De la violence I
138 pages
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De la violence I , livre ebook

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Description

Comment la violence se met-elle au service de la religion ? Quel usage politique peut-on faire de la cruauté ? Par quels biais les logiques de haine aboutissent-elles au massacre de populations entières ? Telles sont quelques-unes des questions que pose ce livre à travers des réflexions sur la guerre civile en Colombie, l’épuration ethnique dans l’ex-Yougoslavie, le génocide des Rwandais tutsi, mais aussi la Bible, le droit musulman, la médecine ou encore le pouvoir. Il privilégie une approche pluridisciplinaire pour cerner et comprendre ce qui fait basculer les sociétés dans la folie destructrice. Françoise Héritier est professeur honoraire au Collège de France, où elle a dirigé le Laboratoire d’anthropologie sociale. Elle a publié Les Deux Filles et leur mère et Masculin/Féminin I et II. Avec les contributions d’Étienne Balibar, Maurice Bloch, Daniel Defert, Baber Johansen, Bernhard Lang, Véronique Nahoum-Grappe, Daniel Pécaut, Jean-Pierre Peter, Claudine Vidal.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 24 mars 2005
Nombre de lectures 1
EAN13 9782738188335
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1100€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Séminaire de FRANÇOISE HÉRITIER
DE LA VIOLENCE
 
 
Du même auteur chez odile jacob
Les Deux Sœurs et leur mère , 1994.
Masculin/Féminin. La pensée de la différence , 1996.
Contraception : contrainte ou liberté ? (sous la dir.) (avec Étienne-Émile Baulieu, Henri Leridon), 1999.
De l’inceste (avec Boris Cyrulnik, Aldo Naouri), « Poches Odile Jacob », 2000.
Masculin/Féminin II. Dissoudre la hiérarchie , 2002.
Corps et Affects (sous la dir.) (avec Margarita Xanthakou), 2004.
© Odile Jacob, 1996, mars 2005 15, rue Soufflot, 75005 Paris
ISBN : 978-2-7381-8833-5
www.odilejacob.fr
Table

Avant-propos
la réflexion
Violence : idéalité et cruauté
La violence entre pouvoirs et interprétations dans les œuvres de Michel Foucault
De mon incrédulité quant à la pertinence de la question
Foucault historien de l’adoucissement des formes de pouvoir
Violence et interprétation
La question de la résistance dans l’œuvre de Foucault
Éthique et esthétique de l’existence
Vérité et torture : ius commune et droit musulman entre le Xe et le XIIIe siècle
La violence au service de la religion : de quelques formes élémentaires d’agression dans la Bible
La violence au service du culte légitime et de la discipline religieuse
La violence de l’imprécation contre les ennemis
La « consommation » des jeunes hommes chez les Zafimaniry de Madagascar
La violence dans les rituels malgaches
Les Zafimaniry
Sexe et âge chez les Zafimaniry
La jeunesse zafimaniry
La violence et la vitalité des jeunes hommes
La « construction » des jeunes hommes
La force antisociale des jeunes hommes
La « consommation » des jeunes hommes
De la construction des jeunes hommes au rituel
Réflexions sur la violence en Colombie
Sur le contexte de la violence
La division politique de la société
La précarité de l’État-nation
La faiblesse des acteurs sociaux
La Violencia des années 1946-1964
Les formes d’imposition du critère « ami-ennemi »
L’hétérogénéité des dimensions de la violence
La mise en scène de la cruauté
Sur la violence actuelle
Une division « ami-ennemi » à validité limitée
Les interférences entre les protagonistes de la violence et la complexification des logiques de la violence
Allégeances et réseaux
Les formes de la mort
Sur les représentations sociales de la violence
L’usage politique de la cruauté : l’épuration ethnique (ex-Yougoslavie, 1991-1995)
Cruor = sang
Le choix de la cruauté
Violence et cruauté
Le programme de la cruauté
La figure du cruel
L’usage politique de la cruauté extrême
Le génocide des Rwandais tutsi : cruauté délibérée et logiques de haine
La force des préjugés sur l’Afrique
L’ethnie existentielle
Le génocide
Infliger des souffrances extrêmes
Tuer devant tous
Tuer le proche
Faire délibérément souffrir
La pratique collective de l’extrême cruauté
Connaissance et oblitération de la douleur dans l’histoire de la médecine
Témoignages
Des approches multiples
Une réserve qui vient de loin
Ressources du langage
Un précurseur
Résistance
Rester conscient
Débat
Une inattention durable
Déni, sacralité, commodité
Les auteurs
Avant-propos
 
Les textes ici présentés, qui traitent de la violence, ont été prononcés sous forme d’exposés dans le cadre du séminaire que je tiens au Collège de France, entre janvier et mars 1995. Après plusieurs années pendant lesquelles ce séminaire était consacré à des questions de parenté et d’alliance, et sous la double pression de l’histoire la plus contemporaine et de recherches menées sur la notion d’identité, il m’a semblé utile d’aborder le thème de la violence et de le traiter sur plusieurs années sous différents angles.
Quatre approches ont été utilisées en 1995. Une approche philosophique tout d’abord. Nous sommes redevable pour cela à Étienne Balibar qui, à partir de l’usage et de la signification ambigus du mot allemand Gewalt , traduit selon les circonstances par « violence », « pouvoir » et « force », traite d’une polysémie qui excède d’emblée les limites d’une théorisation du pouvoir. Mais aussi à Daniel Defert, incrédule au départ, en raison d’un effet de familiarité avec l’œuvre de Michel Foucault, de la pertinence d’aborder son œuvre à l’aune de la violence et qui a été conduit à travers une analyse approfondie du champ sémantique à mettre en lumière la place faite par Foucault à la résistance au pouvoir, à la production de ces résistances « par le travail toujours à l’œuvre de la liberté, laquelle ne peut s’exprimer sans violences ».
Une deuxième approche, historico- et juridico-religieuse, nous a menés à l’analyse de textes ou pratiques des mondes de la Bible et du Coran. Nous avons bénéficié pour cela des apports de Baber Johansen et de Bernhard Lang. B. Johansen s’en tient à la comparaison de l’usage de la torture dans le droit européen commun et le droit musulman hanéfite du X e au XIII e siècle. Dans le premier, la torture aux mains des juges, comme l’ordalie, est une procédure légitime parce qu’elle est appliquée au nom de la recherche de la vérité. Dans le deuxième, la torture est punition légale ou manière normale de faire rentrer les impôts ou payer les débiteurs, mais elle ne saurait être entre les mains du qā • dī . Dans les deux cas, elle est conforme à une éthique. B. Lang, quant à lui, traite de formes élémentaires d’agression dans la Bible sous la double forme de la violence au service du culte légitime, violence interne qui assoit l’orthodoxie, et de la violence de l’imprécation des ennemis de Jérusalem, violence externe contre des compétiteurs politiques et des contempteurs de la parole divine.
Dans un troisième temps, nous avons voulu étudier in vivo en quelque sorte, des pratiques contemporaines de violence et d’extrême cruauté, en analysant les situations dramatiques que nous croyons tous connaître par la presse, de l’ex-Yougoslavie, de la Colombie et du Rwanda. Nous sommes redevable au travail si fouillé, si méthodique, si éclairant, respectivement de Véronique Nahoum-Grappe, de Daniel Pécaut et de Claudine Vidal. Des points communs surgissent avec force : des logiques politiques de haine, des mises en scène de la cruauté (mutilations particulières, parodies, profanations), l’exercice de cette dernière dans le voisinage proche, des explosions de cupidité jalouse, le recours à la drogue, le côté technique et prosaïque des opérations menées par des bandes… Je laisse au lecteur le soin de découvrir l’importance centrale de ces contributions.
Enfin, nous avons voulu aborder non plus la violence sous l’aspect de l’extrême cruauté, du sadisme revendiqué par le tortionnaire, mais sous celui de la souffrance infligée sans haine ni cruauté revendiquée, même s’il peut y avoir mise en scène. Jean-Pierre Peter analyse le discours de la médecine, du XIX e siècle à nos jours, qui prône la valeur de symptôme, mais aussi la valeur « humanisante », maturante de celle-ci, là où le malade ne se sent plus humain de trop souffrir. Mais « soulager la douleur est chose divine », donc hors d’atteinte et il n’est pas nécessaire de s’en soucier. Maurice Bloch parle de la construction (et de la consommation) des jeunes hommes dans une population de Madagascar. Celle-ci prône la non-violence, la politesse, le sentiment, l’amour réciproque, la paix en tant que valeurs des adultes. Mais les jeunes hommes, pourvoyeurs de viande, qui consacrent leur temps à la chasse, et s’amusent à des mises à mort animales qui sont de véritables tortures, doivent être construits. Une série de méthodes canalise leur vitalité antisociale, qui profitera aux anciens par le biais d’amendes en boissons et en viandes consommables collectivement.
Dans une séance introductive, j’avais proposé quelques pistes de réflexion qui recoupent les contributions qui suivent.
D’autres approches seront utilisées dans les séminaires des années suivantes et feront aussi l’objet de publication.
L’édition de cet ouvrage a été préparée au Laboratoire d’anthropologie sociale par Catherine Duby et Hélène Lamy, que je remercie avec chaleur.

  Françoise Héritier
la réflexion
FRANÇOISE HÉRITIER
 
 
Pourquoi avoir choisi le thème de la violence  ? Je dis bien le thème. Il n’est pas sûr que ce soit un concept unitaire et je tiens pour remarquable de ce point de vue que le mot lui-même ne figure pas comme « entrée » dans l’ Encyclopædia Universalis de 1966.
Nous vivons dans une époque où la violence saute aux yeux. Le mot est appliqué à des situations contextuelles extrêmement variables, mais toutes marquées par la violence, les violences, la fureur, la haine, le massacre, la cruauté, les atrocités collectives, mais aussi par les violences plus feutrées de la domination économique, du rapport capital/travail, du grand partage Nord/Sud, sans compter toutes les violences « ordinaires » — si l’on peut dire — exercées à l’encontre des faibles : femmes, enfants, exclus du système social. Violences d’État, violences individuelles, atrocités collectives, mais aussi montée des intégrismes, des nationalismes ou de ces « identités subnationales concurrentielles » comme les définit le Centre d’étude sur les conflits. Oserai-je dire que les journaux ne parlent que de violence, au singulier comme au pluriel ? Le mot et l’adjectif sont ceux qui reviennent le plus souvent sous la plume de journalistes.
Rien de cela n’est nouveau. Des corps écorchés vifs sous Sargon au fanatisme religieux de l’Inquisition ou des Djihad, des guerres de religion françaises ou des guerres ottomanes, des supplices réservés aux esclaves révoltés à Rome aux massacres des Indiens, du génocide arménien à l’autogénocide cambodgien, de l’apartheid aux violences nouvelles contre les intellectuels et les démocrates en Algérie, pour en finir par le prototype suprême, le grand holocauste commis par les nazis, tout cela nous est tristement connu. Se pose immédiatement la question de l’origine de la violence, du comportement d’agressivité. C’est un point q

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