Pierre Mendès France, un homme d avenir
514 pages
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Pierre Mendès France, un homme d'avenir , livre ebook

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Description

Pierre Mendès France est, après le général De Gaulle, l'homme qui a laissé l'empreinte la plus profonde sur la vie politique française du XXè siècle. Son originalité consistait à dire la vérité, même au péril de sa carrière. Nommé ministre de l'Économie du gouvernement provisoire par De Gaulle en 1943, il démissionna en avril 1945, la politique inflationniste choisie par le Général lui paraissant un frein pour le redressement. De même dès 1950 il dénonça l'impasse de la guerre d'Indochine. Son gouvernement de 1954-1955 séduisit par son dynamisme : la paix en Indochine obtenue en un mois, la première expérience de décolonisation paisible en Tunisie, la solution de la crise européenne en encadrant le réarmement allemand et une politique économique posant les bases d'une expansion durable sans inflation. À partir de 1958, malgré l'admiration qu'il portait à De Gaulle, il resta dans une opposition constante, jugeant le nouveau régime peu démocratique. Certaines de ses décisions intriguèrent l'opinion : était-il de droite ou de gauche ? Michel Beck, spécialiste des problèmes de commerce international, répond à cette question en s'intéressant à ses orientations économiques, dans un langage accessible à tous. Il montre que ses choix étaient constamment dictés par le souci d'éviter les crises économiques et de juguler ce cancer qui les suit : le chômage. Fruit d'un long travail de recherche basé sur des sources variées, pour certaines inédites, le résultat est une biographie passionnante, portrait nuancé d'un esprit libre dont les leçons sont encore utiles aujourd'hui et pour demain.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 novembre 2017
Nombre de lectures 2
EAN13 9782342156911
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Pierre Mendès France, un homme d'avenir
Michel Beck
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Pierre Mendès France, un homme d'avenir
 
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Avant-propos
L’homme politique de 75 ans, qui s’éteint en octobre 1982, a exercé le pouvoir peu de temps. Pourtant, pendant un demi-siècle, dans l’opposition comme au gouvernement, il a été souvent au centre des débats, suscitant les passions les plus vives : admiré, puis détesté avec une intensité comparable.
Dans sa jeunesse, il brûle les étapes. À 16 ans, il milite au parti radical, à 18 ans, il est diplômé de sciences politiques, à 21 ans, il est docteur en droit pour sa thèse sur la politique financière du gouvernement Poincaré, à 25 ans, il est élu député, à 31 ans, il devient sous-secrétaire d’État au Trésor dans le deuxième gouvernement de Léon Blum. Son ambition n’est pas celle d’un arriviste : il ne s’accrochera jamais au pouvoir. Il le prouve lorsque ministre de l’Économie du général De Gaulle dans le gouvernement provisoire, il s’oppose à la politique prônée par son collègue des Finances, René Pleven, parce qu’elle lui paraît dangereusement inflationniste. Le Général tranche en faveur de R. Pleven. Il ne transige pas et démissionne en avril 1945. Il y gagne une réputation de rigueur qu’il confirmera dans les années suivantes, mais qui lui vaudra d’être qualifié par Guy Mollet, chef du Parti socialiste, de réactionnaire social.
En mai 1954, la France subit après 8 ans de combats une lourde défaite à Diên Biên Phu, dans une Indochine qui appartient à son domaine colonial. C’est à lui qu’on fait appel ; lui qui, depuis des années, dénonce – sous les injures, voire sous les menaces de traduction en Haute Cour – la politique menée dans cette région. Il promet la paix en un mois et y parvient. Dix jours après, il inaugure la politique de décolonisation en proposant l’autonomie interne à notre protectorat tunisien. Il trouve ensuite une solution à la grave crise française, européenne et atlantique posée par le réarmement allemand. Il vient de résoudre en sept mois ces problèmes dans lesquels s’étaient embourbés depuis huit ans les gouvernements timorés de la quatrième République. Il y acquiert une forte audience en France et à l’étranger.
Homme des choix clairs, il est accusé d’ambiguïté ; la question est posée au Parlement et dans la presse : est-il de droite ou de gauche ? Dans une époque marquée par les tensions de la guerre froide qui facilite les classifications sommaires, il est soupçonné à droite, d’être au mieux un neutraliste, au pire un cryptocommuniste. À gauche, il est poursuivi d’une haine tenace par le Parti communiste dont il a refusé les voix lors de son investiture et qui voit en lui un suppôt de l’impérialisme américain  ; au Parti socialiste, qui pourtant le soutient, il est l’objet d’une surveillance méfiante. L’Assemblée renverse en février 1955 son gouvernement parce qu’elle n’accepte plus sa politique libérale en Afrique du Nord, mais aussi parce qu’elle craint, qu’après sa vigoureuse lutte antialcoolique, il s’attaque à quelques autres féodalités économiques puissantes.
En 1956, il démissionne du gouvernement Guy Mollet après trois mois de présence, parce qu’il refuse de soutenir la politique de force en Algérie. Il s’attire alors les haines féroces de plusieurs secteurs de l’opinion. Admirateur du général De Gaulle, il est l’un des tout premiers à suggérer qu’on fasse appel à celui-ci face à l’aggravation de la guerre d’Algérie et à la crise de régime qui s’annonce. Pourtant, devant les conditions du retour au pouvoir du Général, il se situera dans une opposition constante à partir de 1958. Elle sera d’autant plus ferme qu’il rejette les nouvelles institutions les jugeant peu démocratiques. Pour cette raison, il refusera à plusieurs reprises et malgré de nombreuses pressions d’être candidat à la présidence de la République.
Exclu du Parti radical en 1959, il adhère au Parti socialiste autonome puis au Parti socialiste unifié. Il y sera combattu tantôt sournoisement, tantôt avec virulence. On y fera contre lui un procès en défaut de socialisme. Il redeviendra un électron libre au sein de son nouveau parti comme il l’avait été dans le précédent.
Lors de la crise de mai 68, des ministres du Général, des hommes de droite, d’extrême droite, des hommes de gauche, y compris certains de ses adversaires du PSU, des syndicalistes, se tournent vers lui pour qu’il prenne le pouvoir, au point que, pendant quelques jours, sa « légitimité » semble en passe de supplanter celle de Charles De Gaulle. La grande peur passée il est dénoncé comme gauchiste par ceux-là mêmes qui voulaient faire de lui un rempart contre l’aventure. Ils ignorent qu’il est alors démissionnaire du PSU qu’il a jugé trop proche des extrémistes pendant la crise. Il est battu aux élections qui suivent. Il ne reviendra jamais à l’Assemblée nationale. Malgré cela, il participera aux combats de l’époque de façon très active jusqu’à la fin de sa vie. Il prendra position à chacune des élections législatives ou présidentielles, soutenant la gauche (en ne lui ménageant pas les critiques), mais surtout en apportant des idées novatrices pour la recherche d’un nouvel ordre monétaire international ou la paix israélo-arabe.
Devant tant d’observations contradictoires, nous allons tenter de répondre à la question : qui était Pierre Mendès France ? Pour cerner sa vérité, nous nous appuierons évidemment sur ses déclarations et sur ses actes, mais aussi sur ceux de ses adversaires. Le principal fil conducteur sera fait de ce à quoi il a consacré tant de temps et de savoir-faire : ses réflexions et ses réalisations dans le domaine économique et financier.
Nous comprendrons peut-être alors mieux la continuité, et les inflexions de sa pensée, ses succès comme ses échecs, et verrons pourquoi cela présente encore un intérêt pour les hommes d’aujourd’hui.
Chapitre 1.  Des origines portugaises, juives et… très françaises
Au mois de novembre 1683, trois frégates françaises venant de Lisbonne entrent dans le port de La Rochelle. Elles ramènent l’ambassadeur de France au Portugal, et ses collaborateurs. À bord de l’une d’elles se trouve aussi Luis de França, marchand de tabac et de tissus, juif portugais de 42 ans qui fuit les persécutions de l’Inquisition. Le 14 février précédent, il avait été arrêté sous l’accusation de « judaïser » (pratiquer en secret la religion juive). Il avait été dénoncé par un pharmacien, Antonio Serrão de Castro, esprit libre, qui animait un petit cercle de réflexion discutant sans préjugés de problèmes littéraires politiques, religieux. Cet homme avait écrit un poème : Les Rats de L’Inquisition, imprudence qui va lui coûter cher, à lui et à beaucoup d’autres. Il avait été dénoncé comme judaïsant en 1672. Il avait résisté dix ans aux pressions des Inquisiteurs. Mais en 1682, apprenant qu’un de ses fils l’avait dénoncé, il avait à son tour dénoncé et sa famille et ceux qui avaient fréquenté son cercle, dont Luis de França et deux de ses cousins.
Luis est interrogé par le tribunal du Saint-Office. L’ordre suivi par la procédure est significatif des centres d’intérêt de l’Inquisition. La première audience est consacrée à l’inventaire de ses biens, la deuxième à sa généalogie. Il déclare qu’il n’a pas judaïsé. Dit-il la vérité ? C’est ce que tendaient à penser les spécialistes qu’avait consultés Pierre Mendès France. Gérard Boulanger dans son livre Le « juif » Mendès France  1 souligne que toute pratique religieuse dissidente, dans la promiscuité du vieux Lisbonne, n’aurait pu échapper à l’attention des voisins et à la vigilance des enquêteurs de l’Inquisition. En outre depuis la politique d’assimilation forcée menée par le roi Manuel I er la plupart des familles juives qui étaient restées au Portugal, malgré les persécutions survenues entre-temps, s’étaient intégrées et étaient devenues catholiques. Luis n’a d’ailleurs qu’un huitième de sang juif. À l’inverse, Carsten Wilke, dans son Histoire des juifs portugais  2 souligne que les pratiques des marranes (juifs convertis de force) de deuxième ou troisième génération étaient de plus en plus discrètes et de moins en moins de type rabbinique : on se contentait de ne pas manger de viande de porc et parfois de jeûner pendant le Yom Kippour. On voit qu’il est difficile d’être très affirmatif sur ses pratiques judaïsantes. Ce qui plaide le mieux pour établir son caractère de catholique sincère, c’est qu’il continuera de l’affirmer après avoir échappé à l’Inquisition par son exil en France.
Pour sa défense, Luis explique qu’il a cessé de fréquenter le cercle animé par le pharmacien depuis dix-huit ans. Pourtant à la troisième audience, le 23 juillet, sous la menace de la torture, il se contredit, avoue avoir judaïsé et dénonce dix-sept personnes. Le 27 juillet, apeuré, il livre cinq autres noms. Ce n’est toujours pas suffisant : on veut qu’il dénonce des membres de sa proche famille, la véritable cible du tribunal. On le conduit le 31 juillet à la chambre de torture, il craque devant la perspective du supplice et dénonce sa tante, deux cousins, deux de ses frères sur trois et ses deux sœurs. Il est condamné à suivre un autodafé (promenade à travers la ville où on abjure ses erreurs devant le roi, la Cour, les dignitaires de l’Inquisition)

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