Ruptures et répétitions
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Article de réflexion au sujet de ces deux idées : ruptures et répétitions. Sont-elles deux concepts totalement disjoints ? Entretiennent-elles des passerelles masquées ? En quoi accompagnent-elles la marche des humains sur un versant factuel et dans leurs pulsions inconscientes ?

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Publié le 20 juin 2020
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Langue Français

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Ruptures et répétitionsou la constance dans la différence. "Qui trouve a mal cherché". Souvenirs inconnus. Rutger Kopland Quand on m'a proposé d'écrire quelque chose au sujet de l'idée de "rupture et répétition", j'y ai d'emblée perçu qu'un paradoxe pourrait bien compliquer la saisie de ces termes. En tous cas, qu'il convenait de se méfier de comprendre trop vite selon l'épigraphe de Kopland. Et il n'en fallait pas moins pour piquer ma 1 curiosité et essaLJeƌ de dĠfaiƌe Đe Ŷœud goƌdieŶautrement qu'en le tranchant , 2 me rapprochant ainsi plutôt d'Epiménide le crétois en termes de paradoxes. Et en quoi ces deux mots pourraient-ils contenir une intrication et des paradoxes, puisqu'en théorie une rupture n'impliquerait pas forcément la répétition de quoi ce soit, et que des répétitions semblent pouvoir se faire sans ruptures 3 préalables ? J'espère pouvoir faire apparaitre l'aporie dont je propose l'hypothèse au fil de ce texte, mais pour l'heure envisageons ce couple sémantique "rupture-répétition" à l'aulne de l'actualité, à savoir de la crise sanitaire qui semble finir de traverser notre planète. Nous suivrons une même démarche en ce que ce couple pourrait constituer, plus globalement, un fil rouge d'interactions tout au long de la vie des Hommes. La pandémie virale à Sars-Cov2 nous a contraint à bousculer nos habitudes. Elle nous a conduit à accepter un certain nombre de privations de libertés dans 1 Le Ŷœud goƌdieŶ est, seloŶ la lĠgeŶde, uŶ Ŷœudinextricable et qu'Alexandre-le-grand aurait défait de façon radicaleen le tranchant. 2 ème Epiménide était un orateur et poète du V siècle av. J.C., ayant proposé la résolution d'un paradoxe énoncé ainsi : tous les crétois sont des menteurs. Suis-je un menteur si je dis cela sachant que je suis moi-même crétois ? 3 Aporie : chemin sans issue, impasse.
un intérêt collectif et individuel. Nous avons ainsi dû "rompre" avec l'insouciance d'un quotidien qui, pour une grande part, ne voulait rien savoir de ses propres excès (en termes de consommation, déplacements, pressions environnementales et logiques dévastatrices de profits). Mais tout juste peinions-nous à nous adapter à ces renoncements, que les questions de "l'après" fleurissaient déjà en cet inédit printemps :ख़ख़ retomberons-nous dans une répétition faite des mêmes travers ? Reprendrons-nous la course effrénée vers toujours davantage de "croissance" ? Ce mouvement toxique pourrait-il même s'accélérer ou bien saurions-nous apprendre de nos expériences et de nos erreurs ?ग़ग़Rupture ou répétition ?
Force est de constater que cette crise mondiale a charrié avec elle un certain nombre de contradictions : il fallait ainsi prendre soin des personnes âgées en cessant de leur rendre visites. Il fallait éviter les promenades dans la nature tout en pouvant continuer à faire ses courses dans les grandes surfaces. Il fallait s'obliger à rester chez soi tout en ayant le droit de s'autoriser à sortir. Ici, ruptures et répétitions dansaient une curieuse ronde en se prenant pourtant déjà les pieds dans le tapis.
Dans ma pratique professionnelle où le psychisme et ses méandres y sont l'espace de travail, il n'y a pas une séance où la question des paradoxes n'émerge. Parfois avec acuité ou plus souvent masquée. Freud, défricheur ème de l'inconscient au début du XX siècle, nommait ces problématiques paradoxales : "conflits intrapsychiques". Et qui pourrait prétendre y échapper ? Les personnes qui viennent me parler témoignent ainsi du souhait de rompre avec toute une série de symptômes qui compliquent leurs vies, tout en constatant pourtant l'existence d'une force qui régulièrement leur fait répéter lesdits problèmes, comme si cela s'opposait au but visé. Un peu comme si quelque chose en eux cherchait à tarir une source de souffrances, et que quelque chose d'autre, également en eux-mêmes et paradoxalement, était comme attaché à l'entretenir, à la conserver (ou à la "retrouver").
C'est entre les années 1914 et 1920 que l'inventeur de la psychanalyse théorisa le concept deWiederholungszwang (pulsion de répétition). Elle lui apparut au décours des horreurs de la première guerre mondiale (vingt ans plus tard, la seconde grande guerre ne fit que confirmer ses hypothèses). Mais avant que ces conflits armés n'aient alimenté sa réflexion, ce fut l'observation de son petit-fils qui lui donna matière à cogiter. Ce dernier passait du temps à jouer au jeu de la bobine (jeu dit duFort-Da) quand sa mère quittait le domicile sans lui.
Il apprivoisait le désarroi de ces départs en substituant la bobine à la mère. Il "rejouait" ces séparations en jetant la bobine sous un meuble et faisait "réapparaitre la mère" en tirant sur le fil. Nous ne pourrons nous attarder 4 davantage à cette illustration clinique ici , mais retenez que cette observation constitua le terreau sur lequel a pu croitre la question si centrale et passionnante des pulsions : à savoir l'intrication consubstantielle à l'humain, d'une énergie constructricepulsion de vieet d'une appétence pour la destructionpulsion de mort.
Ces pulsions nous différencient radicalement des animaux qui ne fonctionnent, quant à eux, que par instincts. Non pas que les humains n'aient pas quelques fonctionnements instinctuels archaïques (l'instinct de survie par exemple) mais nos besoins qui nous poussent à les satisfaire, comportent toujours une visée de surplus (dont témoignent les pulsions). Surplus qui ne se retrouve pas dans le 5 règne animal et qui est dû à notre état de corps parlants .
C'est d'ailleurs par un manque fondamental (le manque-à-être) qui structure les "parlêtres" que nous sommes (selon l'heureuse expression du psychanalyste J. Lacan), que se pose tout aussi singulièrement aux humains la question du désir (mais nous devrons malheureusement laisser de côté l'étude passionnante du désir dans cet article). Pas de sado-masochisme ni de troubles des conduites alimentaires, ni d'addictions, ni d'obsessions, ni d'hystérie, ni de phobies chez les animaux. Pas davantage delapsusjusqu'à preuve du contraireL'inconscient est spécifiquement humain. Mais revenons à notre propos.
Répéter n'est pas cloner ! Quelque chose dans une répétition impliquede factol'existence d'une différence, d'une rupture avec le "même". Vous percevez peut-être déjà là comment l'un et l'autre rupture et répétitionune présentent intrication-disjonction. En effet la répétition rompt immanquablement avec l'identique tout comme l'affirmaient certains philosophes présocratiques. Héraclite soutenait ainsi qu'on ne se baignait jamais deux fois dans les eaux d'une même rivière, s'opposant en cela au principe de la constance parménidienne. La répétition fait donc rupture, et la rupture ne peut faire autrement que de s'inscrire, peu ou prou, dans une certaine continuité qui se répète en se
4 Vous pourrez en lire le développement notamment chez Forné M.,Les saumons ne rêvent pas de remontées mécaniques: quelle place pour le désir dans un monde centré sur la plus -value économique et le plus-de-jouir psychique ?, Le Lys bleu édition, Paris 2020, p.55-56 5 C'est notre prise dans la parole (dans sa logique de signifiants / signifiés) qui fait rupture radicale avec le monde animal. Ce dernier ne fonctionnant que par signes / significations, incluses dans un langage qui n'est toutefois pas exempt de grandes complexités.
poursuivant : rien n'est ainsi plus constant que le changement pour le dire de façon oxymorique. Ainsi, bien que les dinosaures aient disparu depuis des millions d'années de la surface du globe, persiste la terre sur laquelle ils ont vécu et nous continuons de les faire vivre dans nos manuels d'histoire et dans nos films. Bien que notre enfance soit irrémédiablement passée, nous continuons notre vie durant, à ressentir les échos des vagues de nos émois infantiles. Bien que les symptômes névrotiques puissent trouver à se dissiper en s'éclairant, ils deŵeuƌeŶt la pƌoduĐtioŶ d'uŶ iŶĐessaŶt Đoŵpƌoŵis eŶtƌe uŶ vœudž inconscient et sa répression, autour d'un "noyau pathogène" d'enfance.
Nous cheminons ainsi le long de cette forme topologique passionnante nommée bande de Moebius. Celle-ci ne possède en apparence qu'une seule face et un seul bord encontinuum. Une deuxième face l'habite pourtant et ne nous est accessible que pour peu que nous procédions à certaines "coupures" 6 symboliques (qui sont bien des sortes de petites ruptures) le long de son axe . Ces mouvements de va et vient en élastique tendu puis relâché, ne sont-ils pas comparables à ceux existant à l'échelle cosmique de l'infiniment grand (entre expansion et compaction de l'univers dans la théorie cyclique dubig-bounce-le grand rebond) ? Entre périodes de guerres et de paix à l'échelle de l'Histoire, entre désirs créatifs et poussées destructrices à l'échelle de nos pulsions psychiques, et entre excitation et stabilité des électrons au niveau atomique de l'infiniment petit ? L'essentiel de notre existence n'était-il pas pris dans un espace à trois dimensions procédant davantage d'un tryptique entre un point "a", un point "b" et leurs interactions/intrications (comme le pensait le philosophe Hegel avec son principe d'Aufhebung)que d'une signification binaire du type "ou bien ceci, ou bien cela" ? * Rupture et répétition sont également des concepts qui impliquent l'existence d'un "principe de comparaison". On ne peut, en effet, parler de l'un ou l'autre de ces termes sans se référer à un "par rapport à quelque chose". Rompre et répéter se font forcément par rapport à des situations antérieures, envisagées à posteriori. Ce "par rapport à" fonctionne en tache de fond dans nos pensées. Il suffit de tendre l'oreille autour de nous (et/ou en nous) pour s'en rendre compte. Toute perception, tout avis, tout jugement, impliquent
6 Lire Forné M.,L'inconscient ça nous parle, L'Harmattan 2013, p.214-217 au sujet du ruban de Moebius.
comparaison. Si dans le monde, tout était bleu par exemple, le bleu lui-même n'aurait aucun sens puisqu'une chose n'est dite bleue que par opposition à ce qui ne l'est pas. C'est par la différence et la nomination que les choses se mettent à exister pour nous. Nous sommes sujets des symbolisations de ces différences : "Être plus ceci, avoir moins de cela... Être plus fort, trop vide, moins rapide, pas assez attentif " etcLes déclinaisons des appréciations comparatives sont illimitées et, à l'évidence, elles occupent un temps considérable dans nos pensées. Cela peut même, fortement parfois, parasiter notre quotidien : il n'est pas si rare que la comparaison fasse souffrir. Et pourquoi cela ? Eh bien parce qu'elle se réfère toujours à un Idéal.
7 La vie est mouvement (répétitions de moments, d'instants successifs ). Le mouvement est écart (répétition d'écarts successifs). L'écart est différence et la différence est une difficilement supportable blessure narcissique faite au fantasme de complétude, de stabilité et disons le mot, de maitrise. Une grande 8 partie de la vie des Hommes est consacrée à se défendre contre la différence , à l'instar des deux autres vexations qui ont ébranlé l'égoHommes : des l'héliocentrisme copernicien et l'évolution d'essence non divine (le non-créationnisme) des espèces, théorisé par Darwin. Rien ne cesse de ne pas bouger dans la vie, tout fait rupture avec l'instant d'avant. Et ces variations se font en même temps sur fond de constance comme nous l'avons écrit plus haut ; tout comme des draps froissés dans un lit vide mettent en scène une présence sur fond d'absence. C'est toute la force des métaphores que de tisser des passerelles à distance entre des éléments distincts qui se trouvent ainsi pourtant reliés par des mots. La pulsion de vie (et le désir qui y palpite) est du côté du mouvement et ce mouvement implique la perte de quelque chose parce que, comme nous l'avons déjà évoqué, existe un écart entre une position ultérieure et la précédente. L'être humain est aimanté au fantasme d'avoir un jour été complet (cf.LeBanquet chez Platon) ou de pouvoir l'être un jour ou qu'au moins quelqu'un puisse l'êtreune divinité pourquoi pas. Et cette visée de complétude est un idéal par rapport à quoi nous ne cessons de nous référer. Ce paradis présumé perdu, source originelle de "satisfaction pleine et entière" comme le disait Freud, nous pensons, dans un recoin de nos têtes, pouvoir y accéder ou y 7 On l'entend dans l'origine du mot "moment" :Momentum, le mouvement. 8 Même si, en même temps, on recherche cette différence, et qu'elle nous est même indispensable, notamment par rapport au brassage génétique."L'eŶfeƌ Đ'est les autƌes" ĠĐƌivait le philosophe J.P. Saƌtƌe … et l'autƌe Đ'est le différent. Et ce n'est pas pour rien qu'une altercation ou une incompréhension s'appelle undifférend.
retourner (Đ’est-à-dire que nous conservons l'idée que nous l'aurions eu un jour) ; ceci alors même qu'il n'a, en réalité, jamais existé autrement qu'au titre de scénario imaginaire et symbolique (c'est bien ce que l'on nomme Fantasme).
Pour le dire autrement, la condition humaine équivaut à l'acceptation de perdre quelque chose puisqu'elle s'inscrit dans un mouvement (tout comme le bébé doit laisser tomber sa tétine pour parler ou gouter à autre chose ; tout comme il doit accepter de perdre le confort des bras d'un adulte pour suivre son propre chemin, et tout comme il doit consentir, ensuite, à perdre une position d'équilibre immobile pour se mettre à marcher dans une succession de déséquilibres. C'est notre condition d'êtres parlants qui devons "perdre pour avancer" ; perdre, ne serait-ce que des illusions (de complétude, de satisfaction entière et de gonflette narcissique). Perdre pour gagner en autonomie. D'ailleurs c'est tout l'enjeu d'une psychanalyse que de se désaliéner de l'emprise de l'autre pour, plutôt, se soutenir du désir de l'autre, ce qui n'est pas du tout équivalent. La répétition est souvent une tentative inconsciente et désespérée de limiter les "pertes". Certes, on peut vouloir rééditer des vacances dans un même endroit du monde, vouloir retrouver le gout particulier d'une madeleine de nos gouters d'enfance ou "refaire" sa vie, en changeant une énième fois de partenaire (ce qui n'évite pas de rester malgré tout un peu sur sa faim). Mais on peut aussi vouloir rompre avec toutes routines et être assoiffés d'horizons et d'expériences nouvelles et, pris dans une telle frénésie, retomber dans la "constante du toujours différent"* Le principe de comparaison dont nous disions qu'il était toujours un peu en toile de fond, se retrouve dans un autre concept élaboré par Freud et que nous n'avons fait que citer plus haut. La simple observation des interactions humaines nous prouve d'ailleurs à quel point il est incontournable : c'est celui du narcissisme. Et il n'est pas sans lien avec les répétitions, ne serait-ce que par le rapport à la conservation d'un certain "idéal de constance" (jeunesse, popularité, argent, conquêtes). La politique, leshow-biz et les dynamiques de groupes nous en donnent de consternants exemples depuis bien longtemps. Le narcissisme nous fait envisager toute chose par rapport à soi (on retrouve là encore le principe de comparaison). Il suffirait pourtant de lever les yeux au ciel et de s'intéresser à la complexité de la voute étoilée par exemple, pour gagner
9 en humilité et relativiser la problématique de l'être… ŵais Đ'est ďieŶ ĐoŶŶu: quand le sage montre la lune, l'imbécile (ou le narcissique) regarde le doigt (et il se déplace volontiers afin que le doigt puisse le pointerlui-même… ou, devƌait-on dire, "lui-s'aime"). L'étude de l'univers devrait en effet rendre modeste : "notre" soleil que nous pensons avoir toujours déjà été là, ne s'est formé qu'il y a 5 milliards d'années environ, et disparaitra dans ce même ordre de temps puisque cette étoile a consommé la moitié de ses réserves d'Hydrogène. Dans l'univers, le centre n'existe simplement pas. Si nous observons un point de l'espace, nous l'envisageons habituellement par rapport à notre référentiel terrien, et une observation depuis un tout autre point (autre planète, autour étoile, autre galaxie) pourrait dès-lors prétendre se prendre pour un même "centre de référence". Mais tout comme l'Ideal, celui-ci n'existe pas davantage. L'idéal est une lourde présence sur fond d'absence. Le "centre", tout comme le "tout", le "rien" et le "juste milieu" ne sont que d'inaccessibles chimères. 10 Des points d'impossibles à trouver, mais pas d'impossible à imaginer . * J'ai conscience que ce présent article aura laissé beaucoup de nuances et d'approfondissements de côté. Espérons toutefois qu'il ait pu susciter de l'intérêt et alimenter un désir de réflexion. Tentons-en toutefois une synthèse en guise de conclusion. Il ne peut y avoir répétition sans rupture avons-nous dit puisque quelque chose, pour se répéter, a bien dû cesser auparavant. Peut-il y avoir rupture sans répétition ? Au sens purement factuel, la réponse est certainement oui. On peut ainsi subir une rupture d'anévrysme, éprouver une rupture sentimentale ou être confronté à une rupture de contrat de travail sans que de semblables situations ne se rééditent plus. Mais fondamentalement nous avons soutenu l'idée que toute rupture s'inscrit sur fond de continuité. Dans une sorte de constance changeante, nouant la pensée d'Héraclite à celle de Parménide. Le temps lui-même a été découpé artificiellement en tranches dans une succession de ruptures temporelles continues : une heure répétant la même quantité de minutes que la précédente et que la suivante, tout en rompant inexorablement d'avec elles en termes de contenus de tranches de vie.
9 Cela m'évoque le titre du livre de Milan Kundera "L'insoutenable légèreté de l'être", qu'on pourrait bien décliner sous la forme de "l'iŶsouteŶaďle louƌdeuƌ de l'ġtƌe…". Dans cet ouvrage Kundera reprend la thématique de l'éternel recommencement nietzschéen pour souligner les paradoxes insolvables de la vie et de l'amour. 10 L'Imaginaire étant un registre psychique pouvant ouvrir à beaucoup de créativité mais aussi à toutes sortes d'embarras.
A l'échelle individuelle, un type de rupture se différencie toutefois radicalement des autres et donc de toutes suites possibles : c'est la mort-même en tant que Réel absolu (sauf à en passer par desscenariiimaginaires de résurrection ou de mythes phénixiens de renaissances). Ce maitre suprême représente bien un point de rupture radical pour chacun. Un "ailleurs" ou plutôt un "nulle part" qui ne se "répète" qu'à l'échelle collective de l'humanité, comme pour toutes formes de vies.
Que le couple "rupture/répétition" soit donc envisagé sous l'angle de la pandémie virale de CoVid19, des manifestations contre la violence et les discriminations dans le monde, des guerres et des excès de profits en tous genres, des malveillances infligées à notre environnement, des violences familiales ou des conflits psychiques d'un même individu, il produitce couple ondulations oxymoriques. Mouvements qui énoncent vouloir rompre des consciemment avec les répétitions, en ne faisant que répéter inconsciemment ces ondulations-mêmes. Pas moyen d'en sortir véritablement, si ce n'est par la 11 voie de la sublimation (au sens psychanalytique du terme ) dont Freud disait qu'elle était la façon la plus éthique de composer avec nos pulsions de 12 répétitions , surtout dans les versants mortifères de la pulsion de mort. 13 Notre époque remet en scène la palingénésique tragédie du bonheur-malheur, qui se joue sur les deux faces d'une même pièce. Méditons peut-être alors la formule si pertinente de Beckett : "Rater, rater encore, rater toujours, mais rater mieux."
Dr Forné-Vivó Michel Médecin-psychothérapeute et Psychanalyste 68100 Mulhouse
11 Processus psychique inconscient qui rend compte de la capacité de la pulsion sexuelle deSublimation : ƌeŵplaĐeƌ uŶ oďjet sedžuel paƌ uŶ oďjet ŶoŶ sedžuel. Ce ĐhaŶgeŵeŶt d’oďjet est ĐoŶŶotĠ de ĐeƌtaiŶes valeuƌs ou idéaux sociaux, et sefait saŶs peƌdƌe ŶotaďleŵeŶt eŶ iŶteŶsitĠ paƌ ƌappoƌt au ďut à atteiŶdƌe, ďieŶ Ƌue l’aĐte sedžuel diƌeĐt ĐoŶduise à la dĠĐhaƌge teŶsioŶŶelle la plus foƌte. C’est aiŶsi Ƌue l’oƌigiŶe d’uŶ eŶseŵďle d’aĐtivitĠs (scientifiques, artistiques, politiques, littéraires, etc.) apparaissant a priori dénuées de pulsions sexuelles dévoile leurs liens à lalibido. UŶe telle dĠsedžualisatioŶ Ŷ’est faite, Ŷi uŶe fois pouƌ toutes, Ŷi atteiŶte de foƌĐe. Elle demeure instable et nécessite sans cesse un travail de réorientationlibidinale effectué par le Moi. 12 "Tout ce qui travaille au développement de la culture, travaille aussi contre de la guerre". Freud 1933, in Pourquoi la guerre ?,Correspondance entre Freud et Einstein. 13 Palingénésie : l'éternel recommencement des philosophes stoïciens notamment repris par Nietzsche .
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