Gaëlle
47 pages
Français

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Description

An 972, dans un Nord mythique, Gaëlle, jeune enchanteresse qui découvre progressivement son art durant l'adolescence et l'utilise avec empathie et bienveillance, se trouve soudain confrontée aux affres de la guerre des clans et doit utiliser ses dons pour la destruction, ce qui lui pose de graves problèmes moraux auxquels elle apporte une solution inattendue...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 26 mai 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414533893
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér par Edilivre
Immeuble Le Cargo, 157 boulevard Mac Donald – 75019 Paris
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-53389-3

© Edilivre, 2022
Partie 1
1
An 972. C’était une colline recouverte de bruyère, mordue par l’hiver, d’où émergeaient des blocs de rochers. Elle se terminait en falaise, à la base de laquelle des vagues gris-vertes, lissées par la mousse de l’écume, venaient se briser sur la grève. Le port des habitants du village de Skoljen – desservi par un large escalier de bois – y déployait sa jetée ; d’épaisses baraques entourées d’un rempart semblaient plantées dans la plage de galets ; des embarcations de pêche et de guerre dansaient sur le ressac ; surplombant le tout, une tour de guet était dressée sous un ciel pesant.
Plus haut, tondant la falaise, une vingtaine de moutons paissaient une rêche végétation, sous un soleil blanc et une froide brise. A quelque pas, deux voix, féminine et masculine, semblaient sortir du sol sans qu’on en devine les instigateurs : allongés, et pétris par le désir, un jeune couple invisible de dix-huit ans se lutinait – pourtant plus sagement que ne l’aurait voulu le garçon :
— « Allez, Gaëlle ! laisse-toi faire ! On se marie dimanche et personne n’en saura rien ! » Essaya-t-il.
— « Non, Ronan, justement c’est pas si loin, tu vas devoir te calmer !
— Mais sois gentille, j’attends ça depuis si longtemps !
— Ronan, sois raisonnable, laisse ma robe ! »
Elle le repoussa gentiment avec cet étrange don qu’elle possédait, sans vraiment le maîtriser encore tout-à-fait : le jeune homme fut écarté comme par quelque chose d’invisible, et perdit une seconde l’usage de ses mains, curieusement immobilisées.
— « T’avais dit que tu ne ferais plus jamais ça ! » Fit-il semblant de gronder.
— « J’ai menti ! »
Tout de suite Gaëlle se leva en bondissant et riant, dans l’éclair grège de sa chaude tenue, entraînant une cascade de cheveux longs et blonds, qui volèrent un instant devant ses yeux profondément bleus. Fine et déliée, elle se mit à courir, aussitôt poursuivie par le garçon au regard brillant.
L’esprit totalement nourri par ce jeu érotique vieux comme le monde, la spécificité mentale particulière de la jeune femme, pourtant étendue, ne lui signala pas le danger imminent.
***
Et cependant, sur l’étroite langue de plage qui courait depuis la Crique Blanche, progressant lentement au pied des falaises, une lourde escouade d’arbalétriers ennemis se dirigeait discrètement vers le port, où une dizaine d’hommes préparaient les filets en plaisantant, détendus. Deux autres, accoudés à la rambarde de la tour de guet, surveillaient les flots, en buvant de l’hydromel. D’autres villageois montaient également la garde sur le chemin de ronde.
Les attaquants parvinrent à quelques mètres des constructions, investirent l’escalier sans éveiller le moindre soupçon, se trouvant ainsi derrière les fortifications et, selon un plan d’attaque réfléchi, firent jaillir de leurs armes silencieuses des carreaux précis. Les villageois surpris tombèrent tous, un à un, sans pouvoir apporter une réponse quelconque à l’attaque. Tout fut terminé en une poignée de secondes.
Deux des arbalétriers vindicatifs s’emparèrent alors d’une barque de pêche, cinglèrent discrètement en sens inverse jusqu’à la Crique Blanche, à l’est, où s’étaient dissimulés six drakkars aux voiles noires.
Prévenus du succès de l’attaque, les navires belligérants, au faible tirant d’eau, glissèrent alors prestement jusqu’au port ; une centaine de guerriers, armés d’épées, haches et boucliers ronds, sauta dans l’eau glacée et se précipita sur l’escalier qui menait vers la colline, menés par Karl, leur Jarl. Cinq d’entre eux portaient un bélier sculpté. Au bastingage du Drakkar amiral restait postée leur vieille Devineresse.
***
Là-haut, Gaëlle et Ronan se couraient toujours après, dans un concert de cris et de rires. Le jeu s’éternisait, chauffant le sang, colorant leurs joues. Les moutons dérangés bêlaient leur mécontentement. Derrière, très proche, à portée des jupons, Ronan se démenait, bras tendus, débitant quelques légères insanités qu’on lui pardonnera bien volontiers. Gaëlle, faussement choquée, louvoyant, émettait des réprobations pour la forme.
Soudain, sous l’impulsion d’une intuition précise, elle se retourna précipitamment : si Ronan courait bien derrière elle, à trois mètres, elle vit également tenter de les rattraper une troupe de guerriers ennemis, silencieusement parvenus sur la falaise ; un carreau bien ajusté vint alors se planter dans la nuque de Ronan, pour ressortir par sa bouche : l’amoureux s’écroula, privé de vie en une fraction de seconde. Interdite, Gaëlle comprit tout de suite l’irrémédiable situation, et n’eut même pas le luxe de se rendre vers le garçon : les ennemis, sans bruit, et au pas de charge, tiraient maintenant vers elle ; elle reprit vers l’avant sa course effrénée, la rendant sinueuse, de telle sorte que les hommes des Voiles Noires ne parvinrent qu’à frôler son bras droit avec un trait mal dirigé.
Gaëlle ne rompit pas son élan. Gaëlle vola. Elle connaissait le moindre caillou, la moindre flaque d’eau, le plus court branchage, et réussit progressivement à semer ses adversaires en utilisant sa parfaite connaissance du terrain.
Elle dévala la pente, dans le but de remonter la colline qui supportait Skoljen, leur village fortifié, pour hurler la nouvelle et que l’on sonne le cor. Mais un guetteur vigilant, juché sur la tour la plus haute du village, la devança et le cor mugit, reprit par quelques autres, et des clameurs montèrent de l’épaisse enceinte de bois qui ceinturait les habitations. Les paysans se saisirent de leurs arcs et fourches, cependant qu’une soixantaine de guerriers prirent leur poste sur les remparts. Gaëlle changea subitement de stratégie et alla se réfugier dans le creux du tronc d’un gros arbre tombé tout près depuis longtemps, où elle se cachait déjà, par jeu, de l’intérêt de Ronan. Il lui fallut se glisser à l’intérieur, en jugulant la douleur de son bras, puis tenter de couvrir ses pieds, qui dépassaient, en fourrageant dans un tapis de mousse et de lichen.
Cachée, elle entendit arriver les guerriers des Voiles Noires, sauter ou contourner son abri, dans des cliquetis métalliques et une vocifération de cris gutturaux, car à présent le silence leur était devenu inutile.
Et ce fut l’assaut.
Les séides des Voiles Noires utilisèrent le bélier à tête en forme de dragon, sous un toit de boucliers, pour arracher le portail de ses gonds. Toutefois, huile bouillante et pierre jetées sur eux freinèrent longtemps l’entreprise. Flèches et carreaux, de part et d’autre, fendaient l’air. Des attaquants tombèrent ; des villageois assiégés, touchés, passèrent par-dessus les remparts de bois dont une bonne partie se consumait déjà.
Le portail finit par céder sous les coups de boutoir des ennemis qui se ruèrent dans l’enceinte en hurlant. Hérolf, le Jarl du village, suivi de son fils Joründ, jura en courant vers eux, abattant sa hache à l’aveugle ; autour d’eux, des guerriers ennemis, vociférant, jetaient des torches dans les habitations et faisaient tournoyer leurs armes rougies par le sang.
Cependant Joründ, après avoir vaillamment résisté à l’avancée des Voiles Noires, taillant les ennemis de droite et de gauche avec son épée à deux mains, fut poussé le dos à un rempart, dont la base consumée le fit se renverser dans un sinistre craquement. Lors, un choix difficile se posa à lui. Devait-il continuer à se battre, et périr dans l’honneur, l’arme à la main, comme tout valeureux habitant du village – mais finalement sans que cela ne profite en rien à son clan ? Ou préserver sa vie en s’éclipsant, tout en projetant de reprendre plus tard le village, avec l’aide des alliés de l’ouest, se promettant l’exécution du brutal Jarl des Voiles Noires ? Il opta pour la seconde solution, choisit la vengeance différée, se voyant déjà faire subir à l’abject Karl l’« aigle de sang », supplice réservé aux pires traîtres auxquels on destine une vengeance sanguinaire.
Aussi se glissa-t-il hors du théâtre des opérations, louvoya-t-il entre des planches éclatées et des corps mutilés, trancha-t-il quelques Voiles Noires au passage, puis se rendit à l’enclos où il détacha son cheval pour le mener sans bruit, dans une béance de remparts à moitié calcinés qui menait à l’extérieur du village. Il rejoignit au plus vite des blocs de roches couverts de neige, s’éloignant courbé de la mêlée le plus rapidement possible. Puis, plus loin, il monta son animal à cru, gravit un petit tertre légèrement boisé, bifurqua plus au nord, atteignit après une heure de trot discret une pièce de terre humide où se dressait sa hutte de chasse, saisit son arc et son carquois, et quitta la baraque.
Il se dirigea alors résolument vers l’ouest, en évitant le chemin maladroitement dallé entre son village et le bourg d’Erskebor, à quinze lieues de là, adoptant marche et trot entre les rochers et les dépressions du sol pour préserver son animal.
***
L’assaut dura presque toute la nuit. Les villageois, pêcheurs et guerriers à la fois, rendaient pratiquement coup pour coup. Ils déployèrent une résistance acharnée, à laquelle les Voiles Noires ne s’attendaient pas. Mais ces derniers, excellents guerriers, assénaient des coups aussi brutaux que mortels, créant dans leur sillage sanglant les hurlements des femmes et des enfants. Les cris de l’acier zébraient l’air ; les faiblesses des épaulements furent exploitées ; les charpentes enflammées s’écroulaient au sol dans des gerbes d’étincelles. Bientôt tous les remparts disloqués finirent par joncher le sol, inutiles ; le bois des portes des maisons, pourtant cerclées de fer, brûlait furieusement sous l’huile de baleine ; le

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