UNIVERSALISME ET IDENTITÉ JURIDIQUES LES DROITS DE L HOMME ET LE MONDE ARABE
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Niveau: Secondaire, Lycée, Terminale

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UNIVERSALISME ET IDENTITÉ JURIDIQUES : LES DROITS DE L'HOMME ET LE MONDE ARABE Ramdane BABADJI* et Jean-Robert HENRY Après la contribution de Maurice Flory sur le dispositif proprement. juridique de protection des c* droits fondamenta~x .,, c'est une déniarche complé- mentaire qui est ici présentée. Elle se propose de mettre l'acceiit sur la tliéniatique des droits de l'homme comme pièce maîtresse d'un discours juridique universalisant, en considérant la façon dont elle est reçue à ce titre par les sociétés du monde arabe. L'observation de cette réception ou de cette réappropriation sera appuyée moins sur l'analyse de textes doctrinaux, comme les projets de Déclarations arabes ou islamiques des droits de l'homme, que sur la pratique d u droit conventionnel, en privilégiant l'étude des wréservesn formulées par les pays arabes signataires des conventions relatives à ce domaine, e t des ..objections , suscitées en retour. Les dro i t s d e l'homme, n o u v e a u d i scours ju r id ique universal is te Tout discours universaliste tend à se présenter, au monient où il est formulé, comme un discours d'évidences ii caractère a-temporel échappant à la conjoncture e t à la critique. Pour éviter de piéger l'analyse dans ces bidences, il importe d'essayer de relativiser les notions en jeu, notatiiment en leur redonnant une épaisseur historique.

  • droit de l'homme

  • comportitmcnts actuels

  • poids des identités culturelles

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  • condamnation des génocides de la seconde guerre mondiale

  • ordre juridique

  • processus économique


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U NI V E R S ALI S M E ET J U R I D I Q U E S DROITS DE L'HOMME ET LE MONDE ARABE Ramdane e t Jean -Robert HENRY " "
Après la contribution de Maurice s u r le dispositif proprement. juridique de protection des droits c'est une déniarche complé -mentaire qui est ici présentée. Elle se propose de mettre s u r des droits de l'homme comme pièce maîtresse d'un discours juridique universalisant, en considérant la façon dont elle est reçue à ce titre par les sociétés du monde arabe. L'observation de cette réception ou de cette réappropriation sera appuyée s u r l'analyse de textes doctrinaux, les projets de Déclarations arabes ou islamiques des droits de l'homme, que s u r la pratique d u droit conventionnel, en privilégiant l'étude des formulées par les pays arabes signataires des conventions relatives à ce e t des suscitées en retour. Les d r o i t s d e l'homme, n o u v e a u d i s c o u r s j u r i d i q u e u n i v e r s a l i s t e Tout discours universaliste tend à se présenter, a u monient où il formulé, comme un discours d'évidences caractère a -temporel échappant à la conjoncture e t à la critique. Pour éviter de piéger l'analyse dans ces il importe d'essayer de relativiser les notions en jeu, leur redonnant une épaisseur historique. Porteur d'immenses espérances, mais aussi de multiples malentendus, le discours actuel s u r les droits de l'homme ne saurait, moins que tout autre, échapper a u requestionnement, avec les outils d u chercheur, des questions d u sens conimun ou des affirmations des acteurs. Ce requestionnenient porte avant tout s u r les modalités de la tension entre l'universel et le particulier. Si aujourd'hui l'articulation entre ordre juridique international et ordres juridiques internes en matière de droits de l'homme est u n des lieux essentiels du débat s u r l'État de droit dans le arabe, c'est parce qu'elle catalyse pour une large part cette tension, qu'elle est exacerbée par la priorité donnée la dimension culturelle des relations 1 La tension entre et le particulier est une dynamique la fois et fondamentale des relations internationales et du droit international, qui varie toutefois dans ses modalités e t son intensité selon le contexte historique.
de conférence, Directeur de CNRS-IREMAM. 
Annuaire de du 'lord. CNRS
76 ET JEAN -ROBERT HENRY L'émergence actuelle d'un système de plus en plus structuré, unifie, hiérarchisé dans lequel s'inscrivent une grande partie des échanges économiques et humains entraîne l'imprégnation progressive des ordres juridi -ques nationaux quels qu'ils par l'ordre juridique international. Mais celui -ci n'est pas seulement ensemble foisonnant de normes positives dont la richesse croissante des champs e t des niveaux d'intervention (dans le domaine économiqur notamment) déborde largement la gestion des rapports interétatiques il est juridique d u c'est -à -dire une représentation de la communauté mondiale actuelle e t du monde à construire, une façon de le monde pour agir s u r lui e n commun dans une perspective Ce discours juridique de référence est essentiellement déclara -toire, projectif, utopique au sens fort du terme. Une telle fonction prospective du droit existe aussi naturellement en droit interne, mais acquiert en droit international une dimension majeure, de caractère mythologique. Beaucoup plus que la contrainte, inégalement opéra -toire, c'est ce caractère projectif e t déclaratoire du droit international qui fait sa force. C'est l'existence d u droit international comme univers commun du discours normatif, comme discours du actuel e t à venir, e t comme du jeu lihrement acceptée par les acteurs (du moins les plus grands), qui assure e t justifie la stabilité des situations acquises et se révèle un puissant du développement pacifique de la société internatio -nale. E t de même, c'est l'aptitude à servir général à venir de la internationale, comme un être collectif mythique, qui contribue à légitimer i'action des acteurs actuels du système Ce phénomène de mise en langue juridique d'une vision d u monde à construire n'est pas nouveau, mais il a revêtu au cours de ce siècle des expressions variables. Aujourd'hui les droits de l'homme détiennent la plus grande visibilité dans ce rôle de discours juridique universaliste. Ou plutôt, c'est la redécoiiverte d'un discours pluri -centenaire s u r les droits de l'homme qui tient la vedette, à d'un discours u n peu moins unanimiste les droits de la et II y a vingt ans c'était davantage le débat juridique nouvel ordre international qui faisait fonction de discours de peu tôt, en plein contexte de guerre froide, le discours s u r les droits de l'homme n'avait pas réussi à s'imposer comme vision la condamnation génocides de la seconde guerre mondiale, et la tentative d'intern~itionalisatio droits de l'homme par la de et les Pactes de : politique de la des droits de l'homme était effet telle qu'il était former un tant sur contenu des droits que s u r la confiance mise dans les acteurs étatiques pour assurer leur défense e t leur promotion. La situation encore différente au de la mondiale lorsque les puissances sorties vainqiieurs de la du droit cherchaient à favoriser d'un commun if cher Edouard E n réponse à cette universalisation à deux registres, celle des normes positives e t celle des normes déclaratives ou prospectives, mais davantage en
: L E S DROITS DE ...
réponse aux secondes qu'aux premières, se produisent des résistances e t réactions particularistes hostiles à l'internationalisation de l'ordre juridique. C'est une réaction identitaire classique contre l'excès d'uniformisation e t d'universalisation, qui peut toucher aussi bien des sociétés que de la Au l'attitude internationale en a fourni de nombreux exemples, depuis la dénonciation par de Gaulle du onusien, jusqu'à la querelle psycho -dramatique du GATT s u r l'exception culturelle française, e t au refus d'adhérer à la Convention européenne du 10 novembre 1994 pour la protection des minorités. Au le terrain se révèle aujourd'hui propice à une réaction forte en matière de droits de Au discours universel d'inspiration nettement occidentale e t individualiste s u r ce sujet, il e s t reproché de ne pas respecter la personnalité arabo -musulmane, notamment pour tout ce qui fait la cohésion et la reproduction des communautés (le statut personnel e t le statut de la que la vision occidentale d u droit tend à À l'ordre juridique occidental, perçu un ordre culturel, il est tentant d'opposer la référence à un juridique musulman concurrent bien que difficilement repérable dans le champ d u discours juridique actuel, car il n'est ni international, ni national, N régional au regard des canons du droit incernational. C'est cc que font les nombreux projets de Déclarations islamiques e t arabes des droits de l'homme q u i prônent à des degrés divers respect de la loi musulmane ou u n retour à la Encore qu'il ne faille pas sous -estimer implicite de synthèse, ou de réappropriation de l'universel par le particulier, que représentent ces déclarations, qui sur l'unité de la société proclamée par la tradition musulniane. 2 cette dialectique classique, mais sans cesse renouvelée, du rapport entre l'universel e t le particulier, qui induit des réactions d'identité juridique, se greffe une contradiction, plus conjoncturelle, qui résulte du décro -chage entre la dimension économique et la perception culturelle d u processus Pendant glorieuses ce hiatus était peu sensible. réalisations concrètes de la mondialisation écononiique (échanges commerciaux, système international! étaient servies par une commune, l'ouest, à l'est e t au sud, dans le destin de développement. Nouveau du de la civilisation, de la modernisation, le définissait pas nient une finalité, des objectifs communs. mais un ordre e t un temps commun du monde. On divergeait seulement sur les moyens d'accomplir ce destin. le le peul être analysé mythe a u sens propre du terme, dire ici un récit des origines de la modernité se dans le futur pour guider les actuels. . S e l o n de B . son du droit du CNRS, S. A. a et reproduit dans Les 1991.
78 ET JEAN -ROBERT Occidental l'origine, ce mythe s'est peu à peu universalisé et a conquis à l'occasion de la décolonisation ce statut de croyance commune à connotation à la fois historique e t économique, par les décennies du dévelop -pement Le fait que l'idéologie du développement ait à cette époque fortement résonné avec le processus économique concret de mondialisation favorisait cependant le centrage davantage s u r l'économique que s u r le culturel de d'universalisation e t de ses contradictions. Le droit s'est ajusté à cette vision du monde. Dans les années e t 70, l'intérêt d u droit international majoritairement fixé s u r la gestion des contradictions économiques du développement C'était l'époque d e I'invention du droit du développement, dans la d u droit Les droits de I'hommc proprement dits n'occupaient alors qu'un second rôle dans l a vision juridique du monde malgré l'adoption de la dcclaration de 1948 et des pactes de Ou plus ils parvenaient pas à constituer une fin en soi, e t apparaissaient comme une notion suspecte s'ils n'étaient pas crédibilisés et par la finalité de développe - ment. Le droit du a u service d u développcrnent, et le a u développement..., entériné tout à la fois par les Nations Unies et par constituait une génération des de l'homme à condition d e s'inscrire une perspective déwloppeinentiste solidariste, celle du ordre économique international Ce paysage des croyances universelles a été largement e t progressive -ment bouleversé à la suite d'une série d e crises internalionales qui, à partir de l'échec d u nord -sud, ont amenuisé la place des pays d u sud dans la décision internationale Alors qu'aujourd'hui le processus de mondialisation économique n'est plus guère contesté et fait figure de logique pour l'ensemble des peuples d e la planète, le mythe du développement a vu s'effacer son rôle de référence universelle. Cet effacement n'a pas pris les mêmes a u sud e t a u nord : qu'en Occident. il n e s'est agi que d'une révision à la baisse d'une optimiste du monde, a u sud, le désenchante -ment s'est fnit plus radical : c'est l'idéologie du développement elle -même qui a été remise en cause comme mythe occidental à vocation globale En contrepartie se renforce, a u sud comme a u nord, u n discours tion des culturelles, voire de des cultures,,, qui insiste sur les clivages irréductibles entre sociétés, où le mythe du y compris dans sa version juridique, se voulait réducteur des différences ct
Cf. issu d'un colloque tenu en 1982, T a droit Ed. du CNRS. La est Jean Cf De la à la des cultures. Projet, Quand perd sud. i51 II est q u e nu constaté dans les des institutions depuis le début des années 90 se fasse sur prudent, qui et mythique de la notion. mais l'associe à qualificatif qui restreint la portée : parle par de humain de social de ment de
ET : L E S DROITS .
Dans ce contexte de déficit de croyance en une référence universelle, c'est le discours s u r les droits d e l'homme qui reste seul en scène à côté peut -être s u r l'environnement. II se substitue a u mythe du développement aver caractéristiques semblables de discours incantatoire. Le discours sur les droits de I'hoinme, le discours humanitariste en général, sont aujourd'hui refuge privilégié de I'universalisnie. un universalisnie qui déborde de la sphère juridique, mais se révèle très édulcoré en ses dimensions économiques par rapport à celui de l'idéologie du Le au droit des si souvent souligné sur des mots, est l'élaboration d'un discours universel minimaliste le se voulait e t prométhéen) : il ne pas à reduction des clivages ni n e s'affronte aux effets pervers de l'affirmation des identités culturelles. Retournant finalement à la philosophie des de l'homme -attributs dits de première génération, il délimite un minimal de la internationale s u r protection des droits élémentaires d e la personne humaine, avec une coupure soulignée à des droits de l'homme entre la des droits fondamentaux e t une conception élargie droits e t collectifs leur politique, économique e t social. C'est donc une vision libérale des droits de l'homme e t de leur effectivité qui s'impose, celle noyau minimal commun des droits d e I'hoinme, compatible d'une p a r t avec le libre jeu du libéralisme économique, d'autre p a r t avec l'accent mis s u r le poids des identités culturelles. ce discours minimal e t libéral n'est pas nécessairement figé dans ses frontières actuelles. De la même façon que l'économisme initial de la de développement s'était élargi e t humanisé jusqu'à devenir une vision globale du monde, le discours s u r les droits de l'homme, parti autre lecture restreinte des relations internationales, a lui aussi vocation à peu peu l'espace des attentes aujourd'hui non satisfaites d'une nouvelle vision globale du monde, depuis l'abandon d u mot d'ordre de nouvel ordre économique interna -tional ,.. La défense des droits l'homme constituerait alors la première pierre de la d'une vision (juridique) globale d u monde axée homme. et plus que s u r la collectivité, e t capable par de donner tout son sens à la notion juridique de commun de La fréquente, dans la thématique des droits de exigences de la civile est révélatrice de cette évolution, même si la notion de société est sensiblenient différente, à l'universel, de la notion de qui fondait le droit international du développement ou de celle de qui fondait droit international classique : la première beaucoup moins place à l'État acteur de la société tionale que secondes. Si s'en Lient a u présent! on constate que la c n puissance du s u r les droits d e a fait sensiblement évoluer depuis a n s la notion de droits de l'honime, lui conservant certaines caractéristiques
Du côté la thématique des droits de I'homme reste : u n discours juridique à vocation universelle qui sert de fonds jeu pour le entre les sociétés, au le plus sublimé, un discours voire Poirier), une qui pose des règles générales floues, ou plutôt des directions normatives, que chaque société réinterprète à s a façon. de la semble se caractériser de son côté par u n double mouvement de rétrécissement d u champ couvert par ces droits e t de renforce -ment de leur protection : le nouveau discours s u r les droits de l'homme fait référence à l'économie, à l a libération complète de l'homme, il est prométhéen son universalité tend à limitée par la question du relativisme culturel qui, beaucoup plus que le relativisme politique ou le relativisme économique postule la différence durable entre sociétés, et limite les valeurs humaines partageables à un modeste dénominateur commun mais il y a par contre une protection renforcée du noyau dur des droits fondamentaux, symbolisée par le débat s u r le droit d'ingérence. Le débat s u r les droits de le inonde arabe est marqué par ces caractéristiques actuelles du discours s u r les droits de I'homme, notamment le fait : qu'il s'agit d'un discours minimaliste, mais bénéficiant d'une protection renforcée des droits initiée et contrôlée e n réalité par les grands pays occidentaux: que son universalité est limitée par la puissance du relativisme culturel. La tension entre e t le particulier prend dans les pays arabes une dimension à la fois (aspirations contradictoires l'identite e t à e t externe contre les modèles occidentaux). Cette tension est bien visible dans la Déclaration de Tunis de novembre 1992 préparatoire de la réunion de Vienne : elle proclame l'universalité des droits de l'homme e t lie ceux -ci a u développement et à la internationale. mais insiste aussi sur la préservation des traditions culturelles. La tendance à tenter d'articuler des normes universelles à des issues de l'héritage culturel arabo -musulman s'observe à des degrés divers dans les autres déclarations ou projets de déclarations arabes e t islamiques. convient toutefois de ne pas considérer ces textes déclaratifs, adoptés à l'issue de compromis variables ou e n l'absence de toute procédure, comme le reflet d'une prise de position monolithïque du m a n par rapport à ce que serait une vision occidentale, non moins monolithique, des droits de I'hoinme. Ce sont tout a u plus des références doctrinales qui à occuper juridique potentiel d'une vision arabo -musulmane
Devenu caricatural avec de le sur des la guerre du Golfe, était les années 70 et RO. II une place restreinte un patrimoine véritablenient de valeurs partagées, e n matiere de droits de
: LES DROITS DE L'HOMME ... d u monde, mais dont il faut nuancer la portée dans la mesure où elles n e traduisent pas la diversité des positions nationales, bien révélée p a r contre par les solutions concrètes du droit conventionnel. Cette nécessaire prudence de l'analyse vaut également pour la comparai -son implicite avec qu'induit toute analyse de la situation des droits d e l'homme dans le monde arabe. II ne s'agit pas de la confrontation tranchée entre deux systèmes juridiques ou deux visions juridiques du monde. Dans européen aussi, la diversité des solutions nationales reste importante. malgré les unificateurs apportés p a r la Convention européenne des droits l'homme et la Cour. Enfin, dans Ir regard porté depuis l'Europe s u r les positions arabes e n de droits de I'homme, on se gardera d'oublier les nombreuses interfé -rences entre les deux régions dans ce domaine, à propos d u conflit yougoslave. e t surtout de l'immigration. S u r ce thème, le traitement français de la religion a souvent été u n élément important du débat. Le modèle français e t le modèle turc ont nourri et continuent à nourrir une dialogique les deux rives de la Méditerranée s u r cet aspect des droits de I'homme : ce qu'on a appelé d u voile. a suscité de nombreuses réactions a u sud d e la Méditerranée e t jusqu'en I r a n Cette diversité ambiguë des positions arabes s u r le plan international e t ce dialogue implicite avec apparaissent mieux que partout dans l'analyse des engagements conventionnels effectifs des pays arabes e n matière droits de e t réactions des autres Etats.
Les difficultés d'établissement d'un bilan de la pratique conventionnelle arabe en matière de droits de I'homme La conscience des spécificités d u monde arabo -musulman fait est l'objet d'études et de bilans s u r les liens qu'il entretient avec cette nébuleuse qu'on appelle international des droits d e l'homme Cette curiosité est le fait d'organisations de défense des droits de I'homme ou simplement d'universitaires e t de chercheurs qui en font leur objet Elle se concrétise généralement par l'élaboration de tableaux faisant ressortir l'adhésion d'un nombre plus ou moins grand d e pays à u n nombre tout aussi variable de conventions
Dans son édition en langue de édité Téhéran. une attention aux pratiques politiques et juridiques françaises l'égard de France. dans le pays considéré comme beaucoup plus ouvert sur qu'est la Tunisie. y a fort partagé des responsables politiques et des universitaires, que le droit des est protégé en France. Cf. (S.A.),op. cit.. ainsi p. 708; Institut des de par les arabes, autres. de a notre disposition. Tribune, York.
82 ET JEAN -ROBERT Les conclusions que l'on peut tirer de ces travaux se modifient d'année e n néanmoins quelques constantes. Au rarig de dernières on peut citer la splendide ignorance par Saoudite la plupart des conventions, la méfiance presque systématique du groupe de pays arabes à l'égard relatives à l a situation la femme, le peu d'adhésion quelques procédures de contrôle de l'application des conventions qui existent, le protocole sur les droits civils e t politiques et la convention s u r la torture e t traitements Au rang des évolutions, la plus notable est qui voit un nombre croissant. d e la région devenir partie à conventioiis. Depuis peut citer à titre : les deux pactes), la Libye : conventions de Copenhague e t la torture, 1993 : des droits de l'enfant), la Jordanie 11991 convention s u r la torture e t 1992 convention de Copenhague), Maroc (1993 : Copenhague e t convention sur la torture), etc. Ces bilans ne renseignent pas complètement sur les engagements effectifs que les É t a t s la matière. E n effet. à une exception près, qui d u reste ne concerne seule convention ils ne tiennent compte de l'existence des réserves par les réserves qui une adhésion sélective aux conventions. Ils n e renseignent donc pas s u r des engagements effectivement pris. Ces derniers ont évidemment une en droit international ce à quoi les États concernés s'engagent à l'égard des autres -et une portée e n droit interne -les droits qui deviennent exigibles de ln part des e t associations des droits de l'homme. des engagements internationaux effectifs de É t a t s doit tenir de cette dimension. Cette démarche implique de rappeler quelques règles régissant les réserves en dro t de i préciser l'étendue du corpus Rappel d e s règles régissant les sont définies par la convention de Vienne s u r le droit des traités de la suivante : déclaration quel ou sa faite par quand il signe. ratifie, accepte ou traité ou adhcre. par laquelle il à ou à l'effet juridique de dispositions du leur application à cet L'évolution qu'a la question en droit international depuis l'avis consultatif de la CIJ du 28 mai 1961 pas besoin d'être Les réserves obéissent droit à un certain nombre dc qui été codifiées par la convention de Vienne s u r le des
Il s'agit d u Lente par le colloque qui s'est. tenu à T h i s sur de 2.1. C f notamment P H . L E S 1979. d e S.
ET :LES DROITS DE L'HOMME . 83 traités Elles ont été définies par l'article 19 de la Convention rédigé : -U n Etat, au moment de signer, de ratifier, d'accepter, d'approuver un traité ou d'y peut forinuler une réserve, à moins : a : que la ne soit interdite par le traité, que le trait6 dispose que seules des réserves lesquelles rie figure pas réserve en question, peuvent ètre faites, ou que, dans les cas que visés alinéas et la réserve rie soit iricompatihle avec l'objet et le but du Ces réserves n'ont pas à être acceptées les autres États qui composent la contractuelle. Ces derniers peuvent tout a u plus émettre des objections aux réserves. Mais ces objections, outre les conditions de délai dans lesquelles elles sont enfermées, n'ont pas pour effet d'empêcher vigueur entre l'État réservataire e t qui a formulé l'objection, si ce dernier a exprimé formellement l'intention contraire. Àdéfaut de cette déclaration formelle, l'objection a tout plus pour effet d'empêcher l'entrée en de la disposition réservée réservataire e t qui a émis l'objection. Ce ahoutit relevé un en u n de relations bilatérales p a r principe de Ce systèiiie très lâche, très mou aggravé en matière de tions relatives aux droits de l'homme par deux facteurs. Le premier tient à l'inexistence dans la majorité des cas de mécanismes institutionnalisés d'appréciation de la validité des réserves a u regard de l'objet e t du but d u traité Cette appréciation résultera des éventuelles objections les autres États parties à la convention. S a seule sanction sera l'application d u principe de réciprocité. c'est le deuxième facteur, le principe de réciprocité n'est opératoire en matière de droits de Si son dissuasif est certain lorsqu'il s'agit d'une convention prévoyant des prestations réciproques. i l n'en a aucun lorsque, comme c'est le cas en de droits de I'hoinme, les obligations contractées ne le sont pas à l'égard États mais des individus vivant la juridiction de l'État. Ce qui explique d'ailleurs que dans la quasi -totalité des cas qui ressortent des converitions
des fait I'objet dc de du en vue dc préciser et clarifier les le Cf. sur la question. Les el p. 71 e t e t Précis Dalloz. p. 187 de 29 p. U n parle des ou que ce Précis 1992, p. . Le de la s u r va son à ce la des droits de les plus. les qu'elle et o n t affirmé pour apprécier la de ce le de de Vienne. C'est de citée plus h a u t .
84 ET JEAN-ROBERT HENRY étudiées se retrouve l a mention que présente ne fait p a s obstacle à en de la ... auteur de e t l'État auteur de la réserve. Les limites d u champ d'observation retenu e û t été idéal d'étudier des États concernés e l l'ensemble des conventions signées en matière de droits de l'homme, pour peu que la définition précise de deux ensembles soit possible, ce qui ne va pas sans poser problème pour l'un comme pour l'autre. Au regard de cet idéal, c'est un bilan plus empirique e t plus éclectique qui est e n fait présenté ici dans les limites de cette contribution. l'origine, la recherche s'est aux engagements pris par certains États arabes à l'égard de certaines On a retenu de façon arbitraire groupe d'États arabes suivants : Algérie, Arabie Saoudite, Maroc, Syrie, Tunisie. La Turquie, É t a t mais non arabe, y a été ajoutée pour l'intérêt de la comparaison. Concernant les conventions, celles qui ont été retenues été en fonction de leurs potentialités. réelles ou supposées, à révéler tel ou tel mode d'articulation entre la e t le droit international des droits de l'homnie. Àmesure que le travail a avancé, les choix se sont infléchis fonction des résultats obtenus. Certaines conventions choisies se sont du point de qui intéresse, décevantes. De la même manière, la position de certains des États retenus pouvait s e résumer à une phrase : le cas type est celui de l'Arabie Saoudite, absente de la quasi totalité des conventions. P a r le choix des pays a également été infléchi e n raison soit des réserves qu'ils ont émises e t ont paru intéressantes à analyser, soit en raison des objections des États à ces mêmes réserves. Malgré ces limites d u corpus, l'étude des réserves aux conventions internationales relatives aux droits de l'homme présente un double intérêt. Le premier est purement juridique, s'agit de s'interroger s u r l'étendue des engagements souscrits et, partant, s u r les restrictions qu'apportent le:; États signataires à l'application des conventions auxquelles ils adhèrent néanmoins. Le second e s t plus philosophique. s'agit d'étudier le discours qui accompagne la réserve à la manière de l'exposé des motifs d'une loi. Ce révélateur de la conception qu'a l'État émettant la réserve de son adhésion a u droit international des droits de l'homme e t des limites de cette adhésion. Si la loi islamique est très souvent invoquée pour justifier les réserves émises, elle ne l'est pas toujours de la même façon ni à propos des mêmes questions. Et. siirtout, elle est avancée (sauf implicitement dans le cas de l'Arabie Séoudite) pour dénier toute légitimité à une norme universelle. Un autre intérét de l'observation est bien s û r la des objections aux rfserves. E n partant de que le couple réserve -objection est une sorte de dialogue se nouant sur la scène du droit international à propos question précise. l'examen des objections permet de mesurer le niveau réaction ou l'absence de réaction de l a communauté internationale à tel ou tel de réserve.
ET J U R I D I Q U E S :LES L'HOMME .  .. 85 La formulation des réserves Remarques générales La première remarque a trait à la langue. Les réserves dont il va être question sont celles qui sont rapportées dans la version du document Nations Unies auprès d u général. 31 On s'arrêtera pas a u libellé des actes e n question. S'ils portent souvent la dénomination de réserve, ils sont aussi e t de manière fréquente qualifiés de déclarations ou de déclarations interprétatives. Mais dans la plupart des cas, il s'agit de réserves : leur est suffisamment explicite. P a r ailleurs, dans certains cas, le passage de l'arabe que nous présumons être la langue initiale a u ne pose pas de problèmes soit en raison dc la brièveté du texte soit raison d e son articulation e n points précis. Dans d'autres cas par contre, la lourdeur d u style e t son caractère emprunt6 laissent supposer qu'une éventuelle altération du texte initial à p u avoir lieu l'occasion de la traduction. deuxième remarque concerne certaines réserves qui sont émises par un plus ou grand nombre d'États arabes e t qui ne pas intérêt direct pour notre question. s'agit entre autres de excluant la compétence autoniatique de la CIJ pour toutes les questions se rapportant à l'interprétation ou à l'application des conventions, e t de celle (devenue aujourd'hui partiellement obsolète) e n vertu de laquelle l'adhésion à une convention ne signifie en manière la reconnaissance de l'État d'Israël. troisième remarque générale enfin consiste à constater l'on retrouve les réserves là où on s'attendait à les trouver, c'est -à -dire à propos des dispositions des différentes conventions susceptibles d'être e n contradiction avec les dispositions de la loi islamique. Or, cette dernière est schématiquement cantonnée à ce qui est le s t a t u t personnel et les successions. Aussi ne faut -il pas s'étonner que l'essentiel des réserves se retrouve à propos d'un nombre limité de conventions dont les plus importantes sont les deux pactes relatifs aux droits civils e t politiques e t aux droits économiques, sociaux e t culturels, la convention sur l'élimination d e toutes les formes de discrimination à l'égard des e t la convention relative aux droits de P a r ailleurs, si la référence à la loi islamique est constante. elle n'emporte pas systématiquement les mémes restrictions et donne pas nécessairement lieu a u x mêmes réserves. E n d'autres termes, il apparaît que le sens des expressions ou du terme pas commun à l'ensemble des Pour avoir idée plus exacte, il faudrait pouvoir dans détail chaque législation nationale et déterminer les différences dans l'application qui est faite de la Faute d'un tel inventaire de la diversité
Sans préjudice des de à d'un État. C f La Découverte, e t Al Fikr. Le le 6 sur la de la p. 123 et et Islamiser l e droit? L'exemple égyptien. 126, 1959. p. 5
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