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pages
Français
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2019
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Ebook
2019
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Publié par
Date de parution
05 février 2019
Nombre de lectures
3
EAN13
9782342165166
Langue
Français
« Narcisse, ta place n'est pas dans une tour de contrôle, mais dans un poste de pilotage. » Narcisse Nouwezem Fosso, pilote de ligne durant 38 ans, se destinait pourtant à une carrière de médecin militaire étant enfant. Mais à la vue du même avion chaque dimanche, l'envie lui vint alors de devenir contrôleur aérien. L'auteur nous embarque avec lui, depuis son concours d'entrée à l'École Africaine de la Météorologie et de l'Aviation Civile, en passant par ses débuts en tant que contrôleur, pour finalement devenir pilote de ligne. Désormais à la retraite, N. Nouwezem, se livre entièrement et nous raconte avec délice ses anecdotes croustillantes, telle que l'arrivée du Concorde avec le Président Giscard d'Estaing, sans oublier d'évoquer les incidents et d'accidents aéronautiques, comme celui de la Germanwings, survenus lors de ses 38 ans de carrière. Attachez vos ceintures et préparez-vous au décollage avec votre commandant de bord !
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Date de parution
05 février 2019
Nombre de lectures
3
EAN13
9782342165166
Langue
Français
La maîtrise du risque
Narcisse Nouwezem F.
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La maîtrise du risque
Dix-sept ans, c’est probablement l’âge où l’on termine son cycle de l’enseignement secondaire et où l’on commence à dessiner son futur professionnel. Dix-neuf, voire vingt était l’âge moyen pour terminer son cycle secondaire dans les années soixante-dix. Mais avant cet âge, les plus jeunes enfants, quand vous leur posez la question : « Qu’aimerais-tu faire quand tu seras grand ? », ils vous donnent des réponses qui très souvent prêtent à sourire, mais qui au fond découlent d’un vécu. Il n’est pas étonnant d’entendre un gamin vous dire fièrement que quand il sera grand, il sera policier, sapeur-pompier ou même douanier retraité. Douanier retraité ? On peut s’y arrêter deux secondes. Être douanier, au Cameroun, et probablement dans bon nombre de pays, paraît comme une bénédiction divine, et ceci quel que soit le niveau de responsabilités dans la fonction. Quand bien même le douanier n’est pas titulaire d’un poste où la corruption peut s’exercer facilement, il connaîtra toujours un circuit bien huilé pour conduire le corrupteur vers une porte dédiée. Le corrupteur n’ayant d’ailleurs pas le choix, dans bien des cas et situations, que de se plier à la loi du dessous-de-table. Un douanier, naturellement, peut s’assurer d’une retraite paisible, au point de laisser croire à un enfant de quatre ou cinq ans qu’être douanier à la retraite est un métier. Imaginez-vous un instant, qu’après 25 ans de travail comme pilote à Cameroon Airlines (1980-2005), je perçois mensuellement une retraite de 119 500 FCFA, soit très exactement 182 euros ! Environ 4 000 FCFA/jour ou 6 euros. Il s’agit ici d’un haut cadre, un des mieux payés de la République, dit-on !
Papa était commerçant, du début jusqu’à la fin. Mais l’id ée d’être commerçant ne m’était jamais venue à l’esprit jusqu’à un certain âge très avancé. Par contre, nous qui habitions le quartier Bonapriso à Douala, pouvions regarder passer les avions au décollage, et plus précisément ceux qui partaient d’une piste orientée NW ( North West ), en l’occurrence la piste 30 (301 degrés). Tous les dimanches et à la même tranche horaire (9-10 heures), passait le Boeing 707 pour destination Orly Sud. Évidemment, rêver d’être pilote à ce moment-là, et même sans doute à cette époque, s’apparentait à de la fiction plus qu’à tout autre chose. De toutes les façons, un pilote, je n’en connaissais point, et il n’en existait pas dans ma famille proche ou lointaine. Par contre, un avion, me disait-on, était guidé, dirigé, commandé à partir du sol. Eh ben, dites donc ! S’il est guidé, dirigé et même commandé à partir du sol, c’est bien parce que le bonhomme qui guide ces avions est au sol et les pieds par terre. Moi j’aurais répondu sans hésitation à la question « qu’aimerais-tu faire quand tu seras grand ? » : médecin militaire. Pourtant, je peux aussi vous assurer que je n’en connaissais point, ni dans ma famille proche ni dans ma famille lointaine. Médecin oui. L’oncle de ma mère était un médecin chirurgien (Dr Tagny) et un autre membre de ma famille, chez qui a grandi une de mes sœurs, était militaire gendarme. Est-ce l’association des deux qui faisait naître en moi l’idée d’être médecin militaire. Si c’en était le cas, alors il faut croire que les pédagogues de mes années du lycée qui m’avaient orienté de force vers une série mathématiques-techniques ne s’étaient pas trompés.
Du moment où guider les avions en gardant les pieds sur terre me semblait être loin de la sorcellerie, (encore que de la sorcellerie, je n’y ai jamais cru), je pouvais dès cet instant changer de paradigme, pour utiliser un mot très à la mode. Être contrôleur aérien. Travailler dans une tour de contrôle. Attendez, je ne sais pas si vous vous rendez compte ! Être dans une tour de contrôle, même pour s’y promener, devait déjà être très excitant. Dès lors, y travailler pouvait te pousser à ne plus avoir les pieds sur terre.
Comme cet avion passait tous les dimanches à la même heure, et que, moi, je n’étais pas un enfant d’ église pour être à la messe à ces moments-là, eh ben, j’étais à la maison et chaque passage me rappelait l’idée d’être contrôleur aérien, encore que de nos jours, contrôleur fiscal eût été dans le contexte camerounais, une fois encore, un meilleur choix. Aujourd’hui, un jeune à l’âge que j’avais à cette époque, voyant un avion passer, aurait d’autres envies. Celle par exemple d’être dans le train d’atterrissage pour être en Occident, quel que soit le pays. Les aéroports étant de plus en plus contrôlés, l’espace dans le puits du train d’atterrissage devenant de plus en plus petit, les avions volant de plus en plus haut, et les Camerounais devenant de plus en plus obèses, opter pour ce mode d’expatriation devenant plus qu’aléatoire, Facebook ou Instagram, etc., ne vous le recommanderont jamais. Sur un bateau, sur la Méditerranée, il reste toujours des survivants, et il y aura toujours une ONG dans le coin pour vous porter secours et passer à la une des grandes chaînes de télévision avec des images plus vraies que nature. Vous êtes survivant et même de surcroît vivant, vous passez à la une du 20 heures, le monde entier se bat dans les assemblées pour vous trouver un accueil. Internet relaie toutes ces péripéties par fibre optique et en 5 G. Devrais-je dire qu’heureusement que dans les années soixante-dix il n’existait pas Internet, sinon, d’un coup de souris, je me serais mis sur Google ou YouTube pour en savoir plus sur le contrôle aérien et les contrôleurs aérien. De deux choses l’une, soit cela m’aurait conforté dans la volonté d’être contrôleur aérien, soit plutôt m’en aurait dissuadé. Je serais certainement tombé sur un forum vantant le métier, et un autre indiquant à quel point il doit être évité autant que la peste ou le choléra pour être gentil. Toujours est-il que l’image d’une tour de contrôle, je l’avais bien gravée dans un ou plusieurs coins de ma tête. De l’esplanade qui, face à l’aérogare, faisait office de parking, j’en avais fait un lieu de pèlerinage. J’y venais presque quotidiennement pour admirer cette architecture dominante et particulière aux vitres hyperfumées. Le mec à l’intérieur, à défaut d’être respectable, se devait certainement d’être respecté. Cet esplanade-parking était également le lieu pour les manœuvres de créneaux lors des examens de permis de conduire. Vous pensez bien que le jour de mon examen de permis de conduire, j’étais beaucoup plus intéressé par la tour (TWR) que par l’inspecteur de police en charge de me faire passer l’examen.
Sans Google et autres artifices de recherche sur le Net, j’arrivais tout de même à savoir que la formation de contrôleur se faisait à l’École africaine de la météorologie et de l’aviation civile. (EAMAC) à Niamey au Niger, et que le concours était organisé par la fonction publique via le ministère des Transports sous la houlette de la direction de l’aviation civile (DAC) rebaptisée depuis CCAA (Cameroon Civil Aviation Authority). Il fallait rester très attentif pour le lancement du concours, et le surveiller autant qu’un bol de lait frais sur le feu. En général, un concours au Cameroun n’était connu du grand public que tout au plus cinq jours avant la date du concours. C’était encore mieux, car de nos jours, on peut être admis à un concours sans y avoir participé, et même en étant deux mètres sous terre.
Le fait d’ouvrir le concours cinq jours avant la date de l’examen avait l’« avantage » de limiter les candidats et l’inconvénient de tirer le niveau vers le bas. Toujours est-il qu’à ce concours, nous étions 256 candidats pour une place de contrôleur, une place de technicien radio et une place de météorologiste. Total : 3 places pour en faire des techniciens supérieurs (BTS). Moi je concourais pour l’unique place de contrôleur aérien. Le concours se passait début septembre, pour une rentrée mi-octobre, promotion 1974.
Le jour du concours qui se déroulait à l’école publique de Bonapriso à Douala, rien que la tête des participants ne me faisait pas douter de l’issue des résultats. Ils avaient l’air de tout sauf de garçons doués. Il est évident que compte tenu des places aussi limitées, le risque de ne pas être admis était énorme. Raison de plus pour ne pas informer mes parents, et plus principalement mon père à qui il fallait demander de l’argent pour la constitution du dossier du concours. Fort heureusement pour moi, il y avait juste, si mes souvenirs sont exacts, une demande timbrée, une copie d’acte de naissance, copie de diplôme requis ou relevé de notes. Il n’était nullement question de copies conformes légalisées, ou d’un quelconque extrait de casier judiciaire. Question de croire que nous bénéficiions encore d’un important crédit de confiance. Avec une demande timbrée à 250 FCFA (la moitié d’un dollar), mon père ne risquait pas de voir son sommeil être perturbé pour un tel montant. Dans la famille, l’existence, la date, le lieu et ma participation à ce concours n’étaient connus que de moi et moi seul. Je pouvais donc le louper sans en attirer les foudres de qui que ce soit.
Comme tout enfant issu de bonne famille, il était de bon ton de faire des études supérieures dans une grande école ou université. Au Cameroun et plus généralement en Afrique, des familles installées dans les r égions urbaines font venir des jeunes membres de la famille du « village » afin de leur faire bénéficier d’un encadrement autrement plus décent. C’étai