Le noeud Pape
118 pages
Français

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Le noeud Pape , livre ebook

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Description

Ce petit récit en forme de méditation sur le grand âge est l'oeuvre d'une "vieille dame indigne", prise dans un patient et difficile travail d'entraînement au repos. Il a été motivé par un rêve si bouleversant que la dame en question, a jugé malhonnête de laisser un tel rêve à vau-l'eau et qu'il fallait s'y attaquer. Ce rêve a été le coup de tonnerre par lequel l'inconscient imposait une entreprise toujours négligée : débrouiller un "noeud ardent" qui avait résisté à toute une vie de psychanalyste. La vieillesse, un temps pour l'auto-analyse ?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 novembre 2005
Nombre de lectures 248
EAN13 9782336266480
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Ecriture et Transmission
Collection dirigée par Laurent Cornaz
L’écrit domestiqué, alphabétisé, mathématisé. L’image, le son, désormais numérisés. Circulation planétaire de l’archive, règne de l’information.
Mais, en contrebande de l’archive, se transmet quelque chose qui ne s’écrit pas. Cet objet de la transmission est le sujet de cette collection qui explore les effets de la transmission : le corps à corps de l’enfant aux prises avec la langue, l’aller-retour toujours recommencé de l’oral à l’écrit, la fabrique de l’archive, de l’œuvre, les pratiques de lecture. Elle accueille des travaux originaux, théoriques ou littéraires, explorant les mille facettes de ce paradoxe : c’est dans l’impossible maîtrise de la lettre qu’une transmission s’opère.
Déjà parus
Laurent CORNAZ, L’écriture ou le tragique de la transmission . Claude DE LA GRENARDIERE, Encore un conte ? Le Petit Chaperon Rouge à l’usage des adultes .
Evelyne DALLE, L’enfant au miroir de son nom .
Laurent CORNAZ, ... avant que d’être hommes .
Karine BRUTIN, L’alchimie thérapeutique de la lecture .
Evelyne DALLE, Une pratique de l’étonnement .
Claire JEQUIER, La folie, un péché médiéval. La tentation de la solitude .
Frédéric CONAN, La favela des femmes .
PAIDEIA (Collectif), y a-t-il une éducation après la modernité ?
Marcello PASTERNAC, Limites de la psychanalyse. Lacan ou Derrida
Le noeud Pape
Sur le Grand Age : La Fin d'une Analyse

Diane Chauvelot
Du même auteur :
L’inconscient dans tous ses états,
Point Hors Ligne, Paris, 1990
Pour l’amour de Freud, ou l’autre ronde,
Denoël, coll. L’Espace analytique, Paris, 1992
L’hystérie vous salue bien,
Denoël, coll. L’Espace analytique, Paris, 1995
47 jours hors la vie, hors la mort: le coma
Un voyage dans l’inconscient ,
Albin Michel, Paris, 1995
Elizabeth Nietzsche, de la sottise à la trahison
L’Harmattan, Paris, 1998
La passion de l’image ou Leni Riefensthal entre le beau et le bien
Les éditions Janus, Paris, 2000
L’hôpital se moque de la charité
(Mieux vaut être médecin que malade)
Editions Erès, 2004
www.librairieharmattan.com diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr
© L’Harmattan, 2005
9782747593182
EAN : 9782747593182
Sommaire
Ecriture et Transmission - Collection dirigée par Laurent Cornaz Page de titre Page de Copyright Guide Cul-de-lampe PSYCHOLOGIE / PSYCHANALYSE / PSYCHIATRIE / HISTOIRES DE VIE - à l’Harmattan
Tenir un journal ou écrire ses Mémoires, à un certain âge, j’aimerais que l’État nous y contraignît : les matériaux accumulés au bout de trois ou quatre générations auraient une valeur inestimable, nombre de problèmes psychologiques et historiques seraient ainsi résolus .
Giuseppe Tomasi di Lampedusa
Guide
La vieillesse, mais à tout prendre, qu’est-ce ? Un point sur le i du verbe vivre . Le point final, il est vrai. Tant de choses s’y bousculent et s’y contredisent, à l’orée de cette issue qui fait peur à tout le monde, que la vieillesse reste bien une perspective, mais de fuite et non de recherche. Cependant, des vieux, il y en a de plus en plus, et ils commencent à faire parler d’eux. Cicéron avait pensé à un Art de vieillir , car il était convaincu que tout n’était pas à jeter dans cette dernière tranche de vie et que bien des récoltes pouvaient s’y faire. N’ayant pas l’étoffe d’un orateur romain, je n’entreprendrai pas de me pencher ici sur les problèmes généraux que posent la vieillesse et son bon usage, mais beaucoup plus modestement et banalement sur les problèmes que la mienne m’a posés. Et là, je dois dire que je me suis trouvée devant un tel grouillement de faits, de mots, de souvenirs, qu’il m’a fallu ma formation de psychanalyste pour m’y faufiler, là où une chatte n’aurait pas retrouvé ses petits. Car la psychanalyse, je ne peux en faire fi, puisque je ne peux oublier qu’il n’y a pas de hasard, qu’il n’y a pas de coïncidence, que tout ce qui apparaît clairement n’est que l’affichage de quelque chose d’autre qui est derrière, et que chaque mot, comme le train, peut en cacher un autre.
Comme tout le monde, j’ai longtemps refusé de vieillir, et j’y réussissais particulièrement bien, jusqu’à ce que mon inconscient, contrarié par cette dérive qui se chronicisait, me lance, sous la forme d’une bouffée d’angoisse un rappel à l’ordre sévère : “Mais tu te prends pour quoi ? Ta place n’est pas ici. Tu devrais être dans une chaise longue, avec une tasse de tisane et un ouvrage au crochet !” Cela s’est passé (j’y reviendrai) à l’aéroport, d’où j’allais m’envoler pour Berlin, à l’invitation de notre Ambassade. C’est dire que tout baignait, et que j’étais bien restée alerte et increvable. Mais je ne suis pas restée sourde au cri de cette angoisse, et me suis mise à y réfléchir avec attention : les conséquences en ont été multiples. La plus surprenante, en tout cas pour moi, c’est que je me suis retrouvée avec un déluge de souvenirs d’enfance. Moi qui, non seulement n’en avais pas, mais n’en avais même jamais eu ! Y compris au cours de mes deux psychanalyses. La plus radicale est que j’ai tout quitté pour finir mes jours tranquillement dans une Maison de Retraite. Donc, tout était en ordre, et moi, à ma place. J’ai appris le farniente , le repos, la valeur de l’inutile. Mais je sentais bien que non, tout n’était pas terminé. Ce noeud que j’avais toujours perçu tout au fond de moi, ce nœud qui avait résisté à mes deux analyses et à ma vie complète d’analyste, ce nœud dont, après tout, je m’étais si bien arrangée et si longtemps, eh bien ! il subsistait encore, même si désormais inerte et désarmé. Alors là, l’inconscient a sorti son grand jeu : un rêve papal ! J’en suis sortie écrasée, essorée, amputée ; partagée entre la honte et la joie, car le choix de ce rêve n’avait pas été non plus laissé au hasard : Il Papa  ! Écoute il Papa ... En italien, dont je suis familière, mon inconscient s’est fait tout à la fois impératif et conciliant. Il aurait fallu être au-delà de la vieillesse, dans un Alzheimer par exemple, pour ne pas l’entendre en français. Et bien entendu, je ne l’ai pas raté ce noeud taillé dans le roc, mais si bien caché.

Vieillir, il y a bien sûr un sacré bail que j’ai commencé cette dernière aventure. Mais, dans la plus totale méconnaissance des faits. Ce n’est pas un anniversaire une fois par an — la plupart du temps scotomisé — qui peut ponctuer le suivi d’une telle évolution. Encore que chaque fois, à l’énoncé du chiffre alarmant, je ne pouvais que me congratuler de posséder un savoir sûr, inébranlable : quoi qu’il advienne, je ne serai pas de ces malheureux qui meurent jeunes. Et j’y allais bon train... Une moitié de mon temps pour ceux qui m’honoraient de leurs visites ; une autre moitié pour l’entretien de ma vie quotidienne, avec la baignoire qui fuyait et la femme de ménage qui me créait des problèmes absurdes à Paris. Encore une autre moitié pour la maison à la campagne, dont le toit était à refaire. Il me fallait bien compter aussi une dernière petite moitié pour l’intarissable courrier administratif, assurances et factures, avec des photocopies partout. Chaque tentative de travail, forcément, était à prendre sur d’autres moitiés et la lecture était réservée au tiers restant, consacré au train, soit sept heures par semaine.

C’est comme ça que je vivais à cinquante ans, à soixante ans, à soixante-dix. Et en plus, il y avait tous les voyages que j’adorais, Madrid, Dublin, Berlin, pour ses congrès entre psys, où je me retrouvais avec tous les copains de Paris, ceux que je prenais pour des amis, sans vouloir y prêter plus d’attention (la vérité ne saute pas aux yeux, il faut la chercher). C’est autour de mes soixante-dix ans que je me suis prise d’amour pour Berlin : j’y allais pour un oui, pour un non. Je les avais prévenus là-bas : surtout, n’ayez crainte de me déranger, un coup de fil et j’arrive. Et j’y allais pour toutes les réunions

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