Aude ou mémoires obstruées
179 pages
Français

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Aude ou mémoires obstruées , livre ebook

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Description

Une adolescente se trouve au milieu d’un héritage après la disparition brusque de son père, dans un système matriarcal, choquant les esprits.
Car elle veut muer ce matriarcat en patriarcat.
Car elle est une femme et une femme ne parle pas d’héritage en leur milieu
Car elle n’a que 17 ans et à cet âge on jouerait encore à la poupée…
Au milieu d’un choc de culture…

Informations

Publié par
Date de parution 22 juin 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782312082004
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Aude ou mémoires obstruées
Don Fils Bonou
Aude o u mémoires obstruées
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
© Les Éditions du Net, 2021
ISBN : 978-2-312-08200-4
Chapitre I
Une heure qu’elle était assise là, sur l’une des racines de ce bout arbre dont il ne restait plus que cela, noires de tentatives d’incinération (il en disposait de quatre, toutes dans le même état), la pauvre jeunotte avait le cœur en étreint et la gorge en nœud.
Avec le temps, la pluie, le vent, le soleil et la fréquence de leur utilisation par les noctambules qui se soulageaient les jambes en s’y asseyant, ces racines avaient fini par prendre une lueur de propre, surtout la nuit, bluffant les passants étrangers.
Une heure qu’elle perdait le temps sur une de ces racines, qui faisaient partie intégrante du paisible et sacré décor de ce paysage rural qui en avait fait une parfaite adoption ; elles ont vu passer déjà plusieurs générations dont celle de sa grand-mère et de sa mère sans que personne ne songe vraiment à les faire disparaître, et personne ne pensait à elle.
Une heure-là, sur ces racines, qui même si elles gênaient la maison derrière laquelle elles étaient et de peu la rue principale du village, elles aidaient tout le monde en servant de siège inopiné, les yeux dans le vague, le monde semblait s’arrêter pour elle.
Pour les habitants de ce village qui connaissaient ces racines comme les lignes de leurs paumes, ils savaient que le blanc y était formellement interdit. Aude pourtant en blanc, s’y était assise. Ce soir-là, le blanc qu’elle portait était moins important que ce qui lui arrivait, moins important que la communion des sorts qui s’abattaient sur elle. En temps réel et dans tous ses états et ses capacités, surtout intellectuelles, jamais elle le ferait. En plus seule à cette heure de la journée, où il faisait une nuit noire, d’un noir absolu, surtout pas. Car la petite Aude était une peureuse faite, incapable seule d’aller faire ses besoins à seulement vingt mètres derrière la maison en plein jour. Et pourtant, La jeune fille vivait bien à cheval sur sa coutume traditionnelle natale et de la culture de la grande ville où elle faisait ses instructions, qui peu à peu, semblait l’arracher à ses racines. En effet la peur sienne, ma foi, n’était pas des ruraux.
Mais cette nuit-là, elle n’avait peur de rien : ni de ces soit disant âmes, autres que humaines, maléfiques et invisibles, soit disant errant à ces heures, ni la soit disant maison hantée à sa droite, à deux mètres à peine de là où elle était assise, encore moins de ce crépuscule à couper le souffle que ses yeux avaient fini par percer, par habitude et par le temps là.
Pendant une, de temps en temps, une larme lui perlait sur la joue, presque toujours la même, la gauche, puisqu’elle avait penché la tête de ce côté-là, soutenue par l’épaule en fonction avec la main posée à côté d’elle, sur la même racine, elle pensait à ce qu’elle ne vivrait plus à jamais.
Dans cette lourdeur et cette tristesse qui l’avait figée, elle semblait l’entendre, dont la voix était désormais devenue lointaine, rire de joie. Elle le revoyait, presque flou, gesticuler sous l’effet de la colère sans que personne ne le provoque vraiment, revenir des champs avec un régime de banane de chaque côté d’un bout d’arbuste pausé sur l’épaule ou étendu dans sa chaise, au repos, à l’ombre sur la terrasse. Aude l’entendait conter une de ses histoires à la fin de quoi, jamais ne manquait une morale constructive et fortifiante, raisonner au cours d’une réunion où de funérailles, et n’en avait pas peur, au contraire. Moins nettes et flous donc, ces images enjouaient, malgré tout, la pauvre jeune fille d’à peine dix sept ans, qui désormais devait s’en contenter ; c’était cela ou rien. Car les présentes funérailles, celles que l’on préparait, étaient celles de l’homme qu’elle aimait le plus au monde, son père qui depuis les aurores, le nom ne serait conjugué qu’au passé, ne serait cité que dans les souvenirs récents, le temps de l’oublier à jamais.
De temps à autre, d’autres larmes ruisselaient dans les précédentes empruntes ; Elle pensait à l’avenir proche, dans la tourmente du matriarcat, la lutte entre les neveux de feu son père, et elle et les siens, pour la plus belle part de de ses œuvres, de ses labeurs. Certes elle était femme et les femmes dans la tradition stricte, ne parlaient pas de ces choses-là ; son cadet n’était encore qu’un bambin ; mais elle, elle y pensait, car « tout devait de droit », lui revenir à elle et ses frères et à sa mère, civilement liée à son père, qui avait trainé et trimé avec celui-ci, dans le but de se faire une vie et de vieux jours meilleurs et aussi offrir une vie décente à leurs enfants. Elle voyait déjà la discussion âpre qui les opposerait, aux pieds de la dépouille de son père encore exposé sur son lit mortuaire, comme le voulait et l’obligeaient la coutume et la tradition.
Elle se voyait plus loin dans le temps, avec les siens : sa mère, son cadet de dix ans et la benjamine d’à peine sept an, grattant désormais la misère, vivant de mendicité dans l’ombre de ces rapaces, comme l’exigeait toujours ces maudites coutumes et traditions. Et cela, rien qu’à y penser, elle le supportait moins que beaucoup d’autres supplices. Déjà, le mépris, la haine et la rengaine la rongeaient. Il n’était pas question de leur laisser un sous. Sa décision était prise, là. Elle ferait tout pour que leur revienne leur dû, mais dans un combat noble. Dans l’ignorance totale que ce genre de combat était loin de n’être que physique et de mots.
Chez elle, personne ne la cherchait, personne ne songeait à elle ; sa mère était trop accablée, plus soucieuse comme elle car toute autant surprise par les événements. Une personne pourtant le faisait, il ne venait pas de chez elle, il venait de la cour qui faisait dos à la sienne. Pierrick avait instinctivement décidé de voir à leur lieu habituel de rendez-vous, elle y était. Et où d’autre ? Il la connaissait mieux que quiconque.
L’ombre qui s’approchait ne lui donnait aucun frisson ; elle ne savait pas qui c’était, mais attendait puisqu’elle venait à elle. Une fois proche, il lui posa la main sur la tête sans même qu’elle ne tique, la caressa puis s’assit à côté d’elle, qui lui fit dans un geste de leur routine, un peu de place. Enfin une épaule sur quoi reposée sa tête qui semblait tombée de fatigue. À son contact, elle avait sangloté un coup et s’était rassérénée sous la tendresse des caresses de ses mains, savantes de tous ses points sensibles et savantes d’elle. Elle espérait qu’il vienne, c’était le seul à savoir et à pouvoir la calmer dans toutes les circonstances, encore plus dans celle-ci où elle avait besoin de quelqu’un, de lui. Pierrick devait le savoir, il était venu. Il savait aussi que point n’était de parler. Elle avait certes besoin de lui, mais elle avait surtout besoin de silence. Ils étaient assez proches pour assez se connaître, pas besoin de mots, les gestes suffisaient. Car ils étaient complices, ils étaient amoureux.
Après un moment d’entretien de ce silence tant expressif pour eux, Pierrick se leva, prit la main de sa belle et l’aida à se lever à son tour. Guidée, Aude obéit sans autre geste de plus, elle savait où ils partaient ; chez lui. C’était son deuxième chez elle, c’était l’endroit après chez elle où elle se sentait mieux. Elle avait salué et dans cette cour où l’on faisait encore un peu semblent attention à elle, on lui rendit son salut. Pierrick avait cherché et trouvé le seul banc bancale non encore occupé, l’avait collé au mur pour ne pas qu’il les laisse à plat sur le sol et avait invitée Aude à s’asseoir. Elle Se posa à côté de lui, et tous les deux, adoptèrent la position de toute à l’heure, celle de sur la racine. Elle pleurait à la dérobée, mais elle pleurait. La douleur devenant intenable, insoutenable, persistante et lourde à seule la supporter, elle finit par éclater, par extérioriser ce mal qui prenait de la place en elle au fil des heures et des pensées. C’était tel que seul, Pierrick n’arrivait plus à la calmer. Kanga, le frère aîné de celui-ci, se leva au secours de l’adolescent, mis à mal par cette inhabituelle circonstance. « Calme-toi Aude si tu ne veux pas être malade ! Il y a de cela dix heures que tu pleures ! Tu es l’aînée, les autres te regardent et ont besoin de toi. Il te faut prendre ton courage et tes responsabilités pour les soutenir. Penses surtout que ta mère a besoin de toi, à présent, plus que jamais. » : Lui avait-il murmuré en lui tenant la main. Avec beaucoup d’effort, elle ralentit progressivement la cadence puis rompit définitivement.
Il avait raison Kang

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