveauediteur.com
Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC – www.sodec.gouv.qc.ca .
Nous reconnaissons l’appui financier du gouvernement du Canada.
Reproduire une partie quelconque de ce livre sans l’autorisation de la maison d’édition est illégal. Toute reproduction ou utilisation d’un extrait du fichier Epub ou PDF de ce livre autre qu’un téléchargement autorisé par l’éditeur constitue une infraction aux droits d’auteur passible de poursuites pénales ou civiles.
On comprend mal ce qui peut amener un jeune à choisir la rue comme mode de vie. Pourtant, pour plusieurs d’entre nous qui ont fait ce choix, la rue a été notre refuge face à un monde qui n’avait pas prévu d’espace pour nous permettre d’exister.
Je dédie ce livre à tous les adolescents qui ont trouvé du réconfort dans la rue jusqu’à ce qu’elle les engloutisse.
R EMERCIEMENTS
U BUNTU : « Être humain, c’est affirmer son humanité en reconnaissant l’humanité des autres. »
– S TANLAKE J. W. T. S AMKANGE (1922–1988)
I L M’EST IMPOSSIBLE DE FAIRE ICI LA LISTE DE TOUTES LES personnes qui ont reconnu mon humanité derrière mon regard vide durant ma période de dévastation. Ni de faire celle de toutes les personnes qui ont contribué à nourrir et à fertiliser mon parcours de résilience. Sachez que ma gratitude est immense pour chacune des parcelles de vie que vous avez partagées avec moi.
Cela étant dit, je tiens à honorer certains d’entre vous sans qui cette aventure plus grande que moi n’aurait pas été possible. Tout d’abord Popss, (Père Emmett Johns) pour avoir semé de l’humanité dans les rues de Montréal. Je t’en serai éternellement reconnaissante. Aujourd’hui, on peut voir ta vision, ton œuvre se poursuivre et je tiens à mon tour à contribuer en offrant une partie des redevances de ce livre à l’organisme Dans la rue. Jeanne-Marie Rugira, porteuse de l’ Ubuntu , qui m’a dit un jour que mon histoire n’est pas que dévastation. Diane Léger, grâce à ta sensibilité, j’ai pu apprivoiser la mienne. Et finalement, Marilou Brousseau, merci d’avoir cru en mon projet. Ton positivisme inébranlable a fait fondre mes doutes.
P RÉFACE
D ANS LA RUE, SANS PROTECTION, ABANDONNÉE À l’ivresse de chaque instant, les lèvres glacées d’embrasser la rigueur d’un hiver intérieur sans fin, Isa-Belle St-Sauveur chute en chair et en douleur. Là-bas, dans son autrefois, mendiante de l’amour trouvé seulement au cœur de la drogue, de la sexualité et de l’alcool, entre l’absurde et la grâce, elle glisse de l’autre côté de la vie, dans la survie. Ligotée dans les mailles d’une société indifférente à la détresse et trop souvent haineuse, Isa s’enfonce dans le gouffre de la marginalité; seul lieu où se réfugier aux temps forts des désengagements et des rejets humains.
Notre première rencontre a lieu au XXIII e symposium du Réseau québécois pour la pratique des histoires de vie (RQPHV), à Rivière-du-Loup. Sa directrice de mémoire, Jeanne-Marie Rugira, lui mentionne que j’exerce le métier d’écrivain. Souhaitant témoigner par écrit de son parcours de fille de rue jusqu’à cette maîtrise chèrement acquise en étude des pratiques psychosociales à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), Isa-Belle s’enquiert de la possibilité d’un accompagnement de ma part, dans son processus de rédaction. Quelque chose en moi se refuse au refus…
Je n’ai pas connu Isa-Belle lorsqu’elle logeait à l’enseigne de la désespérance ! Nous nous sommes cependant reconnues dans nos écroulements respectifs, nos engrenages infernaux, tragiques, dangereux ainsi que dans nos résistances farouches aux systèmes traditionalistes et aux gens bien-pensants. N’eût été cette fureur de croire en un monde meilleur, nos silences d’ombres et nos ivresses-mirages nous auraient chavirées dans le silence éternel. Il n’y a pas de hasard ! Je ne pouvais être que là, à ses côtés.
Au moment convenu, je me rends jusque chez elle, dans cette contrée de neige, balayée par des vents glaciaux et scintillants sous les feux du soleil couchant, qui me semble favorable à l’éclosion de la poésie. J’arrête mes pensées. Poésie ? Ne sera-t-il pas question, dans les prochains jours, de la fille de rue ne pouvant s’offrir un toit, un manteau et des bottes en plein hiver ? De ces âpres froidures où la seule chaleur se trouve au fond d’une sombre ruelle, dans les bras de compagnons d’infortune tous aussi « gelés »? D’un cœur déchiré par la pointe glaciale de l’indifférence et de l’insensibilité? De ces nuits au ventre vide, à côtoyer la mort comme on côtoie l’ultime délivrance ? Rien ne condamne à la rue ad vitam aeternam et tout y conduit jusqu’au dernier souffle si dame chance – sous les traits d’une personne bienveillante – ne pose pas un regard de douceur sur l’âme en lambeaux, ne lui tend pas une main secourable.
Isa-Belle m’ouvre la porte. Le bonheur et la fébrilité se lisent dans ses yeux bleu espoir. Par-delà notre timidité première, nous partageons sur l’essentiel : l’écriture de son livre. Comme je suis allergique à ses deux magnifiques chats, nous nous réfugions dans son bureau du centre-ville. Par où commencer pour rejoindre les fantômes du passé? L’écriture performative me semble la voie indiquée pour entrer dans la spirale de sa vie ; pour établir un dialogue – à la première personne du singulier, en temps présent et en un seul jet – avec ce qui, de son passé, cherche une voie d’expression et de réception au creux des mots.
Après une longue conversation, elle débute, hésitante, incertaine. En écrivant, elle jette souvent un regard vers moi. Il me vient l’envie de la rassurer : « Je suis là, avec toi, Isa. Je ne te lâcherai pas, crois-moi ! »
J’évite d’interrompre son processus même si je sens poindre chez elle des interrogations inquiètes quant à l’ébauche de son livre.
Elle me tend son premier texte. Je frémis devant la force, la crudité, la puissance des mots. Ils sont directs, sans concession :
Je suis tapie derrière le conteneur à déchets, seringue à la main. Je guette les échos de la rue qui parviennent jusqu’à ma cachette au fond de la ruelle. Les tourbillons d’odeurs de jus de poubelle se mêlent aux bruits de la circulation. Je jette un dernier regard par-dessus le conteneur, espérant avoir le temps de faire mon hit sans me faire surprendre. Je relève ma manche.
S’ensuit l’écriture d’une chute brutale au fond de la détresse, dans les abîmes d’une souffrance ne connaissant aucun répit.
Les évènements de la longue traversée d’Isa-Belle St-Sauveur ressemblent à une grêle forte tombant sur les pavés et rebondissant pour mieux frapper le sol de nouveau. Une situation désastreuse n’attend pas l’autre. Une accalmie survient le temps de croire en l’espèce humaine avant de retomber encore plus bas dans le temple fermé du monde. Chacun des mots de ce livre résonne jusque dans mon ADN. Frissons. Difficile de demeurer stoïque, sans émotion devant une existence écorchée, penchant dangereusement du côté de la mort, cherchant la lumière à chaque croisée de chemin.
Par-delà les sanglots et les cris étouffés d’une vie à la dérive de soi, la force d’Isa-Belle, inhérente à sa fragilité, se fraie un passage vers une aurore en apparence couchée pour toujours sur l’horizon. Illusion d’immobilité! L’aube pâle et craintive prend peu à peu Isa-Belle dans ses bras et, ensemble, elles s’élèvent jusqu’à cet aujourd’hui rempli de promesses ensoleillées. La rue a marqué son parcours. Sur ces mêmes pavés de souffrance brille désormais la lumière de celle qui porte humblement son expérience au service de l’autre.
Merci, Isa-B