Affronter le monde nouveau : Épître à Paul et à nos contemporains
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Affronter le monde nouveau : Épître à Paul et à nos contemporains , livre ebook

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Description

Migrations généralisées, effondrement des frontières, immédiateté et universalité des connexions, en un mot irruption brutale, à la fois physique et numérique, de l’autre et du différent. Voilà un fait unique dans l’histoire qui bouleverse nos façons de penser et de vivre. Un monde nouveau surgit, inconnu, alors que l’ancien craque de toutes parts avec fracas. La Terre elle-même s’est mise à geindre. Nous oscillons entre la terreur de la fin et l’enfantement d’un commencement qui tarde à voir le jour. Nous vivons un moment messianique. Devrons-nous renoncer à l’idée d’humanité et espérer sauver notre peau tout seul ? Devrons-nous renoncer aux nations et aux peuples parce qu’ils seraient les témoins abolis d’un passé bientôt englouti ? Devrons-nous également renoncer à la certitude que nous partageons un destin commun ? Ou, sinon, comment le construire et le trouver ? Comment écrire cette nouvelle page ? Voilà le monde nouveau que chacun de nous se doit d’affronter. Il se trouve qu’un homme a été confronté aux mêmes défis, a connu les mêmes angoisses, a été envahi par la même terreur. C’est Paul, l’apôtre des chrétiens, le Shaoul des Juifs, le Paul des philosophes, surtout l’un des piliers de l’Occident, quoi que l’on croie. Il a vécu un autre de ces moments messianiques, comme la civilisation des hommes en a peu compté. Il a alors proposé à tous les citoyens de l’Empire romain de repenser Dieu pour comprendre ce qui pouvait les rassembler : une autre approche de la vie. Il nous faut prendre Paul à bras-le-corps pour nous aider à vaincre nos angoisses. Car notre salut, à nous, deux mille ans après, ne pourra être que de même nature, spirituelle, pour repenser la politique, l’éthique, la possibilité d’une humanité en paix. Pour repenser le commun. Pour s’engager enfin dans la fraternité. Jean-François Bensahel est normalien, ingénieur au corps des Mines, entrepreneur, président de la synagogue de la rue Copernic à Paris, et acteur engagé du dialogue interreligieux. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 02 octobre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782738149442
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , OCTOBRE  2019 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4944-2
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Philippe Haddad.
Désormais l’avenir nous terrifie. La route semble barrée, entravée, condamnée, et nous sommes encagés dans un présent sans lumière comme des souris de laboratoire.
Confrontés à des risques écologiques énormes dont nous savons que nous ne les surmonterons pas, et que la surface des eaux recouvrira toujours plus de terre, terrorisés face à des dangers migratoires angoissants, avec la perspective de voir la surface de nos territoires recouverte par des hommes et des femmes qui parfois ne veulent pas partager nos civilisations, et auxquels, tant nous sommes impécunieux et désœuvrés, nous ne savons plus offrir que du vide et du vague, tétanisés devant la révolution technologique de l’intelligence artificielle qui promet de rendre l’homme inutile et de changer radicalement l’exercice de la condition humaine, vulnérabilisés par des risques politiques de dissolution des États qui peinent à assurer la sécurité physique de leurs habitants et de leurs frontières, résignés devant notre incapacité à la transmission, car, tout confits dans nos nihilismes, nous ne voulons plus transmettre à la génération qui vient après nous ce que le passé nous a légué de grand, d’unique et de beau, et qui fait de chacun de nous des citoyens incomparables de nos pays. Désormais, nous avons peur.
Ce ciel morbide et noir compresse nos esprits, sécrète une folie religieuse extrême, apocalyptique, messianique, violente, dont l’islamisme est le marqueur, le drapeau noir, et travaille, sans heureusement la même violence meurtrière, toutes les religions tandis que le monde leur échappe.
Au bout de cette course folle à la désagrégation de toute société, c’est l’idée même d’humanité que nous sommes en train de perdre, ce que nous avions de commun, comme ce que nous pouvions espérer bâtir ensemble : un monde meilleur.
Que sommes-nous aujourd’hui ? Des modernes, certes, mais amers, pâles, usés, vieillis, désabusés, et qui n’ont plus comme perspective que l’arasement d’un destin planétaire partagé, la ruine de l’idée d’humanité, de la possibilité même d’un commun entre tous les hommes et toutes les femmes. Nous ne sommes plus, malgré ces réseaux connectants, qu’une humanité en régression et en miettes, en proie à toutes ces menaces existentielles, qui se nomment ghettos volontaires, communautarismes, tribus et tribalismes, qui, en France, menacent l’idée même de République. Une humanité en confettis où personne ne se comprend plus sur l’essentiel, alors que, tous, nous nous côtoyons comme jamais.
Nous voilà au bord du précipice. Préférerons-nous reculer, abandonner et acquiescer à l’implosion du monde, parce que nous ne sommes plus des Hercule tant la grandeur nous a désertés, défis trop lourds à relever ? Ou serons-nous capables de résister, de nous relever et d’inventer le monde qui vient, car ce sont les conceptions mêmes de l’État, de la politique, de la religion, qu’il va nous falloir repenser, en ce moment de l’histoire, précis, unique, incomparable, où chacun rencontre tous et où tous rencontrent chacun, et c’est cela le grand bouleversement qui nous oblige à tout reprendre et à prendre à neuf le cours du monde. Avec des yeux nouveaux.
Une chose est sûre : le fondamentalisme de toute nature veut nous ôter nos libertés, précipiter encore davantage cette fin du temps, nous conduire à l’agonie en l’accélérant, nous faire vivre l’apocalypse pour nous convaincre que nous ne sommes pas seulement au bout de l’impasse, mais que nous avons déjà un pied dans la tombe. Il veut l’abdication et vaut disparition.
Mais il n’a pas encore gagné. La pulsion de vie n’est pas encore morte. La flamme vacille, craintive et haletante. Mais elle est là. Il faut qu’elle dure plus que quelques jours, ce sera l’œuvre d’inédits résistants, pour que s’enfante le monde nouveau. Dans ce petit laps de temps, il nous faut inventer l’avenir, en imaginer la tectonique, en tisser le nouveau discours.
Un homme a une partie de la solution. C’est Paul, un homme d’il y a deux mille ans.
Et qui que tu sois, lecteur, athée, agnostique, croyant, tu devras bien un jour revenir à Paul, si tu veux comprendre et conjurer la guerre qui vient.
Paul, le Juif Shaoul, le saint Paul des chrétiens, le Paul des philosophes, l’homme qui se dilate dans des lettres et épîtres, avait aussi l’angoisse de la désagrégation du monde. Il voulait buriner son temps en vue de ce qu’il appelait le Jour du Jugement, celui où son Messie, le Christ, allait venir juger tous les hommes. L’Événement. Il était habité par l’idée que seuls ceux qui auraient la foi nouvelle et un comportement pur seraient sauvés.
Son urgence existentielle, intensément, colériquement, mystiquement, tragiquement, c’était de convaincre les hommes de son temps de l’Événement. Il devait donc affronter la diversité des individus, de leurs cultures, de leurs idoles, et les adjurer de se tourner vers ce Dieu, vers ce Dieu unique qui s’était révélé en premier à Israël, parce que, même s’ils l’ignoraient, ils étaient en fait tous glués dans une même histoire qui se donnait à découvrir dans les Écritures d’Israël, et qui avait nom histoire du salut, et du salut un jour possible ou, pour le dire avec des mots modernes, une histoire dont le terminal était la fin de la violence, le bonheur et la paix futurs mais pour tous. Non, la vie n’était pas que matérielle, elle était nouée, fondue, travaillée, dans la trame d’un destin commun, dont il appartenait à chacun, démocratiquement, de tisser les fils.
Voilà son défi immense et terrifiant : comment leur faire sentir du doigt, à ces ignorants, qu’ils étaient engagés dans une même aventure, dans une même idée d’humanité, leur dire qu’ils étaient frères, qu’ils pouvaient se réconcilier, qu’ils devaient se réconcilier avec eux-mêmes et avec autrui, sinon le Ciel les jugerait avec fracas ?
Paul, bien plus qu’Alexandre le Grand, fut l’acteur de la plus grande des inventions politiques possibles. Il pensait une politique aux dimensions de l’univers, puisqu’il voulait faire vivre ensemble ces hommes et ces femmes, rencontrés et admonestés sur les routes de l’Empire romain, et les convaincre qu’ils étaient liés, ensemble qu’ils étaient pris dans le même faisceau des vivants, qu’ils devaient abandonner leurs petites idoles pour faire monde. Qu’ils devaient partager une spiritualité commune, qui seule leur permettrait de surmonter leurs différences, sans les nier, sans les craindre, mais en les rendant congruentes, compossibles, projectivement orientées vers un même but, et  qu’ils devaient se mettre au diapason de la paix qui viendrait. Qu’ils devaient comprendre et accepter qu’ils avaient un même Père qui est au Ciel. Qu’ils pouvaient donc partager et vivre en frères. Voilà ce qu’il pensait, et qu’il voulait réaliser.
Il savait que, sans spiritualité et, dans le même mouvement, comme l’enseigne la Bible des Hébreux, sans possibilité d’une histoire mondiale commune, possibilité qui se dérobe aux myopes sans mémoire, invisible comme toutes les fondations, à laquelle on n’accède qu’en sondant la nappe sous les remugles des temps ordinaires pour en prendre la vraie mesure, donc sans cette possibilité à méditer et à ruminer, sans cette quête spirituelle, individuelle mais aussi collective et planétaire, il savait que nous n’aurions pas la paix, que nous n’aurions pas collectivement le bonheur, que la fraternité nous échapperait, que toute espérance s’évanouirait.
Sans aucun doute a-t-il échoué. Mais n’avons-nous pas, nous, modernes, tué toute espérance, échoué à notre tour, et plus dramatiquement encore ?
Oubliant sa leçon, nous avons cru que nous ne pouvions vivre que de pain et de ponts. Faute tragique. Car nous sommes confrontés au retour de la guerre et de la violence. Faillite spirituelle, mais aussi faillite effective de nos religions qui n’ont certes pas le monopole de la spiritualité, mais dont la fonction demeure de nous situer dans ce temps collectif du salut et de la béatitude, de faire de leurs fidèles des sujets responsables et agissants de cette histoire collective mondiale et de ce nouveau monde qu’il va donc nous falloir repenser à nouveaux frais. Comme il faudra aussi repenser l’idée que nous nous faisions de Dieu, athées comme croyants.
C’est ce que Paul avait fait. Avons-nous aujourd’hui d’autre choix que de reprendre sa tâche et de considérer Paul comme notre laboratoire si l’on veut parer au vacarme qui vient ?
À condition d’entrer dans un tête-à-tête avec lui, de bien le lire, sérieusement, de tenir pour néant la lecture abusive des siècles qui ont cherché à le trahir et à l’instrumenter, pour les besoins du pouvoir et de la petite politique, à faire de lui un diviseur diabolique.
Voilà pourquoi je suis entré en dialogue avec lui, et j’ai décidé, comme il le faisait si abondamment, de lui écrire à mon tour. Pour comprendre en quoi nous pouvions être ses héritiers, sans nécessairement faire nôtres ses choix. Pour nous sauver.
Le labeur est immense. La terre à cultiver sans limites. Mais les moissons seront abondantes. Et, chacun, à son tour, pourra, avec la satisfaction du travail accompli, être définitivement rassasié.
Le dialogue avec Paul, difficile

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