La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie systémique rare, associant des anomalies microcirculatoires responsables de phénomènes de vasoconstriction et de remodelage, une accumulation de collagène aboutissant à une fibrose de divers organes (peau, poumon, tube digestif…) et une composante auto-immune avec l’identification d’auto-anticorps.La prévalence de la ScS varie de 3 à 24 cas pour 100 000 habitants avec des maxima observés aux États-Unis et en Australie. Son incidence est également variable, comprise entre 0,4 et 2 cas pour 100 000 habitants/an. La ScS touche 3 à 8 femmes pour un homme et débute rarement avant l’âge de 20 ans ; on observe un pic de fréquence entre 45 et 60 ans.Certains facteurs environnementaux et professionnels contribuent à augmenter le risque de développer une ScS. Parmi ces derniers, le rôle de la silice cristalline est communément admis, et la documentation d’une exposition à la silice autorise une reconnaissance de la ScS au titre de maladie professionnelle (Tableau 25 bis). Les études cas-témoins récentes sont en faveur de la responsabilité d’autres toxiques, en particulier les solvants organiques.
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Extrait
1
Médecine interne
Chapitre S03P01C05 Sclérodermie systémique
N B , P L L M OURIA ENMOSTEFA AUL EGENDRE ET UC OUTHON
5 C0 1 P0 3 0 S
05 C 01 P 03 S
La sclérodermie systémique (ScS) est une maladie systémique rare, associant des anomalies microcirculatoires responsables de phéno mènes de vasoconstriction et de remodelage, une accumulation de col lagène aboutissant à une fibrose de divers organes (peau, poumon, tube digestif) et une composante autoimmune avec lidentification dautoanticorps. La prévalence de la ScS varie de 3 à 24 cas pour 100 000 habitants avec des maxima observés aux ÉtatsUnis et en Australie [7]. Son incidence est également variable, comprise entre 0,4 et 2 cas pour 100 000 habitants/ an. La ScS touche 3 à 8 femmes pour un homme et débute rarement avant lâge de 20 ans ; on observe un pic de fréquence entre 45 et 60 ans. Certains facteurs environnementaux et professionnels contribuent à augmenter le risque de développer une ScS. Parmi ces derniers, le rôle de la silice cristalline est communément admis, et la documentation dune exposition à la silice autorise une reconnaissance de la ScS au titre de maladie professionnelle (Tableau 25 bis). Les études cas témoins récentes sont en faveur de la responsabilité dautres toxiques, en particulier les solvants organiques.
Physiopathologie
La physiopathologie de la ScS est caractérisée par une microangio pathie précoce et généralisée, une fibrose systémique, vasculaire et tis sulaire ainsi quune réponse immunitaire activée et dérégulée conduisant à des phénomènes dautoimmunité [3]. Latteinte microcirculatoire résulte dinteractions anormales entre différents acteurs : cellules endothéliales, fibroblastes et cellules immunitaires, en particulier cellules de limmunité adaptative (lym phocytes B et T) (Figure S03P01C051) [2]. Les cellules endothé liales des patients atteints de ScS, sous la pression de facteurs environnementaux, sécrètent de grandes quantités dendothéline 1 (ET1), puissant vasoconstricteur qui active les fibroblastes. Par ail leurs, fibroblastes et cellules endothéliales activées produisent des espèces réactives de loxygène qui accélèrent le remodelage vasculaire, conduisant à une oblitération des petits vaisseaux. Ces phénomènes sont en jeu au cours des atteintes circulatoires périphériques, mais également en cas dhypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Dautres médiateurs clefs semblent impliqués : le facteur dhypoxie (HIF pourhypoxia inducible factor) et la cytokine proangiogénique (VEGF pourvascular endothelial growth factor). Leur activation chro nique et dérégulée contribuerait à une angiogenèse inefficace et au développement de mégacapillaires détectés en capillaroscopie péri unguéale. Lactivation/agression endothéliale semble générer une inflammation locale en particulier au niveau des lésions dermiques. La fibrose est le trait spécifique de la ScS : les fibroblastes en sont les principaux effecteurs ; activés, ils ont une capacité accrue à se différen cier en myofibroblastes avec des capacités de synthèse de collagène encore augmentées. Certaines de ces anomalies peuvent être repro
S03P01C05
Silice... Environnement
PDGF TGFβ CTGF
ET1 Apoptose Cellules endothéliales
ROS
Fibroblastes Apoptose MEC
AECA
AAF IL4, IL6
IL6, BAFF
MCP1
IRF5, CMH... Génétique
CXCL4
Cellules immunitaires pDC, LB, T 2, H LT CD8+, LT CD4+ CD8+
Figure S03P01C051Schéma récapitulatif de la physiopathologie de la sclérodermie systémique. AAF : acétylaminofluorène ; AECA : anticorps anticellules endothéliales ; BAFF :Bcell activating factor; CD : cluster de dif férenciation ; CMH : complexe majeur d’histocompatibilité ; CTGF :connec tive tissue growth factor; CXCL facteur plaquettaire 4 : ET1 :4 ; endothéline 1 ; IL : interleukine ; IRF5 :interferonregulatory factor 5; LB : lymphocyte B ; LT : lymphocyte T ; MEC : matrice extracellulaire ; MCP1 ; monocyte chemoattractant protein 1; pDC : cellules dendritiques plasma cytoïdes ; PDGF :platelet derived growth factor; ROS :reactive oxygen spe cies(espèces réactives de l’oxygène) : TGFβ;transforming growth factorβ. (Modifié d’après Dumoitier N, Lofek S, Mouthon L. Pathophysiology of sys temic sclerosis : state of the art 2014. Presse Méd, 2014,43: e267e278.)
duites en stimulant des fibroblastes normaux par du TGFβ(transfor ming growth factorβ), cytokine clef de la fibrogenèse, produite par de nombreuses cellules : monocytes/macrophages, lymphocytes T et fibroblastes. La voie de signalisation la plus classique du TGFβest celle des protéines transductrices appeléessmad. Une dérégulation de lexpression des récepteurs du TGFβet/ou des protéines smad a été identifiée dans la ScS, en particulier un excès de smad 2 et smad 3, activatrices et une diminution de smad 7, inhibitrice. Linflammation et lautoimmunité pourraient avoir des cibles privi légiées, linflammation ayant par exemple un rôle physiopathologique important dans latteinte interstitielle pulmonaire. Les lymphocytes B sont peu nombreux dans le derme ; cependant, limmunité humorale joue un rôle important comme en atteste la présence dautoanticorps spécifiques tels les anticentromères, antitopoisomérase I, ARN polymérase III ou dirigés contre les fibroblastes et/ou les cellules endo théliales [3]. Enfin, les cellules dendritiques plasmacytoïdes ont été identifiées comme actrices dans le développement de la ScS, notam ment via la sécrétion de facteur plaquettaire 4 (CXCL4). En association aux facteurs environnementaux, certaines prédisposi tions génétiques semblent intervenir dans le déclenchement dune ScS. À partir de trois cohortes américaines, un risque pour les apparentés de premier degré proche a été identifié avec un taux de récurrence à 1,6 contre 0,026 % dans la population générale. Des études ont montré lassociation, à la ScS, de polymorphisme dIRF5 (interferonregulatory factor 5), un facteur transcriptionnel impliqué dans la signalisation des récepteurs Tolllike(TLR) et lactivation des gènes cibles de linterféronα.