Histoire de Genève. T1

Mathieu Caesar

Description

Dans le célèbre Liber chronicarum, œuvre de l'humaniste allemand Hartmann Schedel, Genève est présentée comme une ville compacte et retranchée derrière ses fortifications. Une de ses portes est surmontée d'un écusson avec un aigle bicéphale, signe de l'appartenance de Genève à l'Empire. L'image nous rappelle que l'histoire de la cité épiscopale a été largement déterminée par les puissances qui l'ont entourée au fil des siècles.

Sa position au cœur de l'Europe et le développement de routes empruntant les cols des Alpes occidentales ont contribué à faire de la ville du bout du lac une capitale régionale et un pôle économique important dès le Moyen Âge. Au début du XVe siècle, Genève est en pleine croissance et ses foires attirent des marchands et des banquiers de toute l'Europe. Sa prospérité et son rôle politique ont ainsi suscité la convoitise des puissants, faisant de Genève une cité constamment disputée. Alternant récit événementiel et approfondissements thématiques, ce premier volume retrace l'histoire d'un long Moyen Âge genevois, brossant "l'état d'âme" de la ville, la manière d'y vivre et les modalités d'appropriation de l'espace urbain.

Sujets

• Histoire
• History
• Genève
• Suisse
• Europe
• Capitale

Informations

• Publié par: alphil-presses-universitaires-suisses
• Nombre de lectures: 1
• EAN13: 9782889300754
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 6 Mo

Extrait

Couverture
4e de couverture
C OLLECTION F OCUS
Focus est une collection qui présente des synthèses sur des thématiques de sciences humaines et sociales, ainsi que sur des sujets d’actualité. Elle vise un large public et s’adresse en premier lieu à des personnes qui souhaitent découvrir un domaine et en comprendre les principaux enjeux. Elle permet de s’informer de l’état d’une question et de saisir les différentes approches ou les différents points de vue exprimés sur un sujet particulier.
Des extraits de documents, des chronologies et des cartes complètent le texte. Une bibliographie sélective permet d’orienter le lecteur qui souhaite approfondir un thème.
La collection Focus est dirigée par Alain Cortat.

D ANS LA MÊME COLLECTION
Histoire du canton de Neuchâtel :
1. B UJARD Jacques, M OREROD Jean-Daniel, O GUEY Grégoire, de R EYNIER Christian, Le comté de Neuchâtel à l’époque médiévale .
2. H ENRY Philippe, De la Réforme à la révolution radicale de 1848.
3. B ARRELET Jean-Marc, La création d’une république. De la révolution de 1848 à nos jours.

Histoire de Genève :
1. C AESAR Mathieu, La cité des évêques ( IV e - XVI e siècle).
2. W ALKER Corinne, De la cité de Calvin à la ville française (1530-1813).
3. P ERROUX Olivier, De la création du canton en 1814 à nos jours.
Titre

M ATHIEU C AESAR




H ISTOIRE DE G ENÈVE
L A CITÉ DES ÉVÊQUES ( IV e - XVI e SIÈCLE)
T OME 1










É DITIONS A LPHIL -P RESSES UNIVERSITAIRES SUISSES
Copyright


© Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2 e édition, 2014 (1 re édition, mars 2014)
Case postale 5
2002 Neuchâtel 2
Suisse

www.alphil.ch

Alphil Distribution
[e-mail]






ISBN 978-2-88930-075-4









Illustration de couverture : Hartmann S CHEDEL , Liber ­chronicarum , Nürnberg, Anton Koberger für Sebald Schreyer und Sebastian Kammermeister,1493.07.12.
Münich, Bayerischen Staatsbibliothek, Rar 287, fol. 122r.





Responsables d’édition : Alain Cortat, Sandra Lena
A VANT-PROPOS
Une ville retranchée derrière ses fortifications, un habitat tassé au sein duquel émergent les clochers de deux églises et, sur le flanc d’une colline rocheuse, un château (cf. image 1). Tel est le portrait de Genève dans le célèbre Liber ­chronicarum , œuvre de l’humaniste allemand Hartmann Schedel (1440-1514), imprimé à Nuremberg dans sa version latine en 1493. L’image n’est pourtant pas une représentation réaliste de Genève à la fin du Moyen Âge. Elle n’a d’ailleurs pas la prétention de l’être et la planche ayant servi à graver l’image de la ville du bout du Léman a aussi été utilisée pour ­représenter Sparte, Tibériade, Damiette et Milan. Tout n’est cependant pas imaginaire dans la gravure du Liber ­chronicarum . Sur une des portes de la ville est clairement visible un écusson avec un aigle bicéphale, signe de l’appartenance (dès 1032) de Genève à l’Empire 1 . L’image nous rappelle que l’histoire de la cité médiévale ne se comprend pas en dehors de son insertion dans des entités territoriales et politiques plus vastes, insertion qui constitue un des fils rouges de cet ouvrage.
Un livre qui se veut aussi fidèle à l’esprit qui a animé les premiers volumes de cette collection. Les cinq tomes de ­l’ Histoire de la Suisse – rédigés par François Walter – souhaitaient, entre autres, « éviter la complaisance qui consisterait à redire au lecteur ce qu’il croit savoir » et « déranger les certitudes » 2 . Souvent celles-ci consistent à voir dans le bas Moyen Âge genevois une lente marche vers l’indépendance de l’époque moderne, vers la citadelle de la Réforme. En effet, cette période a souvent été lue comme une longue lutte des bourgeois de la ville pour s’affranchir de la tutelle de l’évêque et des princes savoyards. Dans cette optique, le passage à la foi réformée serait le pendant religieux, et presque naturel, de l’indé­pendance politique et du rapprochement avec les villes de l’ancienne Confédération suisse. L’histoire est cependant plus complexe et les évolutions moins linéaires et inéluctables que le voudraient certains récits parfois un peu trop mythifiés. Il ne s’agit pourtant pas de rejeter complètement les écrits des nombreux historiens qui nous ont précédés ; ce livre ne ­pourrait pas exister sans leur apport. Mais l’histoire est réécriture constante : les nouvelles découvertes archéologiques, l’analyse des sources autrefois négligées ou inconnues ainsi que les avancées de l’historiographie modifient, ­enrichissent et, finalement, complexifient notre vision du passé.


Image 1 – Genève dans le Liber chronicarum de Hartmann Schedel, 1493.
À une époque où les rapports avec la France voisine suscitent de nombreux débats et où Genève s’apprête à fêter le bicentenaire de son adhésion à la Confédération suisse, force est de constater que l’histoire nourrit de manière non négligeable les opinions et contribue à la construction ­identitaire. Il revient donc à l’historien de scruter le passé et de proposer une lecture des faits moins encombrée par le finalisme et les interprétations téléologiques. Ainsi, la Genève des XIII e - XV e siècles est quelque part une ville savoyarde et de nombreuses familles de l’élite genevoise sont des « étrangers » établis en ville depuis une ou deux générations. Si le pouvoir et la richesse de la ville sont certes le fruit de l’ingéniosité de ses habitants et de leurs activités, ils ont souvent été aussi le produit de circonstances politiques favorables, voire des malheurs de ses voisins. Sa position au cœur de l’Europe et le développement depuis l’Antiquité des routes empruntant les cols des Alpes occidentales ont largement contribué à ­attirer sur Genève les convoitises des puissants qui ont vu dans la maîtrise de la ville et de ses campagnes une des clés pour le contrôle des axes reliant le nord de l’Europe à l’Italie et à la Méditerranée.
Mais que signifie aujourd’hui écrire l’histoire d’une Genève devenue à travers les siècles ville et canton ? Depuis la fin de l’Antiquité, Genève est avant tout une cité épiscopale. C’est donc l’histoire de cette ville qui a été retenue et qui détermine la périodisation de ce premier tome : depuis l’établissement du pouvoir épiscopal (vers le milieu du IV e siècle) jusqu’au départ définitif de l’évêque en 1533, à la veille de la Réforme. Une histoire qui suit pourtant un rythme variable. Après avoir traversé à grands pas le millénaire qui s’étend du passage de César à Genève jusqu’au XI e siècle – au cours des trois premiers chapitres –, le lecteur est amené à ralentir sa marche. Les chapitres quatre à treize insistent sur la période du bas Moyen Âge, les XIV e et XV e siècles en particulier. Ce rythme est dicté par la disponibilité des sources, plus abondantes pour la fin de l’époque médiévale, permettant à l’historien une analyse plus fine et détaillée.
Cependant, l’histoire que nous proposons n’est pas un simple récit chronologique des faits les plus marquants, et certains lecteurs regretteront peut-être de ne pas trouver de références à tel événement ou à tel personnage célèbre. Mais une ville n’est pas un conteneur vide dans lequel se déroulent des événements, elle est avant tout une « multitude d’hommes réunis par un lien de société » comme l’affirme saint Augustin dans la Cité de Dieu ( XV , 8). Nous avons par conséquent opté pour une histoire de Genève en treize tableaux qui essaient de décrire ce lien, cette société urbaine. Pour cela, nous avons parfois sacrifié la trame événementielle en faveur de passages et de chapitres plus analytiques, faisant revivre des acteurs de la société urbaine peu connus ou racontant des faits à l’apparence secondaire. Ce choix n’a pas été dicté par un goût du pittoresque ou du fait divers, mais par une volonté de raconter « l’état d’âme » de la ville 3 , la manière d’y vivre et de s’approprier l’espace urbain.
Conformément à l’orientation de la collection Focus , nous indiquons à la fin de chaque chapitre un choix sélectif ­d’ouvrages et d’articles. Ils ne constituent pas des biblio­graphies exhaustives, mais plutôt des suggestions permettant d’approfondir certains sujets. Le lecteur désirant aller plus loin pourra également s’appuyer sur les bibliographies des ouvrages généraux cités à la suite de cet avant-propos ainsi que sur les nombreuses notices du Dictionnaire historique de la Suisse (Hauterive : G. Attinger, 12 vol., 2002-2013 ; le treizième et dernier volume paraîtra à l’automne 2014), dont la version électronique est librement accessible à l’adresse http://www.hls-dhs-dss.ch.
En terminant la rédaction de cet ouvrage, nous souhaitons exprimer notre gratitude à tous les amis et les collègues qui nous ont accompagné dans ce travail et qui, par leurs encouragements, relectures et suggestions, ont contribué à l’améliorer : Alain Cortat et Sandra Lena aux Éditions Alphil, Frédéric Elsig, Franco Morenzoni, Eva Pibiri, Martin Roch, Christophe Schmidt, Marco Schnyder, Jean Terrier, Corinne Walker et François Walter. Un remerciement particulier enfin à Alix Heiniger qui a bien voulu relire et corriger l’ensemble du manuscrit.
O RIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
D UFOUR Alfred, Histoire de Genève , Paris : PUF ( Que sais-je ? , n o 3210), 2011 (4 e éd.).
G UICHONNET Paul (dir.), Histoire de Genève , Toulouse & Lausanne : Privat & Payot, 1986 (3 e éd. mise à jour).
G UICHONNET Paul (dir.), Nouvelle histoire de la Savoie , Toulouse : Privat, 1996.
P ARAVICINI B AGLIANI Agostino et al . (dir.), Les pays romands au Moyen Âge , Lausanne : Payot, 1997.


1 À ce propos, voir les chapitres 3 et 4.

2 W ALTER François, Histoire de la Suisse , t. 1 : L’invention d’une confédération ( XV e - XVI e siècles) , Neuchâtel : Alphil, 2009, p. 8-9.

3 Nous reprenons ici l’expression de l’historien italo-américain Roberto S. Lopez. Voir en particulier son Intervista sulla città medievale , a cura di Marino Berengo , Roma & Bari : Laterza, 1984.
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L A NAISSANCE D’UNE CITÉ
Au début de sa guerre d