Afghanistan : peau de chagrin

Alexandre Rahimi

Description

Les plus jeunes connaissent l'Afghanistan comme le premier pion américain du XXIe siècle avancé sur l'échiquier international. Les moins jeunes connaissaient déjà son rôle à l'aube des années 1980. Mais qui se souvient véritablement de l'histoire de ce pays et de sa situation stratégique ?

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Informations

• Publié par: Société des écrivains
• Date de parution: 15 mai 2013
• Nombre de lectures: 2
• EAN13: 9782342006261
• Langue: Français

Extrait

Afghanistan : peau de chagrin
Alexandre Rahimi
Société des écrivains

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Afghanistan : peau de chagrin
 
 
 
À mon père,
À ma mère,
Aux victimes afghanes.
 
 
 
 
Remerciements
 
 
Je remercie Claude et Marie-Antoinette Simon et Catherine Thèves pour leur apport lors de la construction de ce projet.
 
Je remercie monsieur Alain Houot pour sa gentillesse quant à l’utilisation des cartes historiques.
 
Je remercie Louis Meunier, organisateur de l’expédition « les Afghans au sommet », pour l’utilisation de ses magnifiques photos.
 
J’adresse mes chaleureux remerciements à Reza et le site Webistan pour leur gentillesse quant à l’utilisation gracieuse des photos du commandant Massoud.
 
Je remercie l’association des anciens élèves de l’école Michelet à Vanves pour leurs photos d’archive.
 
Je remercie mon épouse Sylvaine et mes enfants Coline, Lucas et Mattieu de m’avoir supporté durant le projet.
 
 
 
Sommaire
 
 
 

 
 
 

J’entends crier de toutes parts à l’impiété.
Le chrétien est impie en Asie, le musulman est impie en Europe, le papiste à Londres,
Le calviniste à Paris…
Qu’est-ce donc qu’un impie ?
Tout le monde l’est-il, ou personne ?
 
Diderot
Les pensées philosophiques
 
 
 
 
 
 
 
Le discours sur la paix
 
Vers la fin d’un discours extrêmement important
Le grand homme d’État trébuchant
Sur une belle phrase creuse
Tombe dedans
Et désemparé la bouche grande ouverte
Montre les dents
Et la carie dentaire de ses pacifiques raisonnements
Met à vif le nerf de la guerre
La délicate question d’argent !
 
Jacques Prévert
Paroles
 
 
 
 
از    جداهی   ها   حکا یت    میکند
کز    نیستان   تا   مرا  ببریده   اند
در   نفیرم    مر د و زن نا لیده  اند
سینه خو اهم شرحه  شرحه از فرا ق
تا   بگو یم   شرح    د رد   اشتیا ق
هر کسی کو دور ماند از اصل خویش
باز جوید  روز  گار  و صل  خویش
هر کسی از ظن  خود  شد  یار من
از  درون  من  نجست  اسرار  من
 
اتشست این با نگ  نای  و نیست  باد
هر که  ا ین  ا تش ند ارد  نیست  باد
 
اتش   عشقست    کا ند ر   نی    فتاد
جو شش عشقست   کاندر  می    فتاد
 
بند   بگسل   باش   ازاد   ای    پسر
چند   باشی   بند   سیم   و  بند   زر
مثنوی معنوی
Masnaoï Manaoï,
Œuvre du poète et philosophe
Djalal-Din Balkhi Roumi XIII e  siècle.
 
 
 
 
Préface
 
 
 
L’idée de ce témoignage m’a accompagné de longue date.
Nombreuses sont les publications aussi bien littéraires que politiques qui débattent sur le sort d’une nation déchirée par tant d’années de guerre. Tout a été dit ou presque sur l’Afghanistan ; sa composition ethnique, l’invasion soviétique puis la période talibane, l’intervention des États-Unis. Bref les « spécialistes » ne manquent pas.
Je voulais apporter un zoom sur l’Afghanistan à la lumière des événements régionaux et internationaux qui ont façonné la géopolitique du XX e  siècle. Plus qu’ailleurs, les tensions entre les deux blocs Est et Ouest ont marqué ce pays de façon durable. Bien que géographiquement isolé, apparemment loin des « intérêts vitaux » des grandes puissances, ce territoire a, tour à tour, subi des invasions helléniques, hans, arabes et mongoles au Moyen Âge. Plus tard, au XIX e  siècle le pays a joué un rôle tampon ( buffer state ) entre les deux Empires : russe au nord et britannique à l’est.
Tout au long du XX e  siècle, la chronologie afghane le démontre, l’Afghanistan a tracé des parallèles avec des séquences historiques :
- 1919 : année de l’indépendance du pays qui coïncide avec la fin de la Première Guerre mondiale, la révolution bolchevique, l’arrivée d’Ata Tûrk, l’arrivée de Reza Khan en Iran.
- 1945 : fin de la Seconde Guerre mondiale, l’indépendance de l’Inde, puis sa division en deux États : le Pakistan (État musulman) et l’Inde (ou Hindoustan, État hindou). Cette création a mis définitivement fin au rêve afghan, à savoir le rattachement à la mère patrie des territoires pachtoune et baloutche coupés par la ligne Durand .
- 1965-1979 : La guerre froide, les décennies rouges ou l’influence du bloc de l’Est se propageait à travers les cinq continents. Fin de la guerre au Viêt-Nam, fin de Cento , la progression des luttes indépendantes en Afrique et la révolution en Iran.
- 1979-1989 : La guerre froide qui se transforme en guerre « chaude » sur le sol afghan. La doctrine occidentale était simple : il fallait l’arrêter l’avancée des Soviétiques vers le golfe Persique et son or noir, le pétrole. Le point d’ancrage ne pouvait être que le Pakistan. Il fallait s’appuyer une dimension idéologique : ce fut la religion.
- 1980-2000 : le retrait des Soviétiques, la chute du mur de Berlin, la fin de l’URSS. L’Afghanistan est oublié par les stratèges américains ; le dossier devient plus local. Le pays devient un enjeu régional entre le Pakistan, l’Iran et l’Arabie saoudite avec le prolongement de la guerre qualifiée de « civile », suivie de la période talibane.
- 2000 à nos jours : l’intervention américaine en Afghanistan, la chute des Talibans. Les Américains font d’une pierre deux coups. En intervenant par le Nord, le vide postsoviétique en Asie centrale sera comblé. L’Afghanistan redevient le centre d’un enjeu énergétique. Une nouvelle partie de poker qui se joue à trois entre la Russie, la Chine et les États-Unis d’Amérique.
 
Quant à l’opinion française, elle reste partagée selon les différents scénarii :
- une certaine sympathie à l’égard des guérillas qui combattaient le « communisme » en Afghanistan. À ce stade, chaque personne jugeait la situation en fonction de sa sensibilité politique ;
- une certaine incompréhension à l’égard de la guerre civile pendant laquelle les factions islamistes se battaient. Il faut dire que les subtilités de la guerre échappaient aux observateurs non avisés ;
- une condamnation à l’égard des « étudiants en religion ». La condition féminine, la terreur, les exécutions sauvages, la destruction des bouddhas rendent la condamnation unanime ;
- et enfin une approbation mitigée de la présence militaire de la France aux côtés des Américains qui au début avait une « légitimité », à savoir le renversement du régime taliban. Inévitablement, la guerre a provoqué des victimes, des Afghans d’un côté, des militaires du côté de la coalition. L’opinion publique française s’interroge sur cet engagement. La « légitimité » de cette intervention est centrée sur la défense de nos démocraties par nos responsables politiques.
 
Le pyromane devient pompier.
 
En revanche, le politique n’apporte pas d’autres « explications géopolitiques » à cette intervention : les enjeux du golfe Persique, l’Iran, l’Asie centrale et ses richesses naturelles. Quelle est la stratégie de l’OTAN ? Que faire avec l’ami pakistanais, peuplé d’environ 200 millions habitants, puissance nucléaire, premier client de notre industrie militaire ?
 
Je voudrais que le lecteur puisse être éclairé par une chronologie qui mette en lumière les mécanismes et les interactions des événements. Pris de manière isolée, ces événements paraissaient sans conséquence mais, analysés dans un contexte global, ils prennent un tout autre sens.
 
Je l’invite donc à découvrir ce livre avec en décor l’Asie centrale au travers une chronologie, laquelle permet de comprendre comment l’Afghanistan est entré dans le XXI e  siècle.
 
 
 
Le décor. L’Afghanistan et Asie centrale
 
 
 

L’Asie centrale est un territoire situé au cœur du continent Eurasien. Elle est composée de 6 États qui sont d’une part l’Afghanistan (1) et de l’autre les cinq républiques postsovétiques, désormais indépendantes, le Turkménistan (2), l’Ouzbékistan (3), le Kazakhstan (4), le Kirghizistan (5) et le Tadjikistan (6). On pourra traduire le suffixe « -stan » comme « pays de ». Ainsi l’Ouzbékistan est le pays des Ouzbeks, le Turkménistan est le pays des Turkmènes et l’Afghanistan celui des Afghans. Le lecteur trouve là une liaison d’identification qui relie à jamais les hommes et leur territoire.
L’Asie centrale est un territoire enclavé. Au nord le territoire est désertique et bordé par le plateau de la Sibérie ; à l’est, ce sont les montages de Tianshan qui séparent l’Asie centrale du désert de Takla makan en Chine. Au sud, ce sont les hauts plateaux de Pamir (+ de 7000 mètres) et l’Hindou Kouch qui forment la barrière « infranchissable » vers le sud. Côté nord-ouest, la mer Caspienne donne un peu de « couleur » à cette région hostile.
La position de l’Afghanistan au sud de ce territoire donne à ce pays une importance particulière.
Pour se frayer un chemin, l’envahisseur venant du nord doit franchir deux barrières naturelles qui sont le fleuve Amou Daria (Oxus) et la chaîne montagneuse Hindou-Kouch qui traverse le pays d’est en ouest. Ainsi, l’Afghanistan dans ses frontières historiques offrait l’accès à l’océan Indien à toute l’Asie centrale.
Quant à l’Afghanistan du XIX e  siècle, il se transforme en «  Peau de Chagrin  » par une découpe coloniale opérée par les Britanniques qui ampute le pays d’une partie de son territoire, Balouchistan au sud, Pachtounistan à l’est.
Le décor : L’Afghanistan du XX e  siècle, ses frontières diplomatiques, ses voisins

Le pays (1) devient à son tour un territoire enclavé avec pour voisins : l’Iran à l’ouest (2) ; au nord le pays est bordé par les républiques postsoviétiques : le Turkménistan (3), l’Ouzbékistan (4), le Tadjikistan (5). À l’est, 70 kilomètres avec la Chine (6) et à l’est et au sud-est avec la ligne Durand , avec le Pakistan (7).
Le décor : L’Afghanistan, ses fronti