France - article ; n°1 ; vol.44, pg 65-82
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Revue internationale de droit comparé - Année 1992 - Volume 44 - Numéro 1 - Pages 65-82
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Gilles Martin
France
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 44 N°1, Janvier-mars 1992. pp. 65-82.
Citer ce document / Cite this document :
Martin Gilles. France. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 44 N°1, Janvier-mars 1992. pp. 65-82.
doi : 10.3406/ridc.1992.4441
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1992_num_44_1_4441R.I.D.C. 1-1992
LA RESPONSABILITÉ CIVILE DU FAIT
DES DÉCHETS EN DROIT FRANÇAIS
par
Gilles J. MARTIN
Professeur à la Faculté de droit
de l'Université de Nice-Sophia Antipolis (CREDECO)
Président de la Société française
pour le droit de l'environnement
Selon un député, auteur d'un rapport d'information à l'Assemblée
nationale, « les déchets industriels correspondent à un total d'environ 150
millions de tonnes par an (100 millions de tonnes de déchets inertes, 20 de de déchets spéciaux particulièrement nocifs) » (1). Si
l'on ajoute à ce chiffre celui des déchets ménagers, il est facile de se
convaincre que la question des est, en France comme dans tous
les pays industrialisés, une question majeure (2).
Les agents économiques ne s'y trompent pas et ceux qui ont su
déceler à temps l'émergence d'un nouveau marché en profitent
aujourd'hui (3). La naissance et le développement de ce marché doivent
beaucoup au droit. Tant que le déchet demeurait une res derelicta pure
et simple, son « producteur » pouvait s'en désintéresser. Certes, sa res
ponsabilité civile pouvait être engagée sur le fondement du droit commun,
mais cette menace ne pouvait être suffisante pour le conduire à dépenser
de fortes sommes en vue de traiter ou d'éliminer « proprement » les
déchets. La loi du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et
à la récupération des matériaux (4) est venue modifier cette situation en
(1) M. BARNIER, Rapport à l'Assemblée nationale, n° 1227, du 11 avril 1990, p. 37.
On observera que, dans ce décompte, 30 millions de tonnes de déchets ne sont pas « qualif
iés » et ont disparu !
(2) Cf. Le Monde du 12 janvier 1991, « Le casse-tête des déchets industriels ».
(3) Cf. Le du 30 mars 1991 ; Le Nouvel observateur du 28 mars au 3 avril 1991 .
(4) L. n° 75-633, J.O. du 15 juillet 1975, p. 7279. 66 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 1-1992
posant « le principe nouveau que le producteur ou détenteur des déchets
reste responsable de leur élimination quel que soit le déchet et quel que
soit son effet sur l'environnement » (5). Au-delà des dispositions précises
du texte — qui comme la quasi-totalité du Droit de l'environnement de
cette époque est un texte d'essence administrative (6) — c'est l'esprit de
la législation qui a été modifié. Le producteur de déchets est désormais
regardé comme celui qui est en charge de cette « production » et qui a
l'obligation d'en prévenir les effets dommageables.
L'objet du présent rapport est d'envisager sa situation au regard de
la responsabilité civile. Il convient, en préliminaire, d'insister sur le rôle
de cette responsabilité. Sa mise en œuvre quasi-automatique, à la seule
initiative des victimes, la souplesse de son fonctionnement pourraient être
de nature à pallier les insuffisances d'une réglementation administrative
toujours lourde à mettre en œuvre et dont l'application peut être soumise
aux aléas de la conjoncture sociale, économique et politique. Bien évidem
ment, l'occasion nous sera donnée d'insister sur les limites du droit positif
de la responsabilité. Il reste que ce droit est, par nature, un instrument
susceptible de compléter efficacement la réglementation et d'en « colmat
er » les failles.
C'est déjà une impression de simplicité et de généralité qui domine
si l'interprète s'interroge sur la nature des déchets susceptibles de faire
naître une responsabilité civile.
En effet, le droit de la responsabilité civile reste relativement indiffé
rent à la définition que la loi donne des déchets. Celle-ci est déjà très
générale (7), mais à supposer qu'un dommage soit causé par une substance
n'entrant pas dans cette définition, le droit de la responsabilité civile n'en
serait pas paralysé pour autant. Son application dépend, en effet, avant
tout de l'existence d'une faute ou d'un fait dommageable imputable, et
non des « instruments » utilisés pour le commettre. Pareillement, le droit
de la responsabilité civile reste largement indifférent à la variété des
déchets et des régimes qui leur sont applicables. Si l'on excepte les déchets
nucléaires qui obéissent à un régime spécifique, tous les autres
sont logés à la même enseigne, quelle que soit la réglementation administ
rative applicable. Bien plus, la responsabilité civile pourra être mise en
jeu alors que toutes les obligations administratives auront été respectées,
les droits des victimes ne pouvant être remis en cause du seul fait que
l'Administration a approuvé ou autorisé une pratique ou un comporte
ment (8).
(5) M. PRIEUR, Droit de l'environnement, Dalloz 1991, p. 504.
(6) Cf. Gilles J. MARTIN , Rapport introductif au Colloque sur le Dommage écologique
en droit interne, communautaire et comparé, Nice, 21-22 mars 1991 (à paraître).
(7) Art. 1 de la loi : « Est un déchet au sens de la présente loi tout résidu d'un processus
de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance, matériau, produit ou
plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l'abandon ».
(8) C'est là l'application du sacro-saint principe selon lequel les autorisations administ
ratives sont délivrées sous réserve du droit des tiers : cf. par exemple, l'art. 8 de la loi du
19 juillet 1976. G.-J. MARTIN : DROIT CIVIL FRANÇAIS 67
En revanche, le droit de la responsabilité civile sera très sensible à
la nature des rapports juridiques existant entre celui dont la responsabilité
est recherchée et la victime. Dans une première situation — la seule qui
pendant longtemps ait été imaginée dans le domaine qui retient notre
attention — , victime et responsable potentiel sont des tiers : c'est alors
la loi qui, presque exclusivement, régit leurs relations, et les difficultés qui
apparaissent sont avant tout celles de l'adaptation des concepts juridiques
(faute, fait dommageable, dommage, lien de causalité) à la réalité qu'ils
prétendent saisir. C'est sans doute à ces difficultés qu'il faut attribuer la
faiblesse quantitative du contentieux. Dans une deuxième situation — de
plus en plus fréquente aujourd'hui — la victime et le responsable sont en
relation contractuelle et le dommage est causé à l'occasion de l'exécution
du contrat. Dans cette hypothèse, la volonté exprimée par les parties,
qui ont défini leurs obligations respectives et qui ont pu organiser leur
responsabilité, viendra perturber le jeu légal, faisant naître des problèmes
d'une tout autre nature. Ce seront là les deux axes de nos développements.
I. LA RESPONSABILITE CIVILE DU FAIT DES DÉCHETS
POUR LES DOMMAGES CAUSÉS A DES TIERS :
LA RESPONSABILITÉ DÉLICTUELLE
Dans ce cas de figure deux constats s'imposent. D'une part, il apparaît
que la victime dispose d'une multitude de possibilités pour tenter d'enga
ger la responsabilité civile de l'auteur du dommage. Le droit positif
français offre en effet une panoplie de fondements possibles à cette
responsabilité, parmi lesquels la victime pourra choisir celui qui lui paraît
le mieux correspondre à ses besoins.
D'autre part, cette même victime se heurtera, en revanche, à des
difficultés considérables pour parvenir à mettre en œuvre cette responsabil
ité tant les concepts classiques du droit de la responsabilité paraissent
mal adaptés pour saisir les situations consécutives à une dégradation de
l'environnement.
A. — La multiplicité des fondements possibles
de la responsabilité civile délictuelle
Lorsqu'une personne prétend avoir subi un dommage du fait de
déchets produits, stockés ou gérés par u

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