Biologie de la mort
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Biologie de la mort , livre ebook

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Description

Pourquoi la plupart des créatures vivantes sont-elles condamnées à mourir "naturellement" même lorsqu'elles disposent d'un environnement favorable et protégé ? La mort est-elle un processus biologique "utile" ou bien ne correspond-elle à aucune nécessité naturelle ? La biologie n'aborde ces questions que depuis peu. Elle fournit cependant aujourd'hui une grille d'interprétation cohérente et rigoureuse rendant compte de la mort, de son existence comme des mécanismes au cœur même du vivant. André Klarsfeld et Frédéric Revah font le point sur toutes ces recherches qui bouleversent nombre d'idées reçues sur un sujet qui hante l'humanité depuis les origines. André Klarsfeld est neurobiologiste et chercheur à l'Institut Alfred-Fessard du CNRS à Gif-sur-Yvette. Frédéric Revah est neurobiologiste de formation. Il a appartenu à l'Institut Pasteur et a exercé des responsabilités dans l'industrie pharmaceutique. Il est aujourd'hui directeur scientifique dans une entreprise de biotechnologie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2000
Nombre de lectures 11
EAN13 9782738174000
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0600€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

ANDRÉ KLARSFELD
FRÉDÉRIC REVAH
BIOLOGIE DE LA MORT
© ODILE JACOB, JANVIER  2000 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-7400-0
Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, 2º et 3º a, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
« […] tout ce que nous pouvons souhaiter, c’est que l’audace du savant consente à se tempérer de scrupule, c’est qu’il n’oublie jamais que — selon l’immortelle formule de Bacon — “la science, si on la prend sans l’antidote de la charité, ne laisse pas d’avoir quelque chose de malin et de vénéneux pour l’esprit”. »
Jean Rostand, Peut-on modifier l’homme ?

Un avertissement qui, à l’évidence, aurait pu s’adresser à l’auteur des lignes suivantes :
 
« Et même, si on pouvait prolonger la santé jusqu’à la veille de la mort, il ne serait pas sage de donner à tous une grande longévité. Nous savons déjà quels sont les inconvénients de l’accroissement du nombre des individus, quand aucune attention n’est donnée à leur qualité. Pourquoi augmenter la durée de la vie de gens qui sont malheureux, égoïstes, stupides, et inutiles ? »
Alexis Carrel, L’homme, cet inconnu .

À la mémoire de tous ceux dont la vie fut brisée par des idéologies criminelles, auxquelles des savants peu enclins aux scrupules, comme Carrel, ont pu apporter leur concours,
À nos familles.

 
Remerciements

Notre livre est né de la formulation, facilitée par l’atmosphère stimulante d’un dîner entre amis, d’un paradoxe : qu’est-ce que les sciences de la vie pourraient bien avoir à dire sur la mort, qui est son contraire ? Dans les premières phases de ce projet, nous avons longuement et à de nombreuses reprises discuté avec François Schächter, initiateur du projet Chronos sur la génétique du vieillissement au Centre d’étude du polymorphisme humain (CEPH). Sa large connaissance du domaine, sa vision et ses encouragements constants nous furent précieux. Qu’il en soit ici chaleureusement remercié.
Catherine Allais, Henri Atlan, Annick Barrau, Raymond Boudon, Jean-Charles Darmon, Pierre-Henri Gouyon, Dominique Guillo, Charles Lenay, Michel Morange et Jean-Didier Vincent nous ont fait bénéficier de leurs conseils, de leurs encouragements ou de leurs critiques à différents stades de notre réflexion ou du passage à l’acte rédactionnel. Nous leur en sommes reconnaissants. Nous remercions aussi la Société de Thanatologie pour le fonds bibliographique très complet qu’elle a réuni, et que nous avons pu consulter à plusieurs reprises.
Surtout, nous remercions affectueusement Florence et Isabelle, nos épouses, pour leur confiance, le rôle de cobayes qu’elles ont bien voulu jouer, et leur patience sans borne. Puissent-elles estimer finalement que le jeu en valait la chandelle !
Prologue
LES SCIENCES DE LA VIE FACE À LA MORT

Il faut coperniciser la mort 1 .

Pourquoi donc consacrer un ouvrage à la mort « naturelle » ? La cause semble entendue d’avance : la mort, dira-t-on, celle qui vient plus ou moins directement de l’intérieur même de l’organisme, est une règle d’or du vivant, conséquence du vieillissement, cette lente dégradation qui est la marque inéluctable du passage du temps. Tout est dit, toute explication particulière semble superflue, et le sujet ne mérite rien de plus que quelques paragraphes consolateurs. « La mort est bien utile », nous chuchote le bon sens, « elle joue un rôle régénérateur, elle qui permet d’éliminer les individus les plus vieux (sous-entendez “les moins utiles”) au profit des plus jeunes ». Les ouvrages de vulgarisation scientifique cautionnent souvent de telles conclusions. Ainsi, et ce n’est là qu’un exemple parmi les plus récents, Jacques Ruffié évoquait-il « le puissant avantage sélectif [de la mort], non pas tellement au niveau individuel, mais au niveau de l’espèce », car « la sexualité et la mort qui l’accompagne assurent le changement 2  ».
Pourtant, un examen, même superficiel, du monde vivant révèle les premières failles de cette vision trop lisse. Quelle formidable variabilité dans les durées de vie ! L’espèce humaine, dont les représentants les plus robustes dépassent cent vingt ans, est bien lotie par rapport à la mouche, qui ne vivra pas plus de quelques semaines ou de quelques mois, sans parler de certains éphémères dont la vie adulte se compte en minutes. Mais nous restons loin des records de séquoias millénaires, ou, moins connus bien que plus impressionnants encore, des buissons de myrtilles sauvages, qui ont atteint… treize mille ans ! Les représentants de ces espèces sont pratiquement immortels, et il n’y a guère que la foudre ou la main du bûcheron pour mettre fin à leur existence. De tels exemples suggèrent que la mort naturelle pourrait bien ne pas être inscrite de toute éternité dans la nature même du vivant, et qu’en tout cas elle ne constitue nullement une nécessité inéluctable. Ils conduisent aussi à s’interroger sur la cause de la faveur exceptionnelle dont semblent jouir certaines espèces, qui ont réussi à mettre en place les mécanismes biologiques leur permettant de résister au temps sans jamais faiblir. Chez elles, un slogan comme « place aux jeunes ! » n’a décidément pas cours.
La notion d’universalité absolument nécessaire de la mort n’est pas la seule à se lézarder quand on examine notre sujet de plus près. Chemin faisant, nous serons amenés à remettre en cause d’autres idées reçues, telles que l’existence de liens obligés entre mort et sexualité, ou entre mort et complexité des organismes. Des organismes simples, qui se reproduisent sans sexualité par fission ou par bourgeonnement, peuvent en effet aussi vieillir et en mourir. Qui plus est, un tel destin n’est pas davantage la rançon du haut degré de différenciation qui caractérise les êtres multicellulaires. La levure de bière, bien qu’unicellulaire, suit tout de même une courbe de vieillissement très semblable à la nôtre…
Ces quelques exemples montrent qu’une approche biologique rigoureuse de la mort n’est possible qu’à la condition d’éviter toute tentation moralisatrice, en quête de justifications plus que d’explication. Nous découvrirons ainsi l’apport fascinant de la théorie de l’évolution à une telle approche, notamment à travers les réflexions du biologiste allemand August Weismann, il y a déjà plus d’un siècle. L’intérêt et la fécondité de ce cadre théorique n’ont commencé à être reconnus qu’à partir des années 1950. Aujourd’hui encore, malgré sa grande cohérence, et l’accumulation des données expérimentales qui plaident en sa faveur, il reste méconnu du grand public, voire des scientifiques qui travaillent dans d’autres domaines.
L’étude de la mort des organismes ne peut se concevoir sans une meilleure compréhension du fonctionnement des cellules, véritables unités de base du vivant. Pour nous en convaincre, observons à nouveau le séquoia. Son tronc est constitué de cellules vivantes uniquement sur les couches les plus externes, les plus récentes. L’intérieur, c’est-à-dire presque tout, est constitué de cellules mortes. Si un séquoia, en tant qu’individu, est âgé de plusieurs milliers d’années, aucune de ses cellules ne survit au-delà de quelques décennies ! Y a-t-il un lien entre cycle de vie cellulaire et cycle de vie des organismes ? Le débat sur ce terrain fut particulièrement vif. Ainsi, Alexis Carrel, pendant la première moitié du XX e siècle, affirmait que l’origine du vieillissement et de la mort n’était pas à rechercher au sein des cellules. Il prétendait, en effet, avoir montré que toute cellule était potentiellement immortelle, pourvu qu’elle fût séparée de l’organisme dont elle faisait originellement partie. Ce dogme de l’immortalité cellulaire ne fut abattu qu’au début des années 1960, quand Leonard Hayflick découvrit la sénescence cellulaire, qui se manifeste par une limitation intrinsèque du pouvoir de division des cellules. Il devenait alors légitime de rechercher les mécanismes du vieillissement sur des cellules en culture.
C’est à la même époque, en 1964, qu’apparaît l’expression de « mort cellulaire programmée », pour décrire un phénomène distinct, ressemblant au suicide concerté de groupes entiers de cellules. De nombreux auteurs l’avaient pourtant déjà observé, en passant, dès le milieu du XIX e siècle ! Ce désintérêt persistant a sans doute les mêmes racines que la fascination exercée par le dogme de l’immortalité cellulaire : comment la cellule, unité de base du vivant, aurait-elle reçu la mort en partage ? Il faudra encore attendre plus de vingt ans pour que les chercheurs mesurent l’importance de cette mort, pour qu’ils démontrent que ce suicide des cellules profite à l’organisme dont elles font partie. Il s’agit donc bien d’une mort qui est au service de la vie, notamment dans le développement embryonnaire, dans le système nerveux ou le système immunitaire. Mais elle peut aussi, en cas de dérèglement, menacer la vie, à travers le cancer, le sida ou des maladies du système nerveux. Au cours de la décennie écoulée, un champ entier de recherches s’est constitué, et l’explosion est telle que l’on a prédit, en plaisantant (à moitié ?), la création prochaine d’Instituts des sciences de la mort. Toutefois, personne ne peut affirmer aujourd’hui avec certitude que la mort cellulaire programmée, pas plus d’ailleurs que la sénescence cellulaire, joue un rôle direct dans le vieillissement et la mort des individus. Mais toutes les deux ont claireme

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