Les Moralistes français au dix-huitième siècle
120 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Les Moralistes français au dix-huitième siècle , livre ebook

-

120 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Description

L’HOMME, SA VIELes noms que j’ai réunis dans le groupe de moralistes dont nous allons nous occuper ne figurent pas, à l’exception de Vauvenargues, au premier rang des écrivains du XVIIIe siècle, et les doctrines morales et politiques de la plupart de ces auteurs sont loin d’appartenir à la meilleure philosophie : elles sont au contraire, si j’ose parler ainsi, de qualité très-inférieure. Mais l’étude n’en est pas moins fort intéressante et fort instructive.Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 1
EAN13 9782346052936
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À propos de Collection XIX
Collection XIX est éditée par BnF-Partenariats, filiale de la Bibliothèque nationale de France.
Fruit d’une sélection réalisée au sein des prestigieux fonds de la BnF, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques de la littérature, mais aussi des livres d’histoire, récits de voyage, portraits et mémoires ou livres pour la jeunesse…
Édités dans la meilleure qualité possible, eu égard au caractère patrimonial de ces fonds publiés au XIX e , les ebooks de Collection XIX sont proposés dans le format ePub3 pour rendre ces ouvrages accessibles au plus grand nombre, sur tous les supports de lecture.
Jules Barni
Les Moralistes français au dix-huitième siècle
AVANT-PROPOS
Le présent volume forme le troisième tome de l’Histoire des idées morales et politiques en France au XVIII e siècle, dont les deux premiers ont été publiés en 1865 et 1867. Il reproduit, comme les deux précédents, un cours professé à Genève pendant l’orgie impériale. Seulement, tandis que le cours contenu dans les premiers volumes avait été fait pour l’auditoire de l’Académie, celui-ci, résumant mon enseignement académique, a été professé (en 1867), comme les Martyrs de la libre pensée, comme Napoléon, comme la Morale dans la démocratie, devant le grand public de ces cours du soir que la République de Genève fait donner chaque hiver. Il constitue ainsi, sous une forme populaire, un tout qui se détache de mes précédentes leçons sur le XVIII e siècle, mais qui en même temps peut en être considéré comme la suite. C’est de la même manière qu’a été traitée la série qui doit clore tout ce travail et qui est consacrée aux écrivains hommes d’État promoteurs ou coopérateurs de la Révolution française (Turgot, Malesherbes, Necker, Mirabeau, Condorcet). Volney, dont l’étude termine le cours que je publie aujourd’hui, nous introduit déjà dans cette nouvelle galerie.
La rédaction de ce cours était déjà presque finie, lorsque la chute de l’Empire me ramena en France. Je n’ai eu qu’à la revoir et à l’achever dans les premiers loisirs que j’ai pu trouver depuis cette époque. En offrant aujourd’hui au public français ces leçons telles qu’elles ont été prononcées à Genève en d’autres temps, je ne crois pas faire une chose inutile à mes concitoyens. Nous sommes sortis des griffes du césarisme ; il s’agit maintenant de n’y plus retomber. Tout ce qui peut éclairer et moraliser notre démocratie est plus que jamais opportun.
Éclairer et moraliser la démocratie, tel est le but que, pour ma part, j’ai toujours poursuivi, à l’étranger, comme en France ; et je puis dire qu’à l’étranger je n’ai jamais cessé de tourner mes yeux vers la France. C’est aussi en vue de ce but que j’ai entrepris de séparer dans notre grand XVIII e siècle le bon grain de l’ivraie, et, en renouant nos traditions, de les rectifier au besoin.
Certains, ne voyant le XVIII e siècle que dans une secte étroite, le glorifient précisément par ce qu’il y faut condamner. Pour moi, je ne saurais comprendre qu’enseigner aux hommes qu’ils ne sont jamais libres, partant jamais responsables de leurs actions, et qu’il ne peut y avoir en eux de mobile supérieur à l’intérêt personnel, soit le moyen de faire des républicains.
Il y a, au contraire, si nous voulons nous rendre capables de nous gouverner nous-mêmes, deux choses qu’il faut sauver du naufrage des dogmes religieux et des systèmes métaphysiques, et qui en sont en effet indépendantes : le sentiment de notre liberté morale, d’où naît celui de notre responsabilité, et le principe de l’obligation morale ou du devoir, qui engendre la vertu ; sans ce double fondement, il n’y a pas de libre démocratie, pas de république possible.
J’ai donc dû combattre, sur ces deux points capitaux, ceux des moralistes du XVIII e siècle qui les nient ou les dénaturent, et je l’ai pu faire en opposant à ces écrivains d’autres philosophes du même temps, les vrais génies du siècle ; mais on verra aussi comment, tout en signalant les côtés vicieux de leurs doctrines, je me suis appliqué à en relever les belles et bonnes idées. C’est là, si je ne m’abuse, ce qui fait l’intérêt ainsi que l’utilité de ce travail.
Le lecteur en jugera.

JULES BARNI.

Paris, 3 décembre 1872.
PREMIÈRE LEÇON
VAUVENARGUES
L’HOMME, SA VIE
 
Les noms que j’ai réunis dans le groupe de moralistes dont nous allons nous occuper ne figurent pas, à l’exception de Vauvenargues, au premier rang des écrivains du XVIII e siècle, et les doctrines morales et politiques de la plupart de ces auteurs sont loin d’appartenir à la meilleure philosophie : elles sont au contraire, si j’ose parler ainsi, de qualité très-inférieure. Mais l’étude n’en est pas moins fort intéressante et fort instructive. Elle met en lumière deux points très-importants dans l’histoire du XVIII e siècle. Le premier, c’est que, si ces mauvaises doctrines ont trouvé un trop grand nombre d’adeptes, elles ont eu aussi pour contradicteurs les plus grands esprits de ce temps, les Voltaire, les Jean-Jacques Rousseau, les Turgot, et que par conséquent il est injuste de les donner, comme on l’a fait si souvent, pour la véritable expression de la philosophie du XVIII e siècle, comme si ce siècle n’avait pas connu d’autres principes. Le second, c’est que, dans les livres de ces philosophes mêmes, si défectueuses que fussent leurs théories, circulait un esprit généreux qui en corrigeait les erreurs et l’influence. Tels sont les deux. points que je m’efforcerai surtout de faire ressortir dans les leçons que je consacrerai à Helvétius, à Saint-Lambert et à Volney. Je vous montrerai le souffle de l’amour de l’humanité purifiant en quelque sorte, comme un vent salutaire, les plus fâcheuses doctrines et leur faisant porter des fruits qu’on n’en aurait pas attendus, tandis que nous voyons trop souvent aujourd’hui les plus pures théories stérilisées par je ne sais quel mauvais air qui courbe et dessèche les âmes.
Les réflexions qui précèdent ne s’appliquent pas, — je n’ai pas besoin de le dire, — à Vauvenargues, que nous devons étudier le premier, parce qu’il est le premier en date comme en valeur.
 
Vauvenargues occupe une place à part dans le XVIII e siècle. Il n’est pas tout à fait, comme l’a dit M. Villemain 1 , un disciple du siècle précédent, quoiqu’il professe une grande admiration pour Pascal, Bossuet et Fénelon, et qu’il ait formé son style sur leur modèle : l’esprit du XVIII e siècle a bien aussi un peu soufflé sur lui ; mais, d’un autre côté, il se distingue nettement de Voltaire et des Encyclopédistes tels que d’Alembert, Diderot, d’Holbach, Helvétius, etc., ou de ce que l’on a nommé en général (trop confusément, il est vrai) l’ école philosophique, par le goût de la méditation intérieure, par un certain respect de la religion où il avait été élevé, enfin par un ton plus grave et un accent plus touchant. Il appartient plutôt au courant où Jean-Jacques Rousseau s’efforcera bientôt de faire rentrer la philosophie. Mais il mourut jeune, avant même d’avoir vu se lever ce nouvel apôtre ; et il eut peu d’influence sur son époque. Peut-être, s’il eût vécu plus longtemps, eût-il exercé une heureuse action sur Voltaire, qui le goûtait, l’aimait et ressentait même pour lui une sorte de vénération ; peut-être eût-il, comme on l’a dit 2 , relié Voltaire et Rousseau, et prévenu les déchirements de leur philosophie. Mais, s’il n’a pu avoir sur Voltaire et sur son temps une influence efficace, il n’en a pas moins pris son rang parmi les plus grands moralistes français, à côté de Montaigne, de Charron, de Pascal, de La Rochefoucauld et de La Bruyère. Aussi mérite-t-il de nous arrêter tout particulièrement.
Étudions d’abord l’homme en lui ; sa vie nous expliquera mieux ses pensées, qui à leur tour acheveront de nous révéler l’homme.
La vie de Vauvenargues se distingue aussi de celle de la plupart des philosophes de son temps : il vécut loin de la société de Paris, dans les camps ou dans la retraite, obscur et malheureux ; et il mourut jeune. Parcourons cette destinée si courte, mais si intéressante.
Vauvenargues vint au monde le 6 août 1715, c’est-à-dire l’année même où, avec la mort de Louis XIV, finit réellement le XVII e siècle et commence le XVIII e . Il naquit à Aix, en Provence, c’est-à-dire dans ce berceau de la douce langue d’oc et de tant de beaux diseurs, depuis les chantres de la gaie science jusqu’au grand orateur de la Révolution française, Mirabeau, dont le père, né justement l

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents