La lecture à portée de main
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Description
Sujets
Informations
Publié par | L'Harmattan |
Date de parution | 01 décembre 2017 |
Nombre de lectures | 0 |
EAN13 | 9782336805108 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 3 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,1200€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Couverture
4e de couverture
Titre
Pierre J. Truchot
L’Art (d’être) idiot
Préfaces de Marc Lasuy et Philippe Godin
Copyright
© L’Harmattan, 2017
5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris
www.harmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
EAN Epub : 978-2-336-80510-8
Exergue
Avec des lecteurs aussi intellectuels que les miens, je suis obligé de m’expliquer une fois de plus et de dire que je trouve un être intelligent seulement lorsque son intelligence a un tempérament, étant donné qu’un homme vraiment intelligent ressemble à un million d’hommes vraiment intelligents. Pour moi donc un homme fin ou subtil n’est presque toujours qu’un idiot.
Arthur Cravan
Un chercheur est sans doute un peu idiot !
Claude Magne
Préfaces
Pour quelle raison vous apprêtez-vous à lire ce livre ?
Quelle curiosité vous a poussé à l’acheter chez votre libraire ? Quelle fut votre réaction lorsqu’un proche vous l’a offert ? En quoi sommes-nous concernés par ces individus que l’on croit reconnaître sans peine et qui n’ont somme toute, rien à nous apprendre, tant ils sont peu armés pour se défendre dans un monde qui n’est pas fait pour eux ?
Nous ne sommes pas idiots !
J’en suis bien convaincu pour ce qui me concerne et suis tout disposé à vous le concéder sans peine, les idiots ne lisent pas d’essais sur les idiots. D’ailleurs, quand bien même aurions-nous eu des prédispositions à l’idiotie dans nos jeunes années, nos parents, amis, instituteurs, héros de nos premières lectures ou des films qui ont façonné notre morale autant que notre intelligence, auraient eu tôt fait de nous détourner de ce périlleux penchant. C’est vrai, dans l’innocence de notre enfance, il a pu nous arriver de nous comporter comme des idiots. N’avons-nous pas, au moins une fois, donné notre goûter à un petit garçon qui en était dépourvu ? Pleuré devant un chien qui gémissait pitoyablement en attendant son maître ? Annoncé à haute et intelligible voix que les huitres c’est dégoûtant, lors d’un repas important pour la promotion professionnelle de papa ? Nous sourions aujourd’hui, de ces quelques maladresses. Depuis nous avons compris les règles du jeu, l’idiot, lui, est celui qui ne les comprendra jamais.
Nous avons appris, avec plus ou moins de talent ou de conviction, à devenir, sinon intelligent, en tout cas, suffisamment malins, pour « tirer notre épingle du jeu », pour « savoir y faire », « mener sa barque », « avancer ses pions », « manœuvrer », « communiquer », « atteindre ses objectifs »… Toutes ces expressions disent bien quels codes organisent notre rapport au monde, aux autres. De notre adaptation aux règles du jeu dépend la qualité de notre intégration dans la communauté. Ainsi, nous passons notre temps à évaluer ce qui est attendu de nous par cette société des hommes dans laquelle nous avons à trouver notre pitance, nos partenaires amicaux, sexuels, sociaux et professionnels. En contrepartie de ces efforts constants, mais que nous finissons par assimiler avec une aisance de petits Marquis devant l’étiquette de la Cour versaillaise, nous obtenons nos certificats de bonne conduite. Nous sommes reconnus comme membres à part entière du corps social, et rétribués en conséquence en marques de reconnaissance, d’amitié, d’amour et d’évolution dans l’organigramme.
C’est ainsi que les hommes vivent, façonnés et façonnant à la fois. Nos rencontres sur le forum, rendues possibles et pacifiées (dans le meilleur des cas), par les codes en cours, nous permettent de réaliser les œuvres que nous portons en nous et dont la communauté profitera. Tout va alors pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Nos sensations sont éduquées, nos émotions canalisées, nos expressions mesurées, nos libertés surveillées. De cette façon notre identité parvient à faire corps avec l’ensemble. Les avantages de cette « domestication » sont immédiatement assimilés, justifiés, par la formule aristotélicienne qui consent à nous reconnaître une essence animale mais en lui assignant un attribut spécifique qui la dénature radicalement : « politique ». À partir de là, notre humanité sera jaugée à l’aune de notre capacité à soumettre notre animalité à cet impératif politique consistant à savoir nous tenir dans le monde. La cause est entendue, il n’y a pas là, l’espace d’un débat. C’est précisément une des qualités de l’ouvrage de Pierre J. Truchot. Il ne fait pas débat. Les portraits d’idiots, réels ou imaginaires, l’analyse légère des mécanismes en jeu dans la présence de l’idiot au milieu de la société des « malins », n’entre jamais en compétition avec les tenants de l’intelligence efficace. Ce titre : L’Art (d’être) idiot ne pouvait pas être mieux choisi. Descriptions, analyses, perspectives, références… tous les ingrédients d’un sérieux travail universitaire sont réunis et, cependant, la lecture de ce livre nous transporte souvent, dans une émotion… esthétique ! Comme si la figure de l’idiot délicatement approchée par le pinceau de Pierre J. Truchot s’imposait progressivement sous la forme d’une rencontre désirable. Oui ! Incontestablement, lire cet essai subtilement « innocent » force les cloisons de nos certitudes éprouvées. Humain singulier (comme souvent nous croyons l’être) l’idiot ne revendique pas son identité, il la vit. Comme nous, l’idiot rit, mais toujours au bon moment, lorsque le cœur s’ouvre. Comme nous, l’idiot aime la nature, mais lui, la considère dans une communauté d’essence qui lui permet de saisir ses murmures. Les autres hommes le touchent, mais ne le détournent pas. Dans la solitude qui souvent nous effraie, il est plein de lui et de tous les mondes. Son sérieux est sans commune mesure avec nos lourdeurs protocolaires. L’idiot est l’homme qui vit intensément des principes de sagesse dont la plupart du temps nous avons fait des slogans vides de contenus.
Aucune revendication, pas l’ombre d’une posture « modélisable », pas de message à transmettre. C’est en cela que l’idiot est une œuvre artistique vivante et que ce qu’il fait de ses yeux, de ses pieds, de ses dix doigts est de nature esthétique. L’idiot est visible, il ne se donne pas à voir, il n’est pas compréhensible, il est « évident ». À les fréquenter assidûment et avec une si parfaite bienveillance Pierre J. Truchot nous livre un travail qui ne ressemble pas à un travail, un accès non démonstratif à une réalité méconnue et maltraitée de la belle nature humaine. Nous suivons le fil de son propos comme on pourrait contempler la scène et être saisis par les couleurs d’une toile humaniste. Pour parvenir à une si puissante harmonie entre l’objet de ce livre et le tour d’esprit singulier qu’il a fallu distiller pour y être fidèle, je me demande si Pierre J. Truchot, avec l’amitié et le respect indéfectibles que je lui porte, est suprêmement malin ou parfaitement idiot.
Marc Lasuy. Psycho-patricien et producteur radio.
Dans le domaine de l’art contemporain, l’art idiot n’a guère de visibilité : il est très souvent confondu et noyé dans le vaste champ de l’art brut, dissout dans l’art des « imbéciles ». Il est vrai que le marché de l’art regarde et achète avec de plus en plus d’intérêt ces objets fabriqués par des « naïfs », des « primitifs », des « psychotiques », mais ignore globalement l’art des idiots. Cette situation est tout à fait compréhensible car jamais les idiots ne sauraient constituer un mouvement et encore moins une école. Comme le précise soigneusement l’auteur de cet essai, l’idiot est loin d’être un imbécile ou un demeuré. Au contraire, il place toute son intelligence au service de ses intuitions créatrices et a décidé de cesser de prouver aux autres que sa raison fonctionne à merveille. D’un point de vue social, la situation de l’idiot est marginale, mais l’idiot préfère sa solitude à la norme ; telle est sa condition et elle lui convient puisqu’elle lui permet de s’adonner à ses créations en toute liberté. De plus, chaque idiot(e) est une personne si singulière et imprévisible qu’elle a mieux à faire que d’écrire et analyser sa propre pensée et ses créations. Le lecteur va rapidement le comprendre en lisant ce livre : la communication, le commerce ne sont pas le point fort des idiots.
S’il n’existe que très peu de rapport entre l’art brut et l’art idiot, la présence et la vitalité de ce de