Je suis un lieu
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Description

Dans ce livre au style très personnel, Jacynthe Tremblay relate la manière dont sa vie a été profondément marquée par sa rencontre avec le philosophe japonais Nishida Kitarō (1870-1945) au fil de son histoire quotidienne longue de deux décennies au Japon et en Chine. On y retrouvera des détails de la vie du philosophe, des exemples tirés de la culture japonaise ou encore des réflexions sur la musique de Bach, qui forment un cadre cohérent pour appréhender la pensée nishidienne. C'est ainsi que l'on pourra comprendre les concepts, déterminants, du «lieu» et de l'«altérité absolue», qui ont pour fonction de montrer comme l'être humain - dégagé d'une subjectivité autocentrée - peut entrer en relation avec les autres. Ainsi abordée, la philosophie de Nishida, selon l'interprétation simple mais très audacieuse qu'en fait l'auteur, devient accessible à tous et rejoint la densité de la vie.
Jacynthe Tremblay est titulaire d'une double spécialisation en philosophie de la religion et en philosophie japonaise. Elle habite au Japon depuis une vingtaine d'années, où elle poursuit ses travaux de recherche concernant Nishida Kitarō, de même que la traduction française de ses œuvres, dont De ce qui agit à ce qui voit (PUM, 2015). Elle a aussi dirigé plusieurs ouvrages collectifs en philosophie japonaise.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 14 septembre 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9782760636743
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0800€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Jacynthe Tremblay
JE SUIS UN LIEU
Les Presses de l’Université de Montréal
Sous la direction de Serge Granger
L’émergence de l’Asie n’est plus un phénomène nouveau et le 21 e siècle semble résolument porter son attention vers ce continent. Ce déplacement fondamental de l’ordre mondial affecte notre façon de vivre et de penser la globalité. La collection Confluences asiatiques observe l’influence grandissante de l’Asie sur le monde. Elle regroupe des chercheurs de divers horizons qui étudient les fondements culturels et politiques des peuples asiatiques et leur capacité d’adaptation au changement.
La présente publication a été rendue possible grâce à une subvention de recherche de la Japan Society for the Promotion of Science (numéro de la subvention: JP26370002).
Mise en pages: Yolande Martel Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Tremblay, Jacynthe, 1958- Je suis un lieu (Confluences asiatiques) Comprend des références bibliographiques. ISBN 978-2-7606-3672-9 1. Nishida, Kitarō, 1870-1945. 2. Lieu (Philosophie). 3. Altérité. I. Titre. II. Titre: Rencontre avec Nishida Kitarō. B5244.N554T742 2016 181’.12 C2016-940875-2 Dépôt légal: 3 e trimestre 2016 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2016 www.pum.umontreal.ca ISBN (papier) 978-2-7606-3672-9 ISBN (PDF) 978-2-7606-3673-6 ISBN (ePub) 978-2-7606-3674-3 Cet ouvrage a été publié grâce à une subvention de la Fédération des sciences humaines de concert avec le Prix d’auteurs pour l’édition savante, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).

INTRODUCTION
SECTION 1
Ma rencontre avec la philosophie de Nishida
1. Le sourire d’Ueda. L’école de Kyōto
2. Le jubé de la basilique. Les liens entre le soi et le monde
3. La calligraphie de Nishitani. Rencontre avec Nishitani
4. Le style Suzugamine. Le soi et la société
5. L’orgue de Kamakura. Sakabe Megumi
SECTION 2
L’approche de la philosophie de Nishida
6. Girafes et baleines. La révision de nos propres concepts philosophiques
7. La joueuse de pipa de Shenzhen. L’abord de textes issus d’une autre époque et d’une autre culture
SECTION 3
Le soi comme expression du monde
8. Le chauffard de Kyōto. L’expérience pure
9. Les fonds de tiroir des apothicaires. L’expérience directe de la réalité
10. L’oiseau de Londrina. La réalité véritable
11. Deux molécules d’hydrogène et une molécule d’oxygène. Le soi véritable
SECTION 4
La concomitance des contraires
12. Les chorals de Martin Luther. L’harmonie des contraires
13. La mendiante de Nanshan. Le concept de concomitance
14. La cathédrale de Hiroshima. Le néant absolu
15. Les solistes de Tokorozawa. L’autoéveil
SECTION 5
L’unité du corps et de l’esprit
16. Échec et mat. Le jeu comme unité sujet/objet
17. La signature de Jean-Sébastien. La composition musicale comme unité sujet/objet
18. La main qui pense. Le jeu musical comme unité corps/esprit
19. Les escrimeurs du parc Nakajima. La pratique des arts martiaux comme unité corps/esprit
20. L’art de laisser sa conscience derrière soi. La temporalité
SECTION 6
Pensée et langage
21. Le double usage des cartes de Google Maps. L’aspect englobant de la langue japonaise
22. Exercice à trous. L’élision du sujet
23. Pokémon et autres hādo . L’influence de la langue chinoise
24. Ricanements intempestifs. L’apparente difficulté du style nishidien
25. L’inculte et le docte. L’influence de la langue parlée
26. L’art de l’emballage japonais. L’aspect englobant du style de Nishida
27. L’argot de l’internet. La création d’un style philosophique
28. La confortable prévisibilité du film hollywoodien. Le style d’argumentation spiralant
SECTION 7
> L’interprétation de la philosophie de Nishida
29. Le quotient intellectuel des insulaires. Les théories sur les Japonais
30. De l’âme japonaise. Évaluations du style écrit de Nishida
31. L’art de la fugue. La structure de la pensée de Nishida
32. Les Lego stochastiques. L’architecture des paragraphes de Nishida
33. À la va-comme-je-te-pousse. La difficulté de traduire Nishida
SECTION 8
Nishida et les sciences de son époque: introduction au concept de «lieu»
34. Demi-Queue le chat. Le lieu et son contenu
35. La beauté des théories mathématiques. Nishida et les sciences
36. Einstein au Japon. L’influence de la théorie de la relativité et de la théorie des champs
37. Il me tend sa main. L’influence de Kurt Lewin
38. Analysis situs . L’espace topologique
39. Chacun cherche son style. La traduction des termes philosophiques de Nishida
SECTION 9
La topo-logique de Nishida
40. Aubergine la chatte. La logique englobante de Nishida
41. La vie cachée des poupées russes. Englober et être englobé
42. L’ermite de la taïga. Le lieu du néant absolu
SECTION 10
L’altérité absolue
43. Madame Liu. Le «tu» comme altérité absolue
44. Les gorges de Taroko. Le monde matériel comme altérité absolue
45. Les corbeaux du parc Sumikawa. Le monde biologique comme altérité absolue
46. Oliver, chien migrant. L’animal comme altérité absolue
47. Le vol du portefeuille. Le soi passé comme altérité absolue
SECTION 11
La relation je/tu
48. Les polyglottes de la province du Guangdong. L’accès au «tu» par l’intermédiaire du langage
49. Le port de Shekou. Le «je» et le «tu» dans le monde historique
50. Un drame dans le Shinkansen. L’autonégation
51. Hérons blancs et félins médiums. Nishida, un penseur religieux?
52. Le soliloqueur de Yokohama. L’auto-identité contradictoire
53. Le livreur d’eau de la rue Nanguang. Les modalités de la relation interpersonnelle
54. Comment réussir une dinde en 13 étapes. L’amour comme point de combinaison
CONCLUSION
La chanson de Robin
BIBLIOGRAPHIE
«Le moi doit être non pas un point mais un cercle; non pas une chose mais un lieu.»
Nishida Kitarō , 1926.
INTRODUCTION
LES ANGES DE KAHOKU
En janvier 1992, alors que j’étais dans le dernier trimestre de mes recherches postdoctorales à l’Université de Tōkyō, je décidai de m’accorder un répit et d’aller visiter Unoke, le village natal de Nishida Kitarō.
Unoke est une petite agglomération de la préfecture d’Ishikawa. Elle est située au bord de la mer du Japon, à 20 km au nord de Kanazawa, capitale de cette préfecture, et à 516 km au sud-ouest de Tōkyō. En 2004, elle a été fusionnée avec les villages d’Unoke, de Takamatsu et de Nanatsuku pour former la ville de Kahoku.
Par souci d’économie, je pris pour m’y rendre des trains locaux, avec des correspondances. Le voyage, depuis la préfecture de Chiba où j’habitais alors, dura en tout une dizaine d’heures. J’avais anticipé le plaisir de contempler pour la première fois les Alpes japonaises. J’en fus pour mes frais, car la presque totalité du voyage s’effectua dans les nombreux tunnels creusés sous les montagnes.
Sitôt arrivée à Unoke, je m’empressai d’aller visiter le petit musée consacré à Nishida. Le conservateur du musée, un homme au visage qu’un sourire perpétuel avait creusé d’innombrables plis, m’attendait dans la froidure et l’humidité d’un bâtiment de dimensions réduites. Y étaient exposés, outre quelques-uns des vêtements du philosophe, des manuscrits de ses œuvres complètes, de même que plusieurs de ses calligraphies.
Cependant, le plus intéressant, à mon sens, m’attendait dans un minuscule bâtiment de bois situé derrière le musée. Il s’agissait du cabinet de travail de Nishida. Au centre de l’unique pièce se trouvait une antique chaise de bois placée devant un bureau. Devant cet ensemble était posé sur le sol un poêle de fer, éteint depuis des lustres. La simplicité du décor témoignait bien du fait que la plus grande richesse de Nishida se situait dans son intelligence philosophique exceptionnelle.
Mon regard, après avoir été attiré par le mobilier, se promena sur les murs. Le spectacle était proprement impressionnant: à part les deux espaces que découpaient la fenêtre et la porte, ceux-ci étaient tapissés de livres, depuis le sol jusqu’au plafond.
Fascinée, je commençai à passer en revue les collections de livres en chinois, en japonais et en langues occidentales qui dormaient dans le froid et la pénombre. Mon exaltation fut cependant vite interrompue; le conservateur, qui patientait à l’entrée vêtu d’un simple veston, se plaignit du froid et je dus quitter l’endroit. Il n’empêche que la visite de ce lieu demeura une étape importante dans ma connaissance de ce personnage hors normes que fut Nishida.
Très tôt le lendemain, je me rendis sur la plage d’Unoke, à quelques centaines de mètres de l’auberge au confort tout relatif où j’avais passé la nuit. C’était la première fois que je voyais la mer du Japon. Durant plus d’une heure, je restai immobile dans la demi-teinte du jour naissant et le froid qui, en raison de la prégnante humidité des îles japonaises, me transperçait jusqu’aux os. Je me laissai imprégner de l’atmosphère et du milieu dans lesquels Nishida était né et avait grandi.
Ce n’est qu’en juillet 2014 que j’eus l’occasion de retourner dans ce qui était désormais la ville de Kahoku, afin d’y prononcer une conférence dans le cadre du douzième Congrès sur la philosophie de Nishida.
Environ deux kilomètres avant d’arriver à destination, j’avais aperçu sur ma gauche, à quelque 800 mètres, un impressionnant bâtiment qui, du sommet d’une colline, dominait le paysage. Aucun doute n’était possible: il s’agissait du Musée philosophique Nishida Kitarō d’Ishikawa, qu

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