Adophobie : Le piège des images
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Description

Êtes-vous adophobe ? À l'ère du numérique, nombre d’adultes confrontés à des images mettant en scène la violence et la sexualité des adolescents s’inquiètent, convaincus que les nouvelles générations sont à la fois menacées et menaçantes. Pourtant, si le sentiment d’insécurité est bien palpable, la peur qui en découle ne résiste pas à l’épreuve des faits. Portés par les émotions plutôt que par la rationalité, impressionnés par les images plutôt que par les recherches et déroutés par ce qui est rendu visible sur nos écrans, les parents, les professionnels et les spécialistes tombent dans le piège de l’adophobie… et ils ont peur à la fois pour les ados et de leurs ados.
À partir d’un examen de faits médiatisés depuis l’avène­ment de YouTube et de Facebook — du happy slapping à la propagande djihadiste, en passant par l’hypersexualisation et les sextos —, cet essai explore l’hypothèse selon laquelle l’adophobie a aujourd’hui un terrain fertile pour fleurir : un monde débordant d’images.
Jocelyn Lachance est chargé d’enseignement à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (Laboratoire CNRS UMR-Passages). Il est également membre de l’Observatoire Jeunes et Société de Québec.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 28 novembre 2016
Nombre de lectures 3
EAN13 9782760637214
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0300€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Adophobie
Le piège des images
Jocelyn Lachance


Les Presses de l’Université de Montréal
La collection Parcours numériques est accessible gratuitement en édition augmentée sur parcoursnumeriques-pum.ca
Illustration: © Shutterstock/Nataleana Mise en pages: Chantal Poisson ePub: Folio infographie Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Lachance, Jocelyn Adophobie: le piège des images (Parcours numériques) ISBN 978-2-7606-3719-1 1. Médias et adolescents. 2. Violence chez l’adolescent. 3. Adolescents – Sexualité. I. Titre. II. Collection: Parcours numériques. HQ799.2.M35l32 2016 302.230835 C2016-942096-5 Dépôt légal: 4 e trimestre 2016 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2016 ISBN (papier) 978-2-7606-3719-1 ISBN (ePub) 978-2-7606-3721-4 ISBN (PDF) 978-2-7606-3720-7 Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).


Table des matières
Avant-propos
Introduction
PARTIE 1
ADOPHOBIE ET VIOLENCE
La médiatisation du happy slapping : les preuves visuelles de la violence
Jackass : de l’écran à la rue… à l’écran
Binge drinking : les formes inédites du risque
L’exploit des neknominés : la nouvelle visibilité du risque
Quand des adultes popularisent des images proscrites
Quand des adultes ferment les yeux
La nouvelle visibilité de l’intimidation
Le contrôle des espaces numériques
L’adophobie policière
Le djihad en images
Des adultes face à la mort
De la mobilité métaphorique des images
PARTIE 2
ADOPHOBIE ET SEXUALITÉ
De l’hypersexualisation
Des skins parties «sans limites»
Technophobie pour adolescentes: du téléphone aux sextos
Le slut-shaming : le spectacle de l’autorégulation
La dramatisation des selfies
Les dangers de la pornographie
Penser l’agentivité des adolescentes
De l’adophobie à l’adologie
Ado-techno-xéno-andro-homo-phobie(s)
L’élargissement de la catégorie d’addiction
La démultiplication bénéfique des corps
OUVERTURE
LE REFUS DE L’ADOPHOBIE
La violence de l’adophobie
Refuser l’adophobie dans un monde d’images
Nous nous intéressons rarement aux ados. Nous nous intéressons à ce qui nous préoccupe de l’adolescence.
ADOPHOBIE. Nom féminin. Néologisme provenant de la réunion des termes «ado» – celui ou celle qui est dans l’âge de l’adolescence – et de «phobie» – aversion très vive, irraisonnée ou peur instinctive. L’adophobie est la peur ancestrale des adultes à l’égard des plus jeunes. Dans le contexte contemporain, cette peur ancestrale se développe particulièrement à l’égard des adolescents et des adolescentes. L’adophobie se définit plus généralement comme une crainte de ceux «qui sont en train de grandir». Adophobe: qui ressent de la peur ou de l’aversion à l’égard des adolescents. Antonyme: adophilie.


AVANT-PROPOS
Pour comprendre un phénomène, il importe d’abord de le désigner. Pour dénoncer une attitude, il importe de la définir. Il fut un jour important, crucial même, d’inventer le terme xénophobie pour que des citoyens puissent la reconnaître et la signaler, pour que des institutions sortent de l’indifférence afin de la combattre. Il s’avérerait même difficile de repérer les paroles et les gestes xénophobes qui se répandent autour de nous sans mot pour en penser l’existence et en analyser les conséquences. Si aujourd’hui l’idée nous paraît banale, il reste que le mot xénophobie, bien connu, n’a pas toujours existé, ni dans la bouche des hommes et des femmes ni dans la conscience humaine. Ainsi, la peur de l’étranger existe depuis longtemps, mais la lutte contre elle s’est engagée depuis peu. L’histoire fut semblable lorsque des individus refusèrent de la même façon la misogynie et l’homophobie.
Adophobie est un mot qui m’est cher. Je l’ai employé pour la première fois dans un numéro de la revue Cultures et Sociétés dans lequel avaient été notamment conviés le psychologue et psychanalyste Alex Raffy, le pédopsychiatre Patrice Huerre et le psychiatre Daniel Marcelli. La réflexion s’est poursuivie dans Étudier les ados: initiation à la socioanthropologie (Presses de l’École des hautes études en santé publique, 2014 1 ), coécrit avec Thierry Goguel d’Allondans. Travaillant sur la question de l’adolescence depuis plus d’une dizaine d’années, je fais régulièrement face – comme nombre de mes collègues – à des déclarations, à des discours, à des paroles, mais aussi à des textes, à des articles et à des images qui témoignent d’une adophobie grandissante. Qu’elle prenne la forme d’une stigmatisation de la jeunesse contemporaine, d’une condamnation de ses comportements ou même d’accusations injustifiées à son égard, l’adophobie repose sur notre peur ancestrale non pas de l’étranger, mais de «l’étrangeté adolescente». Cet essai entend non seulement la décrire, mais surtout la comprendre. L’adophobie apparaît alors comme la résistance collective d’un nombre important d’adultes se remettant difficilement en question et saisissant tout aussi difficilement leur responsabilité dans le constat qu’ils font du monde et qu’ils reconstruisent en permanence. À l’ère du numérique, cette peur s’amplifie au contact d’images, présentées comme des preuves visuelles confirmant apparemment que les adultes ont raison d’avoir peur.
L’étymologie du mot «adolescent» ( adolescere ) rappelle que nous parlons bien de celui ou de celle qui «est en train de grandir». L’adophobie désigne donc la peur de ces individus – nos enfants, nos élèves, ce public avec lequel nous travaillons parfois dans des institutions diverses. Elle cible ces adolescents qui, par définition, vivent des changements profonds et incontournables dans leur vie: chacun d’entre nous, quels que soient l’origine, l’âge, le sexe, le milieu social, est amené à traverser cette période de transformation corporelle, relationnelle et identitaire. L’adophobie, c’est donc une peur non seulement des adolescents et des adolescentes, mais aussi de l’adolescence qui nous habite, silencieuse et tapie dans notre mémoire. Il n’existe pas de groupes d’adophobes, des personnes dont nous aurions le réflexe de nous différencier, mais plutôt des actes et des paroles adophobes, qui sont parfois les nôtres.
L’objectif de ce livre est d’insister sur certains comportements et discours, sans oublier qu’au quotidien, de nombreux parents et professionnels de l’adolescence – dont le personnel scolaire et les travailleurs sociaux – combattent l’adophobie en s’engageant sur la voie de la compréhension et en se détournant volontairement de celle qui mène à la peur et à la stigmatisation. Il ne s’agit donc pas de culpabiliser des générations d’adultes, mais bien d’examiner des situations qui ne peuvent plus faire l’économie d’une remise en question de l’attitude de certains d’entre eux. Ainsi, si l’adophobie – comme la xénophobie – se décèle clairement dans des paroles et des gestes sans équivoque, elle s’exprime aussi parfois, de façon insidieuse, dans des routines convenues, des lieux communs, rappelant que nul n’en est à l’abri.
Finalement, je tiens à remercier chaleureusement Louis Mathiot et Sophie Limare pour leur relecture attentive de cet ouvrage.


1 .La bibliographie complète se trouve sur le site de Parcours numériques, ainsi que sur le site des PUM à: www.pum.umontreal.com/catalogue/adophobie .


INTRODUCTION
Banals, mais sublimes, familiers, mais inquiétants, tels sont nos adolescents d’aujourd’hui et de demain, d’ici et d’ailleurs… On dit les aimer; souvent, ils nous intriguent, et trop souvent, ils nous font peur. Les regards sur nos adolescents doivent être interrogés; l’évolution des savoirs et des manières de faire avec eux, aussi.
Marie-Rose Moro, Le Monde , 30 août 2010
Les adologues, c’est-à-dire les spécialistes de l’adolescence, provenant de différents champs disciplinaires, répètent souvent que la méfiance à l’égard des générations montantes n’est pas nouvelle. Socrate et Platon ont tenu en leur temps des propos durs à l’égard des jeunes. L’adophobie ne semble pas dater d’hier. Toutefois, dans le contexte hypermoderne de la multiplication des images, une nouvelle donnée change significativement notre rapport à la jeunesse. Dans ce monde où les ados ne sont plus les spectateurs passifs de mises en scène produites par des adultes, mais, au contraire, des producteurs et des diffuseurs d’images, nos sociétés assistent depuis peu à l’expression de leurs comportements non plus seulement en actes et en paroles, mais également à travers la vitrine des écrans. De l’agression filmée à l’insulte proférée sur Facebook en passant par ces corps nus photographiés, puis propagés via les téléphones intelligents, des adultes, des citoyens, des parents et des professionnels sont alors les témoins, partiels et provisoires, d’une violence et d’une sexualité adolescentes. Et devant les émotions que ces images provoquent et les craintes qu’elles réveillent, de nombreuses personnes se retrouvent désarmées, en quête légitime de réponses.
L’adophobie se manifeste dans un monde où le sentiment d’insécurité s’est imposé, puis banalisé. La peur du chômage, d’attentats terroristes, d’épidémies et de catastrophes naturelles fait en sorte que depuis plus d’une vingtaine d’années, la plupart des pays occidentaux ont connu une montée substantielle du sentiment d’insécurité, donnée relativement nouvelle que nombre de politiciens ont su exploiter à leur avantage. Les adolescents hypermodernes font partie des victimes silencieuses de ce sentiment qui a gagné nos sociétés et qui s’est immiscé dans nos foyers. Pour David Finkelhor, du Crimes against Children Research Center de l’Université du New Hampshire, les don

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