Face à la persécution : 991 Juifs dans la guerre
205 pages
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Face à la persécution : 991 Juifs dans la guerre , livre ebook

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Description

L’histoire de la Shoah en France envisagée dans une nouvelle perspective. S’appuyant sur un formidable travail d’archives et décrivant l’éventail des parcours des victimes, entre la vie et la mort, voici l’histoire des 991 Juifs de Lens entre 1940 et 1945, au jour le jour, famille par famille. Chaque temps de la discrimination antisémite en France est scruté du côté des persécutés : l’identification, l’aryanisation, l’arrestation, la déportation. Au total, que fallait-il faire ? Se déclarer comme juif ou se taire ? Fuir ou se cacher ?Nicolas Mariot est chercheur au CNRS. Il a notamment publié Bains de foule. Les voyages présidentiels en province, 1888-2002 et, avec A. Loez, Obéir/désobéir. Les mutineries de 1917 en perspective. Claire Zalc est chercheuse au CNRS. Elle a codirigé 1931, les étrangers au temps de l’exposition coloniale (2008), le catalogue de l’exposition du même nom dont elle était commissaire et qui s’est tenue à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, et a publié Melting Shops. Une histoire des commerçants étrangers en France.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 septembre 2010
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738196187
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0950€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

En couverture : Adolphe et Sosche Salik (née Schor) dans le Pas-de-Calais, avant la guerre. Nés en Galicie en 1897 et 1903, mariés à Paris en 1934, ils ont fondé un commerce de tissus à Lens à la fin des années 1930. En mai 1940, ils prennent la route de l'exode qui les mène aux Sables-d'Olonne, à Paris, à Brive puis à Voiron. Le 21 avril 1944, Adolphe est assassiné par la Milice à Saint-Julien-du-Ratz, dans l'Isère. Sosche rentre à Lens après la guerre. Elle y décède en 2002.
© O DILE JACOB, SEPTEMBRE 2010 15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS Avec le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah
www.odilejacob.fr
9782738196187
Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, 2° et 3° a), d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Pour Pierre, Émile, Élie, Jules et Joseph.
À la mémoire d’Eugène.
Avant-propos

Ils étaient 991 en 1939 1 . 991 immigrants arrivés d’Europe orientale, nés en France ou venus d’ailleurs. 991 Français et étrangers. 991 hommes et femmes, grands-parents, parents, enfants, célibataires, voisins, amis ou simples connaissances, travailleurs indépendants, salariés ou sans profession. 991 Juifs, identifiés par l’administration ou venus d’eux-mêmes se déclarer aux autorités françaises à l’automne 1940. 991 habitants de Lens victimes des politiques antisémites menées par les Allemands et leurs appuis locaux. En 1945, seuls 528 d’entre eux sont encore en vie. 487 ont été arrêtés, 467 déportés parmi lesquels 18 seulement ont survécu. Ce livre se propose de raconter leurs parcours pendant ces cinq années.
Les faits sont aujourd’hui connus : être juif dans l’Europe nazie, c’est être identifié, poursuivi, stigmatisé, discriminé, persécuté, assassiné, anéanti. Une historiographie aussi solide qu’abondante décrit avec force et minutie les étapes, acteurs et moyens de la destruction des Juifs d’Europe 2 . Qu’apporte donc l’histoire des 991 ? Elle traite tout d’abord la question non du point de vue des bourreaux, qu’ils soient décideurs ou exécuteurs, mais du point de vue des victimes. Cette perspective n’est pas inédite. Dès le milieu des années 1970, un travail considérable a été mené pour compter les victimes de la Shoah 3 . Leurs témoignages, non entendus d’abord, sollicités dans un contexte judiciaire ensuite, collectés en nombre dans une perspective mémorielle enfin sont venus profondément renouveler les connaissances du fait génocidaire 4 . Mais que dire de ceux qui se sont tus ? Que dire de ceux qui ne sont plus ? Les morts ont pourtant laissé des traces.
Récemment, certains sont partis à la recherche des « disparus », à l’instar de Daniel Mendelsohn qui relate dans le roman éponyme la quête minutieuse des siens tués par les nazis. La démarche intime, singulière et littéraire n’est pas isolée. D’autres essais se sont employés à recueillir les documents d’archives portant sur les victimes. L’historien allemand Götz Aly, dans Into the Tunnel , rassemble, à la manière du Pinagot d’Alain Corbin, toutes les sources disponibles pour raconter la vie d’une petite fille, née le 27 juillet 1931 en Allemagne, tuée à Auschwitz le 3 mars 1943 alors qu’elle n’a pas 12 ans, victime anonyme parmi tant d’autres de la Shoah 5 .
Si notre livre prétend renverser la perspective, ce n’est donc pas seulement parce que les 991 sont des victimes, mais parce qu’ils sont 991 – et pas une famille ou une personne – et parce qu’ils sont voisins, parents, amis et connaissances. Autrement dit parce qu’ils forment un groupe social dans lequel leurs destins se croisent et se répondent, avant, pendant et après le génocide. Écrire l’histoire de ce groupe est notre ambition. L’écrire au ras du sol est notre choix. Reconstituer les réseaux d’interconnaissance, décrire les trajectoires au sein des familles, observer les itinéraires au jour le jour permet d’interroger les choix auxquels les 991 ont été confrontés. Faut-il se déclarer ? Quand ? Poursuivre ses activités ? Fuir ? Comment ? Doit-on rester ensemble ? Se séparer ? Que faire de ses biens ? À qui faire confiance ?
Parce que ces interrogations relèveraient de l’intimité des théâtres intérieurs, on estime généralement qu’elles ne peuvent faire l’objet d’une investigation historique. On en cherche les réponses dans les consciences individuelles. Se décline, dès lors, le registre du choix voire du jugement moral qui oppose la « naïveté » des uns à la « lucidité » des autres : les décisions ont-elles été judicieuses, pesées et opportunes ? Notre démarche propose une autre approche : il ne s’agit pas d’apprécier si les choix ont été bons ou mauvais, mais d’analyser le plus finement possible les conditions dans lesquelles les arbitrages ont été pris. Suivre une cohorte d’individus tout au long de la guerre amène à rendre compte de la variété des parcours. Ceci permet également de proposer des explications. Les décisions familiales, volontaires ou imposées, ont toujours une épaisseur sociale : elles n’ont de sens que dans les limites circonscrites d’un milieu de vie où sont repérées et analysées les relations entre les gens et les ressources dont ils disposent.
Ni l’un ni l’autre ne connaissions Lens et le bassin minier avant d’avoir commencé ce travail. Ou par quelques images, partagées par tous : son équipe de football, ses mines aujourd’hui fermées. Mais Lens n’était pas le propos. Ce livre est né de la rencontre entre une interrogation épistémologique et un formidable corpus de sources. Les archives sont aujourd’hui ouvertes sans restriction aux chercheurs. Des archives du Pas-de-Calais à celles de l’United States Holocaust Memorial Museum de Washington (USHMM), partout nous avons cherché la trace des 991. Jusqu’à ressentir de l’attachement, presque une familiarité avec eux. Cette recherche mobilise une considérable masse documentaire : dossiers et lettres de déclaration, fichiers de recensement, comptes rendus de surveillance, courriers adressés aux administrations, dossiers d’aryanisation, listes de convois, dossiers de naturalisation mais également les archives suisses relatives aux réfugiés et celles des camps d’extermination. Au sein de cet ensemble, les témoignages sont extrêmement rares. C’est que les survivants sont très peu nombreux. Sans témoignage, cette histoire n’est pourtant pas sans parole. S’atteler à suivre les parcours des uns et des autres en se plongeant dans les dossiers administratifs nous a conduits à dénicher des récits extraordinaires cachés dans un formulaire de naturalisation ou un procès-verbal d’arrestation.
Cette histoire part de Lens, dans le Pas-de-Calais, zone dite « interdite » à partir de mai 1940, située entre trois pays de référence : l’Allemagne, pays occupant, la France puisque l’ensemble des agents de l’État dépendent d’autorités centrales à Paris et à Vichy, la Belgique enfin à laquelle la zone interdite est rattachée. L’ensemble des acteurs de la discrimination y jouent un rôle : autorités allemandes, police et fonctionnaires français. La violence qui s’y déroule est particulièrement marquée : la moitié des Juifs lensois sont déportés (contre environ 25 % pour la France). Mais l’histoire sort bien vite du bassin minier pour suivre les trajets de ceux qui partent, en zone occupée, en zone libre, en Suisse. Elle passe par Malines, le camp d’internement belge. Elle finit dans les camps de la mort.
L’acharnement mis à traquer les Juifs est remarquable. Mettre au jour les traces matérielles de l’histoire de l’extermination, c’est toucher du doigt les preuves matérielles de la déshumanisation : les registres austères des camps nazis ne contiennent plus de noms, seulement des numéros. « Unir l’étude des morts au temps des vivants », disait Marc Bloch. Fouiller, dépouiller les fonds d’archives pour avancer sur le chemin du savoir. Nourrir les récits de faits, traquer les traces, construire un sens. Notre histoire répond à une grande question par 991 histoires, des histoires d’hommes, de femmes, d’enfants qui disent bien mieux que des grands mots, la diversité des trajectoires face à la force des persécutions. Mais elles permettent surtout de comprendre ce que fut, dans un lieu et un temps donnés, être juif.

Notes
1 . Sur l’établissement de ce nombre, voir « Retour sur enquête », p. 241.
2 . Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d’Europe , Paris, Fayard, 1988 [1961] ; Florent Brayard, La « Solution finale de la question juive ». La technique, le temps et les catégories de la décision , Paris, Fayard, 2004 ; Saul Friedländer, Les Années d’extermination. L’Allemagne nazie et les Juifs, 1939-1945 , Paris, Seuil, 2008. Pour la France, Renée Poznanski, Être juif en France pendant la Seconde Guerre mondiale , Paris, Hachette, 1994. Pour la Belgique, Maxime Steinberg, L’Étoile et le fusil , Bruxelles, Éditions Vie ouvrière, 2 volumes, 1984, et La Persécution des Juifs en Belgique (1940-1945) , Bruxelles, Éditions Complexe, 2004.
3 . Serge Klarsfeld, Le Mémorial de la déportation des Juifs de France , Paris, Beate et Serge Klarsfeld, 1978 et Vichy-Auschwitz. Le rôle de Vichy dans la question juive en France , Paris, Fayard, 1983-1985 ; Serge Klarsfeld et Maxime Steinberg, Le Mémorial de la déportation des Juifs de Belgique , Bruxelles, Union des déportés juifs de Belgique et Klarsfeld, 1982. Enfin et surtout voir l’édition récente des 4 volumes du nouveau mémorial des Juifs de Belgique, Mecheln-Auschwitz. 1942-1944. La destruction des Jui

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