La solitude du mouvement
112 pages
Français

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La solitude du mouvement , livre ebook

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Description

« Bizarre ce petit tremblement. Vraiment bizarre ! On dirait un tremblement de fatigue... ou de stress. » Tout commença un matin des plus ordinaires par un léger tremblement. Pensant d'abord au stress, Erwan Grall se rend chez le médecin pour une simple visite de routine. Mais le verdict tombe, sans appel : parkinson, à 42 ans ! La vie de l'auteur en sera bouleversée à jamais. La solitude du mouvement est une confession à cœur ouvert, sans concession et sans fard. Erwan Grall se met à nu dans un récit aussi poétique qu'authentique. Un témoignage saisissant écrit dans un style léger et humoristique permettant de dédramatiser une situation pourtant traumatisante.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 juin 2019
Nombre de lectures 1
EAN13 9782342166729
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

La solitude du mouvement
Erwan Grall
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Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
La solitude du mouvement
 

Dessin de Yuna Grall
 
Vie nocturne
2 h 15.
 
2 h 15 du matin et je suis toujours debout. Scotché devant l’écran malgré les yeux qui papillonnent et le cerveau qui se liquéfie.
 
Debout à lutter contre le sommeil pour pouvoir, une fois couché, tenir plus longtemps dans la chaleur du lit au petit matin.
 
C’est un choix. Mon choix. Celui de se contraindre à résister le soir et s’abrutir de fatigue pour gagner du sommeil le matin. Préférer rester le plus tard possible à m’occuper pour éviter un réveil en milieu de nuit, bien plus déprimant à mes yeux que ces soirées à rallonge.
 
Voici bientôt cinq ans que ma vie a changé.
L’autonomiste
Bizarre ce petit tremblement. Vraiment bizarre !
 
On dirait un tremblement de fatigue… ou de stress.
 
Bon. C’est vrai que les dernières semaines étaient bien remplies et les heures se sont enchaînées avec une sacrée régularité. Ce n’est pourtant pas une première ! Bien des fois le travail a été plus dur, les nuits plus courtes et les journées plus interminables, sans pour autant trembler.
 
Pas là !
 
Il faut dire qu’avec le temps doux et humide du moment, peu en rapport avec un mois de décembre, les virus sont partout et je suis assez secoué par une valeur sûre : la gastro-entérite !
Là où la gastro passe, la dignité trépasse ! Toute personne assise sur la cuvette des toilettes, une bassine sur les genoux, attendant avec angoisse et lassitude le côté du prochain rejet, peut en témoigner : on n’est pas grand-chose pendant une gastro !
 
Donc, vidé comme je suis (au propre comme au figuré), ce petit tremblement n’est pas la mer à boire, tout au plus une grande fébrilité due à une grosse fatigue.

Mais soyons sérieux et allons voir le médecin.
 
« Grande fébrilité due à une grosse fatigue, rien de grave. Un peu de repos et cela devrait passer. Vous avez votre carte Vitale ? »
 
C’est fou comme le corps médical peut être rassurant ! Me voilà fixé et logiquement, d’ici quelques jours il n’y paraîtra plus.
Tant mieux ! Car, mine de rien, passer les fêtes de fin d’année avec la main qui bat le rythme sur une caisse claire virtuelle sans arrêt n’est pas une perspective réjouissante. C’est pourquoi, janvier arrivant, je me suis décidé à consulter et me voici soulagé.
 
« Si cela ne passe pas avec du repos nous aviserons » , me dit mon docteur quand je quitte son cabinet. La voix de la sagesse !
 
Sur ces bonnes paroles, je prends la direction de mon appartement, convaincu qu’avec du sommeil et ce qu’il faut de médicaments, tout redeviendra normal.
 
Ouf !
 
Trois semaines ont passé et c’est un peu inquiet que je retourne voir mon médecin car il faut bien le constater, il y a peu d’évolution… Enfin si. Il y a une évolution du tremblement là où on attendait une régression, donc l’évolution n’est pas celle souhaitée… Vous suivez ? Subtilité de la langue française !

Ma gastro-entérite est loin, partie sous d’autres cieux faire son office et mon bras droit ne se calme pas pour autant. Actif du matin au soir et du soir au matin, il paraît avoir pris des libertés avec le reste de mon corps.
 
Putain d’autonomiste !
 
Les Bretons, les Basques, d’accord ! Mais mon bras ? Mon corps n’est pas la France ! Il n’y a pas de raison de scission. Tout allait bien, pas un mot plus haut que l’autre depuis quarante-deux ans, et là, tout d’un coup, rien ne va plus !
 
Me revoici donc à la case docteur.
 
Et cette fois, je ressens une certaine incertitude dans le diagnostic.
Blocage d’un nerf, calcification osseuse… Finalement, je me vois orienté vers un neurologue pour en avoir le cœur net et passer, je pense, les examens susceptibles de lever le doute sur ces symptômes dignes d’un parkinsonien.
 
Mais ne nous égarons pas vers des idées préconçues. Il y a certainement une explication logique à tout ceci et la spécialiste va vite me rassurer.
 
Parkinson ! Quarante-deux ans ! N’importe quoi ! Il suffit d’y songer deux secondes pour trouver cette hypothèse ridicule. D’ailleurs, mes enfants en plaisantent : alors Parkinson, les lacets ? Ça marche ? On rigole et on dédramatise en attendant de connaître la véritable origine de ce maudit tremblement.
Faire comme si…
C’est un matin de février que je pénètre dans cette salle d’attente pour la première fois et un sentiment étrange m’habite.
 
La neurologie : un secteur abstrait pour lequel je n’avais eu aucune réflexion jusqu’à ce jour.
 
Et là, subitement, je réalise être entré dans un domaine très vaste et dont les différentes contrées ne sont pas à proprement parler les plus rassurantes.
 
Neurologie, cela fait instantanément penser au cerveau et donc à un territoire quasi vierge, où de petits îlots de certitudes émergent d’un océan noir de mystères où des abysses béants nous rappellent que ce lieu est pour longtemps encore une terre inconnue.
 
Assis devant des magazines féminins gros comme des annuaires, tant les pubs de parfums ont proliféré et des revues de déco montrant des maisons hors de prix et aseptisées, je commence à douter… à réaliser plutôt… et comprendre que mon état n’est peut-être pas aussi anodin que ce que je voulais croire.
 
Difficile de se faire une idée précise de la neurologue qui m’accueille. De taille moyenne, très mince, pour ne pas dire maigre (elle doit faire 45 kg toute mouillée), des cheveux noirs coupés mi-long et un bronzage tout sauf naturel, elle n’est pas particulièrement pétillante ni enjouée. Ses vêtements classiques/chics lui vont à ravir. D’un abord plutôt froid, elle donne l’impression de garder volontairement une distance avec le patient. On sent qu’elle n’est pas là pour donner de la chaleur humaine.
 
Pour ce qui est des examens, je me retrouve à faire les cent pas sur les talons, sur la pointe des pieds, accroupi, etc. Je pianote dans le vide avec mes doigts, agite mes mains en faisant des marionnettes ; des coups de maillet pour tester les réflexes ainsi qu’un grattage en règle de la voûte plantaire fort désagréable terminent la séance.
 
Quand je suis rhabillé, on discute de mes activités, de mon ressenti depuis l’apparition de ce désagrément. En conclusion, je me vois orienté vers l’imagerie médicale. IRM du cerveau et scintigraphie vont donner toutes les images utiles à l’établissement d’un diagnostic.
 
Le seul problème est la forte demande pour ce genre d’examen et obtenir un rendez-vous va prendre des semaines !
 
Il va falloir prendre son mal en patience en espérant que d’ici là il n’y ait pas amplification du phénomène.
 
Alors que je m’apprête à partir, la neurologue me lâche une phrase pleine de mystères et de sous-entendus :
 
« Quand vous aurez les résultats d’examens, revenez accompagné de votre femme. »
 
Me voyant un peu dubitatif à ces paroles, elle justifie sa demande :
 
« Un regard extérieur est toujours bon à prendre et elle aura peut-être une vision de vos symptômes qui vous aurait échappé. »
 
Soit. Cette demande me laisse cependant une impression étrange.
 
La vie suit malgré tout son cours et je m’adapte comme je peux à cette petite contrariété.
 
Des séances de kiné m’ayant été prescrites, je tombe par le plus grand des hasards sur une perle !
 
Un homme d’une motivation incroyable ! Toujours curieux et cherchant sans cesse les petits trucs susceptibles de faire la différence pour ses patients. Du sur-mesure, quoi !
Rien à voir avec les kinés côtoyés jusque-là, et qui, après vous avoir massé dix minutes, vous oublient sous les lampes.
 
Et d’une bonhomie ! Parlant vélo à qui veut l’entendre. Il faut imaginer un homme à qui on a donné un corps suffisamment grand pour contenir toute cette gentillesse. Un gros nounours d’un mètre quatre-vingt-cinq avec un collier de barbe grisonnant et des mains immenses.
 
On imagine aisément ses enfants filant droit quand il levait ses paluches !
 
Je prends donc l’habitude de venir faire mes petits exercices chaque semaine et c’est avec plaisir que j’écoute ce monsieur me parler de sa dernière ascension du Ventoux tout en m’imposant des séances d’équilibre sur des plateaux plus instables les uns que les autres.
 
J’arrive à vivre, en fait, presque normalement.
 
Grâce au soutien de mes collègues, le travail reste le même, ceux-ci palliant mes insuffisances et je sais pouvoir compter sur eux quelle que soit la situation et cela fait chaud au cœur.
 
En famille ça va aussi, mais mon amour vit, elle aussi, des choses compliquées et sans en avoir parlé, je pense que ma situation l’inquiète.
 
Hélas, tout à mon problème, je ne m’aperçois pas que les résultats que j’attends pourraient être aussi durs à encaisser pour elle que pour moi.
Vive la science   !
Bientôt deux mois que j’attends de pouvoir me faire photographier le cerveau et enfin, ce matin gris et humide de mars, je prends le chemin de la clinique pour passer cet IRM susceptible de trouver le plaisantin caché dans ma tête, entre le cortex et l’hypothalamus, et qui s’amuse à faire de mon corps une marionnette sous 220 V.
 
Mon épouse m’accompagne pour cette première étape qui, je l’espère, pourra m’apporter un début d’explication à ces symptômes aussi envahissants que mystérieux.
 
Encore une salle d’attente. Il faut que je m’y habitue on dirait car ces derniers temps, elles sont devenues pour moi des passages obligés. Vers quoi ? Je ne le sais pas encore m

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