La maison qui soigne , livre ebook

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L'histoire de « La Retrouvée » raconte une conquête à double sens. Car cette maison, initialement parée de toutes les disgrâces, a dû conquérir le cœur de sa propriétaire, tandis que celle-ci s'acharnait à faire sien un lieu « qui n'était pas son genre ».


Comment s'approprie-t-on une maison, un jardin ? Comment devient-on finalement habité par le lieu qu'on habite, réparé par le lieu qu'on répare ?


L'exploration de ce kaléidoscope d'expériences, à la fois bien particulières et familières à beaucoup d'entre nous, fait l'objet de cet atypique récit par fragments, allant de l'anecdote drolatique à l'exploration psychanalytique, du traité de décoration à la philosophie et de la botanique à la mystique.


Nathalie HEINICH est sociologue au CNRS. Elle a publié une quarantaine d'ouvrages, parmi lesquels Maisons perdues (Thierry Marchaisse 2013) et Une histoire de France (Les Impressions nouvelles, 2018), qui appartiennent à la même veine autobiographique.

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Nombre de lectures

8

EAN13

9782362802522

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

1 Mo

Présentation
L’histoire de « La Retrouvée » raconte une conquête à double sens. Car cette maison, initialement parée de toutes les disgrâces, a dû conquérir le coeur de sa propriétaire, tandis que celle-ci s’acharnait à faire sien un lieu « qui n’était pas son genre ».
Comment s’approprie-t-on une maison, un jardin ? Comment devient-on finalement habité par le lieu qu’on habite, réparé par le lieu qu’on répare ?
L’exploration de ce kaléidoscope d’expériences, à la fois bien particulières et familières à beaucoup d’entre nous, fait l’objet de cet atypique récit par fragments, allant de l’anecdote drolatique à l’exploration psychanalytique, du traité de décoration à la philosophie et de la botanique à la mystique.
 
Nathalie HEINICH est sociologue au CNRS. Elle a publié une quarantaine d’ouvrages, parmi lesquels Maisons perdues (Thierry Marchaisse, 2013) et Une histoire de France (Les Impressions nouvelles, 2018), qui appartiennent à la même veine autobiographique.


Nathalie Heinich
La Maison qui soigne
Histoire de « la Retrouvée »


 
© 2020 Éditions Thierry Marchaisse
 
Conception visuelle : Denis Couchaux
Mise en page intérieure : Anne Fragonard-Le Guen
 

 
Reproduction de couverture : Edward Hopper, Cape Cod Morning , 1950 © Smithsonian American Art Museum, Gift of the Sara Roby Foundation
 
Éditions Thierry Marchaisse
221 rue Diderot
94300 Vincennes
http://www.editions-marchaisse.fr
 
Marchaisse
Éditions TM
 
Diffusion-Distribution : Harmonia Mundi
 
ISBN (ePub) : 978-2-36280-252-2
ISBN (papier) : 978-2-36280-249-2
ISBN (PDF) : 978-2-36280-251-5


Nous avons besoin de livres et de pierres. Patrick Cabanel


Prologue
C’est durant l’été 2012, six mois après l’achat de la maison, que j’ai décidé de publier Maisons perdues , qui raconte notamment comment j’ai passé toutes mes vacances d’enfant dans le village où ma famille paternelle s’était réfugiée pendant la guerre, et mes vacances d’adolescente dans la ferme achetée et retapée par une tante et un oncle côté maternel – ma maison étant à mi-chemin entre les deux, le côté du père et le côté de la mère, les Juifs et les protestants, de part et d’autre de la ligne de partage des eaux.
Le texte attendait dans un tiroir depuis plusieurs années – en fait, depuis le début de la recherche d’une maison. Sans doute cet achat avait-il clos le temps du deuil des maisons, ouvrant à une autre vie, celle d’un « toit à moi » – et quoi de mieux pour rendre un texte définitif, donc fini, donc oubliable, que de le publier ?
J’avais donc surmonté mes hésitations : sur les conseils d’amis qui en avaient été les lecteurs, j’avais supprimé les quelques phrases qui auraient pu blesser des personnes encore vivantes, et soumis le texte à celles qui étaient nommées afin d’obtenir leur accord. L’éditeur qui avait soutenu ce projet depuis que je lui en avais fait lire une première version accueillit ma décision avec enthousiasme, et promit la publication pour janvier. La version de Maisons perdues qui partit à l’imprimerie au début de l’automne s’achevait par la mention rituelle des dates et lieux de début et de fin d’écriture : « automne 2007 – La Retrouvée , été 2012 ».
«  La Retrouvée  » : ainsi avais-je décidé de renommer cette maison qui portait, lorsque je l’achetai, le doux nom de «  Plein soleil  », inscrit en lettres de fer forgé peintes en blanc sur le montant du portail. Clin d’œil à Maisons perdues , façon de terminer pour de bon le cycle des pertes : le jeu de mots resta toutefois incompris du critique littéraire qui, quelques mois plus tard, à la fin d’un compte rendu pourtant très fin et attentif, s’extasiera que la maison où j’avais terminé l’écriture de Maisons perdues se nommait – incroyable coïncidence ! – «  La Retrouvée  »…
Mais ce naïf lecteur ne croyait pas si bien dire, car les coïncidences allaient s’accumuler au fil de mon compagnonnage avec cette maison – et c’est même probablement cela qui, au moins en partie, a motivé le présent récit. Parmi ces coïncidences, la moindre ne fut pas celle-ci, par laquelle va donc s’ouvrir l’histoire de «  La Retrouvée  ».
Ayant demandé au ferronnier du village (le seul qui soit encore en exercice à des kilomètres alentour : comment allons-nous faire quand il s’arrêtera de travailler ?) de fabriquer un «  La Retrouvée  » en lettres de fer forgé peintes en blanc, pour remplacer les «  Plein soleil  » désormais remisées au garage (je n’aime pas jeter le passé aux oubliettes), je dus lui téléphoner plusieurs fois pour lui rappeler que j’attendais ma commande. « Oui, je sais, répondait-il gentiment avec son bel accent du pays, mais j’ai eu bien du travail… ! » ; ou bien : « Oui, je sais, mais j’attends que ma fille ait le temps de m’aider pour tracer les lettres, car je ne suis pas bien bon en écriture, vous savez ! » ; ou encore : « Oui, je sais, mais je ne suis pas bien content du “v”, il faut que je le refasse… » ; ou enfin : « Oui, je sais, c’est un peu long, mais j’attends que les lettres sèchent… Ne vous inquiétez pas, je ne vous oublie pas ! »…
… Jusqu’à ce jour de novembre où, finalement, il m’appela : « Est-ce que je peux venir demain matin pour poser les lettres ? » Rendez-vous fut pris pour neuf heures. À l’heure dite il était là, je lui fis un café, puis il brancha la perceuse dans le hall d’entrée et entreprit de fixer les deux blocs, le petit « La » et, en dessous, le grand « Retrouvée », en cursives un peu maladroites qui rappelaient le banc d’école, le porte-plume, l’encre violette. J’admirai, il remballa son matériel, je payai, il s’en alla. Debout toute seule face au portail, je regrettai de ne pas avoir prévu un petit rituel pour ce qui était, après tout, un baptême de maison.
Alors je remontai à l’étage et ouvris mon ordinateur, où attendait un message de l’éditeur : « Nathalie, ça y est : Maisons perdues vient d’arriver de chez l’imprimeur. Il est très beau… ! »
Dix de perdues, une de retrouvée… ?



– Chapitre premier – Franchir le seuil
C’est parce que les souvenirs des anciennes demeures sont revécus comme des rêveries que les demeures du passé sont en nous impérissables. Gaston Bachelard


À l’office de tourisme
Normalement, lorsqu’on vient d’acheter une maison, on ne passe pas la moitié de son temps à l’office de tourisme du village. Mais comment faire autrement dès lors qu’on a emménagé en plein hiver par une température polaire, que la Livebox commandée depuis trois semaines est obstinément livrée par l’expéditeur à l’adresse parisienne, qu’on ne dispose pas encore d’un smartphone (« Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans… ») et que vos correspondants attendent impatiemment les réponses à leurs courriels ? Et donc, au lieu de passer son temps à déballer les cartons tout en découvrant les jeux de lumière d’une maison encore quasiment inconnue, il a fallu se résoudre à profiter de la connexion de l’office du tourisme – heureusement bien chauffé.
Et c’est donc là que fut envoyée cette

Lettre à mes amies
Mardi 7 février 2012
 
Mes amies,
 
Je vous écris assise devant la cheminée où finit de brûler la dernière bûche du panier remonté cet après-midi, mais par -15° (au bas mot) je ne vais pas ressortir pour aller en chercher dans le bûcher du jardin. Heureusement la chaudière fonctionne enfin correctement. J’ignore combien peut coûter une heure de consommation de fioul par ce temps, mais qu’importe : j’ai chaud – et tout va bien.
Aujourd’hui, pour la première fois je me suis privée du plaisir d’aller au village à pied : trois cents mètres au total, avec traversée de la rivière et de son petit canal de dérivation vers la minoterie, puis remontée par l’hôtel de la Plage (oui, il y a même une plage) et la rue de l’Église (oui, il y a aussi une église, même dans ce pays parpaillot où c’est le temple qui tient le haut du pavé). Il faisait décidément trop froid, surtout avec l’ordinateur à trimballer pour utiliser la connexion de l’office du tourisme et, au retour, les courses à rapporter de l’épicerie dans mon beau caddie rouge assorti aux volets de la maison. J’ai donc pris la voiture, mais elle aussi avait froid, quoique logée dans le garage : j’ai bien cru qu’elle ne se déciderait pas à démarrer. Mais on y est arrivées.
L’aventure a débuté il y a dix jours, dernier dimanche de janvier : sur la route depuis Paris la neige a commencé à tomber dans l’Allier, c’était joli. Le lendemain matin c’était encore plus joli, mais si peu déneigé qu’on est arrivés chez le notaire avec trois quarts d’heure de retard. Les formalités se sont déroulées sans encombre (le notaire est charmant), F. a confirmé qu’il était d’accord pour que l’acquisition soit faite sur mon patrimoine personnel, et j’ai sorti avec un petit sourire modeste le chèque de banque que je gardais précieusement dans mon sac. Ou l’art de se sentir riche au moment où l’on vide son compte…
On a réussi à trouver un restaurant ouvert au village un lundi midi de fin janvier, puis on est allés à la maison retrouver les vendeurs, qui nous ont fait faire le tour du propriétaire. En la revoyant j’ai eu la même impression que la première fois en la visitant, puis la deuxième en allant signer le compromis, et que vous aurez sans doute aussi en la découvrant : « Qu’est-ce qu’elle est moche ! » Même avec la neige, c’est pas terrible – je sais. Mais vous verrez : quand j’aurai fait repeindre le crépi et les volets, abattre le vilain garage, ôter le bitume, élaguer et couper quelques arbres, planter bouleaux, vigne vierge, hortensias, rosiers, sorbier, fruitiers, et j’en passe – ça ira beaucoup mieux !
Et puisque j’en suis aux grands travaux, un mot sur l’intérieur de la maison : telle qu’elle est je m’y sens délicieusement bien, ce qui ne m’empêche pas de tirer des plans sur un avenir, aussi proche que possible,

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