Légalité et légitimité : Présentation et notes par Augustin Simard
107 pages
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Description

Rédigé dans l’urgence à l’été de 1932, ce petit traité accompagne l’échec de la première expérience démocratique allemande. Il jette un regard incisif sur la crise qui emporte la République de Weimar et évalue les chances de sauver le régime face aux extrémistes de droite et de gauche. Philosophie politique, commentaire juridique et raison d’État se conjuguent ici sous l’effet d’une rhétorique vigoureuse et rusée, digne des plus grands publicistes.
Écrit dans un contexte tragique et marqué par la carrière sulfureuse de son auteur, l’ouvrage a connu des échos aussi multiples qu’inattendus dans les démocraties d’après-guerre. La démocratie est-elle foncièrement un régime sans défense ? Doit-elle accepter l’existence de partis politiques attachés à la renverser ? Les mesures d’exception et de sécurité sont-elles justifiables au nom du salut public ? Peut-on préserver l’esprit d’une constitution et en nier la lettre ? Les questions que pose cet ouvrage résonnent encore dans d’innombrables conflits politiques.
Catholique et conservateur, Carl Schmitt (1888-1985) fut un analyste perspicace de la crise des démocraties d’entre-deux-guerres, avant d’adhérer au nazisme en 1933. Arrêté par les Alliés en 1945, il est libéré deux ans plus tard. Il est l’auteur d’une oeuvre imposante et controversée, croisant le droit, la pensée politique, la théologie et la critique culturelle.
Première traduction française complète

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 avril 2015
Nombre de lectures 37
EAN13 9782760634725
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Pensée allemande et européenne
collection fondée par Guy Rocher
dirigée par Philippe Despoix et Augustin Simard

Universels quant à leurs préoccupations critiques, les ouvrages publiés dans cette collection pluridisciplinaire sont indissociables de l’univers intellectuel germanique et centre-européen, soit parce qu’ils proviennent de traditions de pensée qui y sont spécifiques, soit parce qu’ils y ont connu une postérité importante. En plus des traductions d’auteurs aujourd’hui classiques (tels Simmel, Weber ou Kracauer), la collection accueille des monographies ou des ouvrages collectifs qui éclairent sous un angle novateur des thèmes propres à cette constellation intellectuelle.

La collection Pensée allemande et européenne est parrainée par le Centre canadien d’études allemandes et européennes (CCEAE, Université de Montréal), publie des ouvrages évalués par les pairs et reçoit l’appui du Deutscher Akademischer Austausch Dienst (DAAD).

www.cceae.umontreal.ca/La-collection-du-CCEAE www.cceae.umontreal.ca/La-collection-du-CCEAE
Mise en pages: Yolande Martel Epub: Folio infographie Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Schmitt, Carl, 1888-1985 [Legalität und Legitimität. Français] Légalité et légitimité (Pensée allemande et européenne) Traduction de: Legalität und Legitimität. ISBN 978-2-7606-3470-1 1. Légitimité de gouvernements – Allemagne. 2. Pouvoir législatif – Allemagne. 3. Règle de droit – Allemagne. I. Simard, Augustin, 1976- . II. Titre. III. Titre: Legalität und Legitimität. Français IV. Collection: Pensée allemande et européenne. KK4713.S3514 2015 342.4302’9 C2015-940087-2 Traduction de Legalität und Legitimität © 8 th , revised edition 2012, Duncker & Humblot GmbH, Berlin Dépôt légal: 1 >er trimestre 2015 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2015 www.pum.umontreal.ca ISBN (papier) 978-2-7606-3470-1 ISBN (ePub) 978-2-7606-3472-5 ISBN (PDF) 978-2-7606-3471-8 Les Presses de l’Université de Montréal reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour leurs activités d’édition et remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).
PRÉSENTATION
«Cette étude a été terminée le 10 juillet 1932.» C’est par cette petite note que Carl Schmitt commence son ouvrage Légalité et légitimité . Le choix est révélateur: plutôt que d’inscrire en exergue quelque sentence classique, ou une dédicace à la mémoire d’un ami disparu, Schmitt rappelle à son lecteur le contexte dramatique, inquiétant, qui préside à leur rencontre 1 . Ou, plus exactement, le lecteur est invité à ne pas détourner son regard de l’actualité la plus préoccupante – celle d’une république aux abois, au bord de la guerre civile, frappée par les violences des ligues paramilitaires (SA, Stahlhelm, Rotfront et autres) et par la dislocation de la vie économique (le nombre de chômeurs atteint 6 millions, la production industrielle a chuté de 60% par rapport à son niveau de 1928). À ce lecteur désorienté et méfiant, qui accueille avec un sentiment confus la montée aux extrêmes, Schmitt promet une perspective neuve, clinique, dégagée des hégémonies partisanes, des lamentations et des prophéties. Laissons tomber les discours sur la «crise», annonce-t-il dès les premières lignes; restons-en plutôt aux diagnostics des «savants» et des «spécialistes», aux «concepts issus du droit public».
Le pari de Schmitt est de faire voir à son lecteur le caractère symptomatique de la crise de la République de Weimar. Par-delà les variantes locales, ce qui se produit à Berlin relève d’une transformation générale des formes de l’État, dont les effets vont se faire sentir partout sur le continent européen. Il s’agit de «l’effondrement de l’État législateur-parlementaire», une transformation de l’autorité publique et des techniques gouvernementales qui se prépare depuis une génération déjà et qui s’accuse au rythme des expériences de planification – celles de la Grande Guerre bien sûr, mais aussi celles des politiques sociales inspirées par le réformisme d’avant-guerre. Dès lors, en rappelant l’urgence du contexte, Schmitt ne veut pas simplement limiter la validité de son propos, voire se dédouaner aux yeux de la postérité en assumant une coordonnée temporelle précise. C’est surtout une façon d’asseoir l’autorité de «l’expert» constitutionnaliste, dont le regard incisif et le vocabulaire technique devraient combattre l’ivresse de la chute. Car, comme le rappelle Schmitt, la question vraiment décisive, «c’est de savoir qui au bout du compte aura en main la puissance légale et constituera son pouvoir sur un fondement nouveau, au moment où l’ensemble du système légal sera jeté de côté» ( infra , p. 74).
Il y aurait beaucoup à dire sur la manière dont Schmitt use de ses talents d’écrivain pour frapper l’esprit de son lecteur et le conduire là où il ne souhaiterait pas se rendre. Sa rhétorique maîtrisée dans tous ses effets le distingue de ses collègues juristes, et le rapproche plutôt d’un Montesquieu ou d’un Marx. Comme la Théologie politique et la Notion de politique , l’ouvrage qu’on présente aujourd’hui au public francophone constitue une belle illustration de ce style très particulier. Si l’exposé est moins spéculatif que la Notion , et moins aphoristique que la Théologie , on y retrouve bien cette combinaison de conceptualisme et de réalisme, d’érudition philosophique et de commentaire juridique, qui caractérise tous ses ouvrages de la période weimarienne. Proposant dès les premières pages une nouvelle typologie des formes d’État ( infra , p. 39), Schmitt montre comment chacune d’elles repose sur une logique propre, un système cohérent de notions, de postulats et de «fictions» qui en assurent la vitalité. C’est ce postulat de cohérence qui lui permet ensuite d’opposer de manière si efficace le système de légalité de l’État législatif (weimarien) «fermé sur lui-même» ( infra , p. 38) et les autres systèmes reposant sur une légitimité extra-légale, et de faire fonctionner cette opposition dialectique tout au long de son essai. Pour autant, alors même qu’elle semble pécher par conceptualisme 2 , cette approche ne s’éloigne jamais des préceptes dégrisés de la raison d’État. Schmitt sait très bien que la décision de facto précède les principes, et que la théorie la plus sophistiquée accuse un retard par rapport à la pratique du pouvoir. Si c’est à l’enseigne de ce réalisme qu’il faut ranger la conception décisionniste de la souveraineté 3 , la valorisation heuristique de l’état d’exception 4 et la caractérisation du politique comme discrimination ami/ennemi 5 , nul doute qu’il connaît de remarquables prolongements dans Légalité et légitimité .
Même s’il porte la marque d’une conjecture très précise, l’ouvrage qu’on s’apprête à lire n’est donc pas un écrit de circonstance. Il développe et synthétise l’œuvre weimarienne de Schmitt. À maints égards, on peut même affirmer qu’il constitue le point d’orgue de la méthode décisionniste exposée dans la Théologie politique de 1922. On le sait, Schmitt dira ensuite s’être détourné, au milieu des années 1930, de cette méthode jugée trop formaliste et trop solidaire du positivisme juridique. Même s’il est difficile de voir clair dans les propos de Schmitt après 1933, notamment en raison de sa tendance à l’auto-interprétation et de son désir de plaire aux nouveaux maîtres nazis 6 , il est évident que sa pensée a subi une inflexion et que la thématique de la décision disparaît au profit d’un nouveau vocabulaire où abondent les métaphores telluriques et spatiales. Légitimité et légalité illustre donc la dernière manifestation, et peut-être la plus éclatante, du décisionnisme schmittien, appliqué cette fois à la survie de la démocratie constitutionnelle: «il s’agissait de préserver les dernières chances de la Constitution de Weimar face à une doctrine juridique qui refusait de poser la question de l’ami et de l’ennemi de la constitution 7 ».
Les questions soulevées par le texte de Schmitt ont interpellé de nombreux lecteurs depuis 1945. Comment défendre un régime démocratique en tenant compte des exigences et des difficultés révélées par le décisionnisme? Comment extirper la démocratie libérale des décombres de l’État législatif-parlementaire? Comment préserver une constitution démocratique contre des groupes hostiles, exploitant les libertés qu’elle offre? Les politiques de «militance démocratique», les régimes d’interdiction de partis politiques, la recherche d’un pouvoir préservateur au-delà du jeu électoral, les mécanismes de prévention de l’extrémisme et les stratégies de «consolidation de la démocratie» sont tous issus de ce genre de réflexion. Comme le rappelle Jan-Werner Müller 8 , le décisionnisme schmittien est fait d’un alliage étrange entre un vocabulaire archaïsant et des préoccupations on ne peut plus contemporaines: alors que l’exigence d’actualité et d’opérationnalité sert à congédier la sagesse des classiques 9 , l’emploi des catégories anciennes, prémodernes, permet d’enfoncer un coin dans l’orthodoxie libérale et de faire pièce à l’irénisme des théories normatives en vogue (droit naturel, théorie de la justice, etc.).
L’année de tous les dangers: 1932
Dire d’un texte qu’il est inséparable de son contexte semble une banalité. Or, dans le cas du texte dont nous proposons ici la traduction, la question du contexte soulève plusieurs difficultés. D’abord, parce que, comme Pocock nous l’a rappelé 10 , un contexte n’est jamais monolithique. Toujours ambigu, il présente l’ensemble complexe et quasi infini des conditions langagières qui ont rendu un texte possible. En ce sens, on est poussé à le chercher autant dans l’œuvre antérieure de Schmitt (suivant le fil du décisionnisme que nous venons d’évoquer) que dans les débats qui animent la petite communa

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