Les Enfants et la Guerre
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Les Enfants et la Guerre , livre ebook

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Description

Quand l’enfant est face à la guerre, c’est tout son monde qui s’effondre. Il est exposé à la mort et à une déshumanisation totale. Les attentats, la guerre en Ukraine sont venus nous rappeler cette réalité qui marque toute une génération. Les enfants qui fuient pour un exode plein d’incertitudes, les enfants piégés dans les zones de combat et parfois enrôlés, mais aussi, d’une autre façon, les enfants qui sont confrontés aux informations et aux images des médias et qui vivent une insécurité nouvelle dans leur quotidien. Ce livre nous fait prendre la mesure des conséquences psychiques considérables des événements traumatiques de guerre chez les enfants. Avec bienveillance, l’auteure montre qu’il n’est jamais trop tard pour accompagner un enfant dans son vécu traumatique, pour l’aider à construire son devenir en apprivoisant ses blessures psychiques. Parents, éducateurs et tous les adultes trouveront les clés pour expliquer la guerre aux enfants, pour protéger et sécuriser ceux qui souffrent de stress post-traumatique. Hélène Romano est psychologue clinicienne et psychothérapeute. Depuis le début de la guerre en Ukraine, elle intervient auprès d’institutions et de professionnels pour mieux accompagner les enfants exposés à la guerre. Elle a notamment publié Quand la mère est absente (2021) et Quand la vie fait mal aux enfants (2018). 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 septembre 2022
Nombre de lectures 1
EAN13 9782415002817
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB, SEPTEMBRE 2022 15, rue S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-4150-0281-7
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Composition numérique réalisée par Facompo
Introduction

Le 24 février 2022, alors que nous sommes encore en pleine pandémie de Covid-19, la guerre éclate en Ukraine et vient violemment nous rappeler la fragilité des équilibres géopolitiques et notre vulnérabilité d’être humain. Cette guerre nous semble « proche » – pour reprendre l’expression de nombreux journalistes – mais, en termes de kilomètres, bien d’autres guerres et conflits armés ne sont pas tellement plus éloignés de la France et ne se sont pas arrêtés sous le simple effet du Covid-19. Simplement, la crise sanitaire est venue faire écran aux innombrables conflits qui s’enlisent depuis des années à travers le monde. Pendant près de deux ans, le monde semble n’avoir tourné qu’au rythme de l’évolution de ce virus, comme si plus rien d’autre n’avait d’importance. Pourtant, les conflits en Somalie, en République démocratique du Congo, au Mali, au Yémen, en Syrie, en Irak, en Afghanistan et ailleurs ont continué, avec leurs milliers de morts et de blessés. Mais pour des Occidentaux bien ancrés dans leurs préoccupations quotidiennes, liées à l’urgence de la crise sanitaire, plus rien d’autre n’avait d’importance.
Et puis, tout a basculé ce 24 février 2022, avec l’invasion des troupes russes en Ukraine qui est venue nous sortir de cette sorte de léthargie face à la pire réalité de ce que les hommes sont capables de faire.
En quelques heures, la guerre en Ukraine envahit l’espace médiatique, l’inquiétude des dirigeants contamine les journalistes et, inéluctablement, la population désormais perfusée aux médias dès les premiers moments de la journée.
Comment comprendre que cette guerre ait ainsi totalement bouleversé la population mondiale quand d’autres conflits continuent de faire des milliers de victimes ? Comment comprendre cet élan de solidarité inédit pour les Ukrainiens quand tant de réfugiés de pays en guerre se voient à peine considérés ou totalement rejetés ? La vie a-t-elle plus de valeur en Ukraine qu’ailleurs ? Comment expliquer aux enfants ces traitements si différents d’une guerre à l’autre ?
À ces questions multiples, il n’existe sans doute pas une unique réponse tant la situation est complexe. Mais nous pouvons faire un simple constat : la guerre en Ukraine illustre remarquablement la théorie du « mort-kilométrique », expression macabre qui correspond au fait que l’attention portée par les médias et leurs téléspectateurs est d’autant plus importante que la distance qui les sépare des faits est faible. Là, ce n’est pas tant la distance spatiale qui nous semble à l’œuvre que la proximité culturelle. L’Ukraine étant un pays européen, les identifications projectives sont inévitablement plus importantes et associées aux relents anxiogènes de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre froide. D’où, sans doute, cette mobilisation immédiate qui n’a pas laissé les enfants indifférents.
La guerre existe sur tous les continents, depuis des siècles, et, s’il y a eu des évolutions concernant les modalités de combat, l’armement, les retombées sur les civils et sur la vie économique, en fin de compte, la guerre a toujours existé et existera sans doute toujours.
Elle est là, toujours là. Et concerne toutes les populations quels que soient les âges et donc, inévitablement, les enfants.
Évoquer l’enfant face à la guerre apparaît comme un oxymore tant ces deux notions s’opposent par les représentations qu’elles recouvrent : la vie et la mort ; l’espoir et le désespoir ; le bonheur et le malheur ; l’avenir et le passé ; l’insouciance et l’inquiétude ; la joie et la tristesse… et nous pourrions continuer longtemps cette liste qui nous confronte à cette réalité que la vie ne préserve personne de ses drames. Petits et grands peuvent y être exposés.
Si certains traversent la vie sans trop de heurts, d’autres accumulent les épreuves de toutes sortes, sans répit.
Et parmi ces drames, il y a la guerre.
À lui seul, ce mot sidère, tant il fait surgir la mort avec ses images de corps, de désastre, de destructions, de chaos absolu et de terreur. Comment y associer les enfants quand nous voudrions tant qu’ils soient préservés des épreuves de la vie ?
La mort fait pourtant partie de la vie, les souffrances font partie de la vie, la guerre aussi.
Loin de n’être qu’une histoire de conflits entre chefs d’État par armées interposées, les guerres engagent les militaires, les civils et parmi eux les plus fragiles que sont les enfants. Ces derniers ont depuis toujours été exposés aux guerres comme victimes collatérales des conflits. Mais longtemps, la mortalité infantile étant très élevée, les enfants ne survivaient que rarement et suscitaient peu d’attention. Savoir que des enfants souffraient, mouraient de faim ou de leurs blessures n’avait pas grande importance, jusqu’à ce que la place de l’enfant dans la société humaine soit véritablement considérée, et sa dignité en tant que personne respectée. Il a fallu attendre longtemps, très longtemps à l’échelle de l’humanité, pour que la communauté des hommes prenne enfin en compte l’enfant comme sujet à part entière. En Occident, ce n’est qu’au XIX e  siècle que l’on peut constater une évolution significative de l’attention portée aux enfants, du fait de la baisse de la mortalité infantile. L’enfant n’est plus envisagé comme un objet pouvant être exploité au travail sans limite, maltraité sans risque de poursuite, échangé ou prêté dans l’intérêt de ses parents. Il devient un être dont il faut prendre soin et qu’il faut protéger.
Peu à peu, l’enfant est ainsi reconnu par le monde des adultes comme une personne 1 , non pas un adulte en miniature, mais un petit d’homme en devenir, dépendant des adultes pour survivre, grandir, apprendre, comprendre et construire par étapes sa vie d’enfant, d’adolescent puis d’adulte. Et l’intérêt accordé à ce qu’il pouvait vivre, à son ressenti et à ses souffrances, a fait chemin.
La guerre met en présence des dirigeants, des armées, des populations et, parmi elles, des bébés, des enfants, des adolescents. Si pendant des siècles le sort des enfants face à la guerre ne semblait pas préoccuper plus que cela les responsables politiques, depuis la Seconde Guerre mondiale le contexte s’est transformé : une attention spécifique leur est dorénavant consacrée, notamment grâce à des études qui mettent à disposition des données chiffrées.

Selon les organisations internationales, sur ces dix dernières années, plus de 2 millions d’enfants ont été tués dans des guerres ou des conflits armés ; plus de 5 millions d’enfants ont dû être exilés en raison de la guerre ; près de 6 millions resteront handicapés à vie à cause de violences de guerre ; plus de 8 millions d’enfants ont été estropiés, blessés par des mines ; et des milliers d’enfants ont été enlevés, ont subi des violences sexuelles ou ont été exploités sexuellement 2 . Au-delà de ces chiffres épouvantables, la réalité est probablement bien pire, car ne sont recensés que les cas connus, c’est-à-dire les enfants repérés, pris en charge, ayant pu être sauvés, se sauver et solliciter de l’aide.
Toutes les autres situations restent dans un angle mort, sans être prises en compte dans la réalité du nombre d’enfants victimes de la guerre et de ses conséquences.
Chaque enfant est différent, chaque enfant a sa conception du monde pour comprendre ce qu’il vit, en particulier lorsqu’il s’agit d’événements qui viennent bouleverser sa vie comme une guerre. Mais les enfants, qui n’ont pas les ressources cognitives des adultes ni leur maturité affective, ne comprennent pas la guerre comme les plus grands. Elle n’a pas le même sens dans leurs représentations, ce qui ne veut pas dire qu’ils ne sont pas affectés par ses effets sur leur vie.
Si pour le dictionnaire la guerre est avant tout « une lutte armée entre États 3  », pour les enfants, la guerre est une notion bien plus complexe. Ils en comprennent la gravité, mais peuvent aussi recourir à ce terme pour qualifier des choses très difficiles qu’ils vivent au quotidien. La guerre à hauteur d’enfant n’a pas le même visage, comme en témoignent ces phrases d’enfants 4 relevées lors d’interventions en milieu scolaire.

« La guerre, ça fait très mal », nous explique Johan, 4 ans.
« La guerre, c’est des bagarres qui sont plus fortes que tout », Baptiste, 5 ans.
« Mes parents, ils ne s’aiment plus et ils se font la guerre, et nous, on est au milieu comme des otages », Julie, 9 ans.
« La guerre, c’est quand la vie d’avant, elle est détruite », Noémie, 7 ans.
« La guerre, c’est quelque chose qui fait trop peur », Romain, 4 ans.
« La guerre, c’est la pire des bagarres où tout le monde meurt avec des armes de partout », Julien, 6 ans.
« La guerre, ça rend tout triste et après, il faut tout réparer », Justin, 5 ans.
« Ma mère, elle m’a dit qu’elle était en guerre contre son cancer et qu’elle allait gagner… mais c’est le cancer qui a été le plus fort et ma mère elle est morte », nous explique Nolwenn, 9 ans.
« La guerre c’est quand mon père se met à hurler sur nous et sur notre mère. Il pourrait tout détruire et nous, on est tout seuls », Bastien, 7 ans.
« La guerre, elle est entrée dans ma tête quand j’ai appris la mort de mon père ; il s’est jeté d’un pont

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