Les preuves embryologiques de l’évolution
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Description

Autant que la paléontologie, l’embryologie fournit de nombreuses preuves à l’appui de l’évolution des espèces.

La connaissance du mode d’action et de la répartition spatiale et temporelle des gènes du développement permet de dégager des mécanismes qui expliquent les modifications des programmes de développement embryonnaire pouvant mener à des innovations évolutives.

Le plan d’organisation des embryons de vertébrés est initialement très semblable dans les différents taxons, et les dissemblances morphologiques s’expliquent par des programmes ontogénétiques modifiés. On est donc bien loin de la loi biogénétique fondamentale de Haeckel, qui postulait que « l’ontogenèse résumait la phylogenèse ».

Stéphane Louryan dirige le Laboratoire d’Anatomie, Biomécanique et Organogenèse de la Faculté de Médecine de l’Université libre de Bruxelles où il y enseigne l’anatomie humaine et l’embryologie. Il est membre de l’Académie royale de Médecine de Belgique, a été président de la Société royale d’Anthropologie et de Préhistoire. Il a également été rédacteur en chef de la Revue Médicale de Bruxelles.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 6
EAN13 9782803105564
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0030€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

LES P REUVES EMBRYOLOGIQUES DE L'ÉVOLUTION
S L TÉPHANE OURYAN
Les preuves embryologiques de l’évolution
Académie royale de Belgique rue Ducale, 1 - 1000 Bruxelles, Belgique www.academieroyale.be
Informations concernant la version numérique ISBN : 978-2-8031-556-4 © 2016, Académie royale de Belgique
Collection L’Académie en poche Sous la responsabilité académique de Véronique Dehant Volume 80
Diffusion Académie royale de Belgique www.academie-editions.be
Crédits Conception et réalisation : Laurent Hansen, Académie royale de Belgique
Couverture : © Lonely, Shutterstock
Publié en collaboration avec
Publié en partenariat avec l'Académie royale de Médecine de Belgique
Avant-propos
Le titre de cet opuscule constitue un hommage appuyé à l’ouvrage de Jean-Pierre Lehman (1914-1 1981),Les preuves paléontologiques de l’évolution, qui a guidé nombre de nos réflexions depuis les années où nous fréquentions l’école secondaire. Il est respectueusement dédié au Professeur Jean Milaire, qui, outre de nous avoir familiarisé avec la discipline embryologique, a fait naître un profond intérêt pour les liens qu’entretient cette discipline avec l’anatomie comparée. Une pensée nous accompagne au fil de nos lignes : elle est consacrée au Professeur Jean-Jules Pasteels (1906-1991) que nous avons connu au Laboratoire d’Anatomie et Embryologie Humaines de la Faculté de Médecine de l’Université libre de Bruxelles, mais hélas pas assez longtemps. Ses profondes connaissances en embryologie comparée furent autant d’étincelles qui entretinrent notre intérêt pour cette discipline. Nous serons de même toujours redevable à celui qui nous a enseigné de manière si dynamique les premiers éléments de biologie, en première candidature, le Professeur Raymond Rasmont. Que soient également remerciées nos deux attentives relectrices, le Professeur Martine Vercauteren et le Dr. Nathalie Vanmuylder. En ces temps difficiles, où le fondamentalisme religieux refait surface, et où les créationnistes de tous ordres reçoivent parfois des tribunes complaisantes pour débiter leurs fadaises, il est bon de mettre à la disposition du grand public les preuves les plus déterminantes à l’appui du transformisme : c’est dans le développement embryonnaire que se situe leur source.
Introduction
Si la notion d’évolution des espèces avait déjà été envisagée par divers penseurs de l’Antiquité, il aura fallu les travaux de Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829), et ensuite de Charles Darwin (1809-1882) pour que ce qu’on appelait alors le transformisme acquière des fondements théoriques, basés sur des observations soigneusement analysées. Elle se heurta immédiatement au « fixisme », notamment défendu par Georges Cuvier (1769-1832), illustre naturaliste, qui lui opposait des considérations savantes, dûment documentées par son immense érudition paléontologique. Cependant, l’opposition n’était pas uniquement fondée sur des données biologiques. En effet, un puissant mouvement religieux, fondé sur une lecture littérale des Écritures, s’opposait à l’idée que les espèces, dont l’homme, eussent évolué les unes à partir des autres, et imposait une vision qui supposait une création simultanée de toutes les espèces vivantes. La découverte des fossiles, loin de faire taire ces oppositions, était rapportée soit aux effets du déluge, soit plus habilement à diverses catastrophes successives ayant jalonné les époques géologiques. Telle était en effet la théorie de Cuvier, dont on sait maintenant, à la lumière de ce que l’on connaît des grandes extinctions de masse, qu’elle n’était pas dénuée de tout fondement. Les découvertes des lois de la génétique, dont les architectes principaux furent Gregor Mendel (1822-1884), August Weismann (1834-1914), Thomas Hunt Morgan (1866-1945), et plus récemment l’élucidation de la structure de l’ADN par James D. Watson (né en 1928) et Francis Crick (1916-2004), et la naissance de la biologie moléculaire grâce à Jacques Monod, ont pu mener à une synthèse dite « néodarwinienne » (Theodosius Dobzhansky, 1900-1975 ; George Gaylord Simpson, 1902-1984 ;…) cohérente, qui conférait au transformisme une base moléculaire solide, dont les deux piliers étaient la mutation et la sélection naturelle et qui démontrait l’inanité de la théorie de la transmission des caractères acquis, qui faisait la base de la théorie lamarckienne et faisait aussi partie des mécanismes évoqués par Darwin. Les découvertes paléontologiques et la compréhension progressive des propriétés de l’ADN, et de son mode d’expression, permettaient ainsi de générer un modèle heuristique rendant compte de l’évolution des espèces, même si de grandes parties du processus demeuraient obscures, notamment l’apparition parfois « rapide » (à l’échelle zoologique) de grands changements structurels (macroévolution). Les pays francophones ont accusé un certain retard dans l’adhésion à la synthèse nouvelle, notamment en raison de la persistance d’une vision « néolamarckienne », justifiée soit par un certain nationalisme, soit par un cartésianisme obtus à tendance mécaniste, refusant le point de vue probabiliste et le rôle du hasard, soit plus légitimement par l’observation attentive de certains processus demeurés inexpliqués par la synthèse darwinienne. Parmi ceux qui cultivèrent de sérieux doutes sur la puissance heuristique du néodarwinisme, on trouvait l’illustre zoologiste français Pierre-Paul Grassé (1895-1985) et le Belge Paul Brien (1894-1975). Si les processus de mutation et de sélection naturelle pouvaient expliquer à leurs yeux les modifications intraspécifiques, ils n’étaient pas en mesure de constituer un modèle correct pour la « macro-évolution » et la genèse de nouvelles espèces. L’affaire Lyssenko, en URSS, et l’influence notoire du communisme en France, ont contribué également à diffuser des théories lamarckiennes mettant à l’honneur la transmission des caractères acquis (mieux compatible avec la « foi » marxiste que le rôle du hasard). Ainsi, certains biologistes de renom, comme Marcel Prenant (1861-1927), s’y sont-ils laissé prendre pendant quelque temps, avec l’appui non négligeable mais très mal documenté du poète Louis Aragon ! Il n’en demeurait pas moins que s’il existait de grandes discordances quant aux mécanismes du processus de l’évolution des espèces, celle-ci ne faisait plus de doute dès le début du e XX siècle. Ceci était bien entendu sans compter sur une hostilité religieuse profonde aux théories
transformistes, quels qu’en fussent les fondements théoriques. On sait quelle fut la réaction fortement négative des évêques anglais dès la publication de L’origine des espèces, de Charles Darwin. Cependant, progressivement, les autorités religieuses adoptèrent une attitude de concordat avec les nouvelles théories, tant les faits étaient démonstratifs. Dans les milieux religieux éclairés, la lecture littérale de la Bible fut avantageusement remplacée par une vision symbolique, et les périodes géologiques remplacèrent les jours de la création. On ne saurait à cet égard assez louer le génie de Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788), précurseur remarquable qui, s’opposant aux visions bibliques traditionnelles, tenta de déterminer expérimentalement l’ancienneté de la Terre, et qui, s’opposant à la rigidité de la classification de Linné, lui substitua la notion de variabilité et jeta assez discrètement les bases du principe transformiste. Tout semblait donc être dit. Mais la résurgence plus récente des fondamentalismes religieux, de quelqu’origine qu’ils fussent, remit à l’ordre du jour une vision fixiste des espèces, directement inspirée des textes sacrés. Le créationnisme pur et dur releva donc la tête, à la fois sous l’influence des protestants évangélistes américains et d’un islam fondamentaliste, avec à son service des moyens financiers et humains considérables. Ailleurs, le dessein intelligent, vision téléologique de l’évolution humaine supposant que l’évolution est dirigée de manière à aboutir à l’homme, forme plus sournoise encore du créationnisme, fut largement diffusé, avec la complicité d emediapeu éclairés sur les questions scientifiques, ou plus simplement mus par un souci d’audience. Il faut notamment citer ici Anne Dambricourt-Malassé, paléontologue illuminée par des visions teilhardiennes, qui diffuse largement des considérations obscures et prophétiques, inspirées par les outrances et autres falsifications. La diffusion de telles idées est favorisée par le peu de culture scientifique du grand public, et la qualité fort inégale de l’enseignement des sciences dans l’enseignement secondaire. Il y a donc là un grand danger, qui est celui de la légitimation d’opinions non fondées sur la réalité des faits, et inspirées par des convictions religieuses qui n’ont rien de commun avec des réalités scientifiques avérées. Plus grave encore, leur succès témoigne de l’ignorance des méthodes propres de la recherche scientifique, qui supposent la confrontation de faits observés avec des modèles théoriques en perpétuelle mutation. Parallèlement à ce mouvement, l’embryologie a progressivement acquis ses lettres de noblesse. e Encore prisonnière au XVIII siècle de la théorie de la « préformation » (le spermatozoïde contient l’ensemble des descendants emboîtés les uns dans les autres), elle bénéficia de manière majeure de l’invention du microscope, et les observations commencèrent à s’accumuler, qui menèrent, elles aussi, à la genèse de grandes théories qui eurent leur heure de gloire, mais aussi de déclin. Ainsi la réalité des grands « feuillets » (ectoderme, mésoderme, endoderme) fut-elle démontrée par Casper Friedrich Wolff (1733-1794). Le lien entre embryogenèse et phylogenèse (genèse des espèces) fut successivement abordé par Johann Friedrich Meckel (1781-1833), Antoine Étienne Serres (1786-1868) et surtout Ernst Heinrich Hæckel (1834-1919). Ce dernier, observant de jeunes embryons de diverses espèces (dont il avait quelque peu « forcé » les ressemblances dans un dessin demeuré célèbre), énonça la « loi biogénétique fondamentale », ou « théorie de la récapitulation », qui affirmait que le développement embryonnaire résume l’évolution des espèces. Autrement dit, un embryon de tétrapode, par exemple, passe par un stade « poisson » puisqu’il possède des arcs et des fentes branchiales. En dépit du caractère apparemment heuristique intéressant de cette proposition (qu’on entend parfois encore énoncer actuellement dans la presse de vulgarisation, voire dans de mauvais cours), elle s’est avérée totalement erronée et a détourné les embryologistes de la recherche pourtant nécessaire de la causalité des phénomènes du développement embryonnaire. On sait en effet qu’il convient de considérer que tous les embryons de vertébrés bénéficient d’un plan d’organisation commun, et l’évolution agit en modifiant la destinée d’une ébauche utilisée chez l’ancêtre à d’autres fins. Ainsi, il est totalement faux de prétendre que les embryons de tétrapodes ont des branchies : tous les embryons ont des arcs branchiaux (ou viscéraux) séparés par des fentes externes et des poches internes, mais seuls les poissons en feront des branchies en connectant les fentes avec les poches correspondantes. Les tétrapodes en font un autre usage, sur lequel nous reviendrons. Les progrès ultérieurs de l’embryologie expérimentale, de l’étude descriptive des anomalies congénitales (tératologie), initiée par Étienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844), de la
tératologie expérimentale (dont le pionnier futÉtienne Wolff, 1904-1996), et plus récemment l’apparition d’une discipline mariant embryologie et biologie moléculaire (la biologie du développement) permirent de découvrir la nature morphologique, histochimique, moléculaire et génétique des processus de base de la morphogenèse et offrirent de nouveaux ponts très féconds reliant l’embryologie aux processus de l’évolution. Il est impossible de ne pas citer ici l’embryologiste belge Albert Brachet (1869-1930), qui a offert à la communauté scientifique une œuvre magistrale d’embryologie comparée des vertébrés, qui constitue toujours une base de données incontournable. Son œuvre fut poursuivie de manière remarquable par ses continuateurs Albert Dalcq (1893-1973) et Jean-Jules Pasteels (1906-1991), spécialiste du processus de gastrulation (voir chapitre 1) au sein de nombreux groupes zoologiques, et également par son fils Jean Brachet (1909-1988), le fondateur de l’embryologie chimique. L’embryologie ne se limite désormais pas aux études descriptives, mais inclut des expériences de microchirurgie embryonnaire, la révélation de substances chimiques pendant le développement, et plus récemment apparues l’inactivation ou la surexpression de gènes par manipulation de l’ADN, le tout chez les amphibiens, les oiseaux ou les rongeurs, dans le respect des règles relatives au bien-être animal. Par ailleurs, l’étude des gènes du développement chez la mouche du vinaigre, la drosophile, s’avère extrêmement intéressante si on la confronte aux données correspondantes chez les embryons de vertébrés. Si embryologistes et paléontologistes n’ont pas toujours interfécondé leurs champs e réciproques, le processus de dialogue s’est amorcé durant la seconde moitié du XX siècle, et a fini par aboutir à une discipline appelée « évo-dévo ». Il faut cependant reconnaître qu’elle demeure très théorique, fort quantitative, et qu’elle s’est assez éloignée du cadre morphologique initial, et son vocabulaire est peu perméable aux profanes. Son essor a bénéficié de la nouvelle vision de la classification appelée « systématique phylogénétique », fondée par Willi Hennig 2 (1913-1976), et basée sur l’analyse d’un très grand nombre de caractères , considérés comme « ancestraux » (ou plésiomorphes) ou « dérivés » (ou apomorphes), et qui a renouvelé la classification des espèces, avec l’appui de la systématique moléculaire, rendant caduque l’antique répertoire de Linné. Il est étonnant et déplorable, au passage, que l’enseignement secondaire n’eût choisi de l’enseigner que fort récemment. Nous nous proposons, dans les lignes qui vont...
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