L Homme alcoolique
126 pages
Français

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Description

« Un jour, l'alcoolique est là, devant le médecin. Il a ressenti « un déclic », il a le sentiment de « toucher le fond », c'est à nous de l'aider. Même s'il nie son problème ou s'il a réussi - provisoirement - à se sevrer lui-même, il est assez mal pour être face à nous. C'est cette souffrance qu'il nous faut recevoir pour ne pas le laisser repartir seul avec. » (J.-P. D.) Qu'est-ce que l'alcool pour celui (homme, femme, adolescent) qui s'y adonne ? Quel rapport entre violences familiales et alcoolisme ? Pourquoi les patients alcooliques ne parlent-ils que de leur travail ? Quelle forme revêt leur sexualité ? Pourquoi l'alcoolique se croit-il « invulnérable » ? Peut-il s'en sortir et comment ?Ancien psychiatre des hôpitaux et psychanalyste, Jean-Paul Descombey a longtemps dirigé une équipe pluridisciplinaire d'alcoologie au Centre hospitalier général d'Orsay et a été médecin-chef du Centre Henri-Rousselle de l'hôpital Sainte-Anne à Paris.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 février 1998
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738163554
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ouvrage proposé par Édouard Zarifian
© O DILE J ACOB , FÉVRIER  1998 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
  www.odilejacob.fr
ISBN 978-2-7381-6355-4
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
www.centrenationaldulivre.fr
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À tous ceux et celles avec lesquels j’ai travaillé, aux patients alcooliques et à leurs proches.
Préface

« On a appelé vérités premières celles qu’on découvre après toutes les autres. »
Albert C AMUS , La Chute .

L’homme alcoolique est non seulement méconnu, mais inconnu. Avant 1950, en France métropolitaine, environ deux millions et demi d’individus (dont un quart de femmes) consommaient des boissons alcooliques en excès. Dépendants de l’alcool, essentiellement eau-de-vie, vin et bière, ils formaient le contingent de vicieux et d’exclus qui n’avaient aucun droit au regard des thérapeutes. On ne soigne pas le vice, on le fustige. Tache aveugle, continent inexploré.
 
Le point de vue historique donne au remarquable travail de Jean-Paul Descombey une autre dimension.
Le mot alcoolisme lui-même est d’un usage relativement récent. Or, depuis des lustres, l’avidité de certains était notoirement plus élevée que celle du commun. Homère et ses cyclopes qui vomissaient partout, et Gilgamesh avant lui, avaient la réputation d’ivrognes notoires. Quand Platon dans son Banquet s’interrogeait sur le thème de la discussion qui allait suivre, mais aussi sur la quantité de boisson convenable, Alcibiade et Socrate, en état d’ivresse, troublaient la réunion.
D’apparition tardive, on doit ce vocable à un certain Magnus Huss qui, en 1848, seulement, créa ce néologisme heureux. Professeur à Stockholm, son œuvre majeure, Alcoholismus chronicus, eller chronisk Alcoholssjudkom , ne fut traduite en allemand qu’en 1852 à Leipzig.
En 1837, ce jeune médecin, frais émoulu du Karolinska Institut, sous prétexte de convalescence après une longue fièvre typhoïde, avait entrepris une tournée européenne qui devait durer deux années. Il avait visité les principaux services médicaux d’Allemagne, d’Autriche, de Suisse et s’était aussi rendu à Paris. À son retour en Suède, il fut, en mai 1849, nommé à l’infirmerie Serafim à Stockholm. C’est là qu’il allait édifier son œuvre mémorable. À cette époque, la Suède était ravagée par une consommation forcenée d’un alcool tiré de la distillation de la pomme de terre, l’aquavit.
Ce fils de pasteur luthérien avait toute sa vie été animé par la passion de savoir et d’agir. D’abord féru de botanique et de toxicologie, il se révéla un excellent clinicien et publia des ouvrages sur le typhus, la typhoïde et la pneumonie. Professeur, il enseigna, donna des conférences, présida des colloques, fonda des institutions nouvelles en faveur des enfants et des malades, suscita la création d’un asile d’aliénés, créa des sociétés professionnelles et médicales et même une caisse d’épargne cantonale. Enfin, il devint médecin d’Oscar I er et de la famille royale. Son activité philanthropique fut sans limites et il fut aimé, respecté de tous. Lorsque, octogénaire, il mourut, en 1890, on lui fit des funérailles grandioses. Cet homme de foi et de devoir, militant infatigable qui avait lutté jusqu’au bout pour limiter la distillation à domicile, contrôler les cabarets, surtaxer les spiritueux, distribua des milliers d’exemplaires d’un pamphlet contre l’aquavit. À sa mort, il légua une partie de sa fortune à une association de tempérance.
Au début du II e  millénaire après Jésus-Christ survint un événement capital pour l’histoire de l’alcool : la découverte d’un produit nouveau tiré de la distillation du vin.

Arabes, Grecs ou Chinois
On ne sait rien de précis à cet égard. Les Chinois auraient pu être les premiers à « chauffer » des infusions de plantes pour en extraire les essences. Aristote, pour dessaler l’eau de mer, avait imaginé de la faire bouillir. Au cours des siècles, les Grecs d’abord, les Arabes ensuite, s’étaient essayés à vaporiser les liquides obtenus à partir de certaines poudres solubles pour en recueillir par refroidissement les principes volatils. Selon Fernand Braudel, la Perse sassanide aurait connu l’alambic : au IX e  siècle, on parle non seulement de la distillation des parfums, mais aussi les appareils utilisés sont décrits. À l’évidence, les premières techniques étaient fort artisanales et le plus souvent gardées secrètes. Chaudières, chapiteaux, vases à condensation et plus tard serpentins furent les principales améliorations qui permirent la découverte de l’« eau ardente ».

Le mot « alcool » vient de l’arabe Al Kohol
Le khôl désigne aujourd’hui encore une poudre très fine, presque impalpable, de sulfure d’antimoine que les femmes utilisent pour se farder les paupières. Le fait que le mot arabe se soit imposé n’implique pas que la découverte de l’art de la distillation soit une découverte arabe. Le mot arabe al-ambic vient du grec ambix qui signifie vase à distiller.
« Les principales conquêtes de la science grecque furent recueillies, dès le VII e  siècle, par les Arabes ou plus exactement furent transmises à l’élite arabe par les médecins chrétiens nestoriens d’Édesse et du pays sassanide. Les Occidentaux furent initiés à leur tour à partir du XII e  siècle par les Arabes d’Espagne, soit directement, soit par l’intermédiaire des savants juifs. »
L’ Encyclopédie de l’Islam estime que les musulmans n’obtinrent pas l’« esprit de vin » avant le XII e  siècle. C’est le latin pharmaceutique qui modifia le sens du mot al-kohol . Utilisé d’abord pour désigner toute substance pulvérisée, il fut attribué aux liquides distillés.
C’est à Paracelse (1493-1541) que revient le mérite d’avoir utilisé le terme alcool pour désigner la quintessence de l’esprit de vin.

Ses propriétés
Quoi qu’il en soit, ce n’est que beaucoup plus tard ( XIX e  siècle) que ce produit reçut son identification scientifique : éthanol, avec son matricule chimique CH 3 CH 2 OH. Il figura dans la famille des alcools entre le méthanol (acide méthylique provenant de la distillation du bois) et le propanol (alcool propylique). Eduard Buchner (1860-1917) décrivit le processus complexe de la fermentation des sucres par les levures. Cette réaction biochimique avait tellement stupéfait les Anciens qu’ils n’avaient pas hésité à en faire une manifestation divine.
Grâce à l’école de Salerne, ce produit fut connu en Europe. Moines, alchimistes, barbiers, chirurgiens et médecins distillaient à qui mieux mieux et tenaient secret le mode de préparation, d’administration de cet élément merveilleux, élixir de longue vie, solvant idéal et surtout conservateur des plantes médicinales sous forme de teintures.
C’est au Catalan Raymond Lulle (1235-1315), surnommé le Docteur illuminé, qu’on attribue le mérite de la création de ces préparations pharmaceutiques. Pour lui, l’eau-de-vie était une émanation de la divinité. Élément récemment révélé aux hommes, elle leur fut cachée durant l’Antiquité parce que la race humaine était alors trop jeune pour avoir besoin de ce breuvage destiné à raviver les énergies en ce temps de décrépitude.
À la même époque, Arnaud de Villeneuve (1235-1313), qui enseignait à Montpellier, se montrait plus enthousiaste encore. Dans ses écrits, il vante les mérites d’ aqua vitœ , élixir de vie, panacée, vieux rêve des alchimistes enfin parvenus à leurs fins.
Bien avant d’être consommée comme boisson, cette liqueur étrange fut considérée comme un médicament. Seuls les apothicaires avaient l’exclusivité de sa vente. Mais le monopole de sa fabrication resta longtemps celui d’une corporation, les sauciers-moutardiers-vinaigriers (1514), avant de revenir, un siècle plus tard, aux apothicaires. Ce qu’on appela beaucoup plus tard l’éthylothérapie connut son apogée au XIX e  siècle.

Commercialisation, diversification et leurs conséquences
La diffusion du procédé en Europe du Nord et la diversification des fabrications furent l’œuvre des marchands et des marins hollandais. Ce sont eux qui, dès la fin du XV e  siècle, ont généralisé le brûlage des vins et particulièrement des « petits vins » de Charente impropres à la consommation. Des flottes marchandes parties d’Anvers, de Hambourg ou des ports de la Baltique abordaient à Rochefort, La Rochelle ou Bordeaux, embarquaient une forte proportion de la production viticole du Sud-Ouest français pour la transformer en gin. Plus tardivement, les Anglais inventèrent le whisky (Irlande et Écosse), les Scandinaves l’aquavit (Suède). En France, le développement et la commercialisation du cognac, d’abord appelé brandy, et ensuite de l’armagnac sont dus à cette influence et à une particularité technique, la double « chauffe ».
Les conséquences de cette extension commerciale ne tardèrent pas à se faire sentir. La surconsommation de l’eau-de-vie fit ses ravages en Angleterre, en Suède et plus tard en Amérique du Nord.
L’ivrognerie au gin dans les bas quartiers de Londres fut stigmatisée dès la fin du XVI e  siècle. Une littérature édifiante décrivit la misère, le crime, la prostitution, la surmortalité infantile, la dégradation des mœurs, qui sévissaient à l’époque chez les déshérités de la rue du gin. La bière de fabrication de la poudre à canon. Au XVII e  siècle, dans ce pays, les fermiers produisaient à partir des grains de sirop d’érable et plus tard de pommes de terre leur brändwin , aquavit en suédois.

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