Géographies humaines : L espace en partage
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Description

Longtemps confinée aux marges de l’histoire et de la géologie, la géographie s’émancipe au cours du 20 e siècle et prend enfin la place qui lui revient. Mieux, elle devient le pivot autour duquel tournent diverses approches disciplinaires, ce qui permet de rendre compte de questions touchant l’espace et les territoires selon une étonnante cohésion. Dans cet ouvrage, les auteurs soulignent l’importance de la géographie comme discipline pour comprendre le monde qui nous entoure. Organisé, entre autres choses, autour de grands enjeux tels que l’empreinte environnementale des sociétés, la mondialisation, la géopolitique, l’autochtonie, les migrations, les systèmes de transport ou encore les frontières, chaque chapitre illustre les dynamiques sociospatiales qui animent nos espaces en partage.
On voit alors les liens étroits qui unissent, par exemple, la mondialisation économique et les migrations et on comprend mieux le caractère indissociable des questions coloniales et celles de l’accès aux ressources et aux territoires pour les peuples ayant subi diverses formes de dépossession. À la fois général et détaillé, cet ouvrage brosse le portrait d’une discipline carrefour, dynamique, engagée et pertinente et offre des clefs d’analyse à tout lecteur intéressé à comprendre les transformations du monde dans lequel il vit.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 août 2022
Nombre de lectures 2
EAN13 9782760646940
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,1500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la direction de Violaine Jolivet, Patricia Martin et Sébastien Rioux
GÉOGRAPHIES HUMAINES: L’ESPACE EN PARTAGE
Les Presses de l’Université de Montréal




Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: Géographies humaines: l’espace en partage / [sous la direction de] Violaine Jolivet, Patricia Martin, Sébastien Rioux. Noms: Jolivet, Violaine, 1981- éditeur intellectuel. | Martin, Patricia, 1968- éditeur intellectuel. | Rioux, Sébastien, 1980- éditeur intellectuel. Collection: Paramètres. Description: Mention de collection: Paramètres | Comprend des références bibliographiques. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20220014175 | Canadiana (livre numérique) 20220014183 | ISBN 9782760646926 | ISBN 9782760646933 (PDF) | ISBN 9782760646940 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Géographie humaine. Classification: LCC GF41.G46 2022 | CDD 304.2—dc23 Mise en pages: Folio infographie Dépôt légal: 3 e trimestre 2022 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2022 www.pum.umontreal.ca Les Presses de l’Université de Montréal remercient de son soutien financier la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).




Introduction
Violaine Jolivet, Patricia Martin et Sébastien Rioux
Nous sommes toutes et tous des géographes. L’importance de la géographie pour comprendre le monde qui nous entoure est manifeste. L’espace, au même titre que le temps, a envahi notre vie quotidienne. L’exemple le plus probant à l’heure actuelle est l’utilisation de plus en plus répandue et parfois compulsive des technologies mobiles pour circuler dans l’espace. Des applications multiples nous permettent de publier notre localisation, d’évaluer le trajet le plus rapide pour nous rendre d’un point A à un point B, de consulter les déplacements des autobus en temps réel ou de rêver à notre prochaine destination de voyage en parcourant le globe sans même faire un pas. Des logiciels de déplacement assisté évaluent même la distance en temps et en coût de nos trajets potentiels, et le GPS nous localise partout ou presque. Jamais notre existence géographique n’aura généré autant de données, laissant des traces numériques et géoréférencées de nos déplacements, souvent sans que nous prenions conscience des conséquences qu’ont ces données sur notre vie privée.
Or, si les technologies actuelles ont permis une représentation sans précédent de l’espace terrestre en tant qu’espace euclidien, c’est-à-dire en tant qu’espace vectoriel permettant sa formalisation géométrique, ce dernier a depuis longtemps intégré nos vies et nos visions de l’espace. Des parcs naturels aux continents en passant par les circonscriptions électorales, les espaces publicitaires et la propriété privée, partout l’espace est représenté, découpé, délimité. L’invasion des technologies dans notre quotidien renforce aujourd’hui notre capacité à naviguer numériquement dans l’espace, surtout quand ce dernier nous est totalement inconnu. Toutefois, cela ne doit pas cacher le fait que partout et bien avant le développement d’appareils sophistiqués, nous nous sommes appliqués à connaître le territoire dans lequel nous vivons, à lire le paysage qui nous entoure, à lui donner un sens à travers nos expériences et nos représentations. Les êtres humains sont des géographes dans la mesure où ils s’approprient cognitivement et symboliquement l’espace, où ils acquièrent une mémoire, un imaginaire et une pratique propres à leur territoire. Cette connaissance ne se limite pas à un sens de l’orientation, à savoir où situer des lieux; elle est également liée à des souvenirs, à des émotions et à notre capacité à observer les transformations ponctuelles ou durables de nos environnements, à nous identifier, à nous reconnaître ou, au contraire, à nous sentir étrangers, voire vulnérables dans un lieu.
Comme le rappelle Georges Perec dans son roman Espèces d’espaces (1974), on ne peut réduire l’espace à un catalogue, et il n’existe pas de lieux immuables ou intouchés. On aura beau en faire l’inventaire, décrire chaque recoin de nos espaces quotidiens, l’espace nous habite autant que nous l’habitons. En ce sens, habiter ce n’est pas uniquement résider ou élire domicile; c’est aussi exister, aurait dit Éric Dardel (1952), montrant que notre condition géographique est ontologique. De même, Yi-Fu Tuan (1991) souligne la nécessité de penser la Terre comme un chez-soi de l’humanité, nous engageant ainsi à une réflexion et une analyse de notre place individuelle et collective dans un monde social et naturel toujours changeant. L’être de l’humain s’inscrit ( graphein ) dans la terre ( geo ): il est donc géographe et géographies. C’est pourquoi Béatrice Collignon (2005) nous rappelle que chaque habitant possède un savoir vernaculaire sur l’espace qu’il habite. Ces savoirs géographiques longtemps ignorés par la pensée «savante», car ils se fondaient uniquement sur l’expérience des gens et non l’expérience scientifique, prouvent pourtant que chacun de nous produit des connaissances sur l’espace, emmagasine des informations, construit ses propres repères. Aussi ordinaires qu’ils puissent paraître, ces savoirs n’en demeurent pas moins des ancrages qui nous territorialisent.
Malgré l’importance des savoirs géographiques sur le plan individuel et collectif, la géographie pâtit d’une méconnaissance étonnante. Loin d’être un simple apprentissage des capitales du monde, la géographie n’est plus cette entreprise d’inventaire consistant à localiser les lieux, les ressources et les frontières, à aplanir le monde sur des cartes. La géographie, en tant que science, peine également à être valorisée au sein du monde universitaire, et demeure moins bien connue que l’histoire, la sociologie et l’anthropologie, même si cette dernière partage avec elle la spécificité d’avoir un versant physique et un versant humain. La méconnaissance de la géographie a plusieurs origines. Si la géographie en tant que façon de penser le monde a émergé durant l’Antiquité autant en Occident que dans d’autres aires géographiques, l’émergence de la discipline contemporaine de la géographie a lieu au 19 e siècle, en parallèle avec la formation des universités modernes et, surtout, des exigences territoriales des empires (De Koninck, 2008). Cette organisation «moderne» des savoirs, qui découpe la société en sphères étanches (politique, économique, société, culture), pose de grands défis pour la géographie. Si l’organisation spatiale du monde ainsi qu’une réflexion sur la relation entre les êtres humains et les milieux naturels sont au cœur de la géographie, la discipline est un champ d’études fondamentalement synthétique difficile à délimiter. En conséquence, on accuse souvent la géographie d’être dépendante intellectuellement des autres disciplines (Livingstone, 1992; Mitchell, 2004). De plus, la division très nette entre les sciences sociales et les sciences naturelles à l’université ne facilite pas la tâche à la géographie, qui s’articule autour de deux grandes traditions que sont la géographie humaine et la géographie physique. Ces deux dilemmes fondamentaux, qui relèvent de l’organisation des savoirs et non d’un manque de cohérence intrinsèque à la discipline, perdurent à ce jour. En tant que discipline carrefour avec des approches transversales qui embrassent d’autres disciplines, la géographie résiste au découpage et à la territorialisation des savoirs.
Le caractère résolument synthétique de la géographie est, selon nous, un des atouts de la discipline qui souligne l’originalité et la puissance de l’analyse géographique. Malgré la place centrale que devrait occuper la géographie aujourd’hui, force est de constater qu’une série d’engagements pratiques et intellectuels douteux ont également eu un effet négatif sur la trajectoire et le développement de la discipline dans son incarnation moderne. Soulignons en particulier une tradition impérialiste qui s’institutionnalise dès la fin du 19 e siècle, particulièrement au Royaume-Uni et en Allemagne. Sous l’influence d’un darwinisme social, la géographie devient la discipline par excellence de l’impérialisme, en affirmant que l’expansion territoriale serait un processus naturel permettant le développement national (Ratzel, 1987). En lien étroit avec cette orientation, la géographie, qui s’affiche au début du 20 e siècle comme une science des relations «homme-milieu», est fortement influencée par le déterminisme environnemental. Selon cette idée pseudoscientifique, l’environnement naturel en général et le climat en particulier auraient un effet déterminant sur l’essence même des sociétés. Par ce fait, la géographie a contribué à un racisme scientifique qui justifiait l’expansion territoriale et la domination coloniale.
Le rejet du déterminisme environnemental au milieu du 20 e siècle replongera la géographie dans une quête pour affirmer sa scientificité. Opérant un tournant quantitatif dans l’après-guerre, la géographie se réinvente en tant que discipline ayant pour but d’énoncer des lois spatiales et de créer des modèles cartographiques avec un pouvoir de prédiction. Ancrée dans un positivisme logique qui s’articule autour d’une épistémologie empiriste, la géographie quantitative qui émerge dans les années 1950 part du postulat qu’il existe une dichotomie entre les «faits» et les «valeurs» et, par conséquent, qu’il est possible d’accéder objectivement à la réalité. C’est ainsi que l’étude des objets et de leur localisation dans l’espace devient l’essence d’une analyse géographique dénuée de rapports sociaux.
La géographie contemporaine marque une rupture épistémologique avec cet héritage intellectuel, notamment en adoptant des postures théoriques, conceptuelles et méthodologiques dites «critiques» ou «post-positivistes». L’espace n’est pas organisé p

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