Corruption et anticorruption en Chine
124 pages
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Description

La corruption est un phénomène très répandu à la surface du globe, et les budgets de nombreux pays sont ainsi privés de centaines de milliards d'euros de ressources. En Chine, la campagne anticorruption de Xi Jinping recueille l'approbation populaire : voir des « grands tigres » arrogants tomber de leur piédestal n'est pas pour déplaire, et les « mouches » (petits fonctionnaires) enrichies sont en général détestées. À travers les histoires souvent cocasses de neuf hauts fonctionnaires condamnés pour crimes économiques, les auteurs décrivent le fonctionnement de la corruption en Chine, puis ils mettent en lumière les organismes chargés de la répression de celle-ci et exposent certaines mesures adoptées par le gouvernement chinois pour lutter contre ce fléau. Depuis le 18e siècle, la Chine est une source de réflexion fertile sur nos institutions et nos pratiques.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 août 2018
Nombre de lectures 3
EAN13 9782342162837
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0056€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Corruption et anticorruption en Chine
Huaiyuan Han et Yves Wintrebert
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
175, boulevard Anatole France
Bâtiment A, 1er étage
93200 Saint-Denis
Tél. : +33 (0)1 84 74 10 24
Corruption et anticorruption en Chine
Toutes les recherches ont été entreprises afin d’identifier les ayants droit. Les erreurs ou omissions éventuelles signalées à l’éditeur seront rectifiées lors des prochaines éditions.
 
Introduction
La corruption est un virus potentiellement mortel, très répandu à la surface de notre planète, et les budgets de la plupart des pays sont privés plus ou moins légalement de centaines de milliards d’euros : le FMI évalue à 2 % la richesse mondiale qui s’évapore chaque année dans la fraude fiscale et la corruption, et selon l’indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International, sept pays sur dix ont de graves problèmes de corruption 1 .
En Chine, depuis l’élection du président Xi Jinping en 2012, la lutte contre cette calamité est devenue une priorité. La campagne anticorruption a touché un million de cadres et, parmi eux, environ 200 000 ont été mis en examen 2 . À travers neuf exemples de hauts fonctionnaires condamnés, nous voudrions montrer dans ce livre quelles sont les particularités de la corruption chinoise ; nous abordons ensuite, dans une deuxième partie, les mesures prises par le gouvernement pour combattre les fraudeurs.
En chinois, le mot corruption est formé de deux idéogrammes : Fu, pourri, et bai, défaite.
Pour un fonctionnaire chinois, être désigné comme pourri est synonyme de perdre sa place et généralement d’aller pourrir un certain nombre d’années en prison. Et les dirigeants du Parti communiste chinois savent que tolérer la corruption, c’est risquer de perdre le pouvoir, d’être défait. Ainsi, Deng Xiaoping, quand il engage, au début des années 1980, les réformes qui vont permettre à la Chine de se développer très rapidement, tient des propos sans équivoque : « nous devons tenir fermement les rênes du Parti, et réaliser les objectifs que nous nous sommes fixés ; si nous ne réprimons pas la corruption, et en particulier celle des hautes sphères du Parti, nous courons le risque d’échouer ».
Le problème de la corruption ne date pas d’hier. Au Ve siècle avant notre ère, Confucius disait déjà : « quand il y a un État et des familles, personne ne craint la pauvreté ; ce qui n’est pas accepté, c’est l’injustice ». Et si, tout au long de son histoire, la Chine a été le théâtre de révoltes spectaculaires, ce n’est pas uniquement la conséquence des famines : ce que le peuple chinois ne supporte pas, c’est l’absence d’équité, la corruption en étant la composante la plus inacceptable. C’est un thème récurrent dans la littérature chinoise : sous les Ming, par exemple, le remarquable roman d’aventures de Shi Nai’an, Au bord de l’eau, relate les exploits de cent huit brigands, révoltés contre la corruption du gouvernement et des dignitaires de la cour de l’empereur. C’est aussi l’un des ressorts d’un autre grand classique, le Jin Ping Mei - Fleur en Fiole d’Or - dont voici un extrait : « Il sortit de sa manche un lingot de dix taels et le lui tendit. Qui resterait insensible à l’argent en ce bas monde ? »
De nombreux fonctionnaires sont passés à la postérité pour leur probité exceptionnelle : prenons l’exemple de Bao Zheng (1027-1062), un magistrat de la dynastie des Song, que le peuple appelait Bao ciel pur, ou Bao l’intègre . En français, il est connu sous l’appellation de Juge Bao.
À son époque, il était devenu difficile de porter plainte contre les mandarins corrompus, qui étaient fort nombreux et se protégeaient mutuellement. Après avoir été nommé par l’empereur Ren Zong pour contrôler les fonctionnaires du gouvernement qui siégeaient à l’époque à Kaifeng, Bao Zheng s’attaqua à l’habitude de classer sans suite les plaintes du petit peuple, même s’il fallait pour cela s’en prendre aux puissants ou à la famille de l’empereur. Devant le tribunal de justice, il fit installer un tambour. Quiconque désirait porter plainte pouvait donner un coup sur celui-ci, ce qui donnait le droit de témoigner des injustices subies ; les magistrats avaient ordre d’y donner suite.
L’oncle de la concubine préférée de l’empereur Ren Zong était fort apprécié du souverain et en profitait pour s’enrichir démesurément. À plusieurs reprises, Bao Zheng dénonça la corruption de l’oncle devant l’empereur, sans que celui-ci ne réagisse car cela aurait nui à la face de sa concubine. Sans se laisser décourager, Bao Zheng s’assura du soutien d’un grand nombre de fonctionnaires et persista à dénoncer les pratiques de l’oncle jusqu’à la révocation de celui-ci. Cependant, l’empereur, contrarié par ce manque de tact, se débarrassa du juge intègre en l’envoyant se morfondre en province… Au fil des siècles, Bao Zheng est devenu le héros de nombreuses pièces de théâtre.
En 1949, lorsque les communistes s’emparèrent du pouvoir, tout était à reconstruire : les nationalistes de Tchang Kaï-chek (Jiang Jieshi), réfugiés à Taiwan, s’étaient montrés extrêmement corrompus et leurs dernières années au pouvoir avaient été chaotiques, tandis que l’occupation japonaise et la guerre civile qui s’ensuivit laissaient un pays exsangue. Le Parti communiste s’installa au pouvoir en célébrant la pureté et la droiture.
Un premier épisode de la lutte contre la corruption est resté dans les annales lorsqu’en 1952, Liu Qingshan et Zhang Zishan furent condamnés à mort. Liu Qingshan, né en 1914 dans le Hebei, était entré au parti en 1931 et avait gravi les échelons du pouvoir jusqu’au poste de Secrétaire adjoint de la ville de Shijiazhuang. Il avait rencontré Zhang Zishan à Tianjin, où ils occupaient chacun un poste de Secrétaire local. Entre 1950 et 1951, les deux crapules s’étaient entendues pour détourner l’argent des récoltes et des réserves céréalières prévues pour lutter contre les famines et les inondations, ainsi que l’argent des rations supplémentaires destinées aux ouvriers qui travaillaient à la reconstruction de l’aéroport. Ils avaient ainsi subtilisé plus de 1,5 million de yuans, une somme très importante à l’époque.
Confronté à un tel détournement, le Comité central se réunit pour délibérer de la peine. D’après les témoins, le Président Mao était de très mauvaise humeur. Lorsque le Premier ministre Zhou Enlai l’interrogea : « Président, avez-vous un avis ? », Mao répondit sans hésiter par ces mots : « Peine de mort ! ». Zhou Enlai reprit : « Et si quelqu’un intercède en leur faveur ? ». « Interdit », répondit abruptement Mao. Deux mois après leur mort, paraissait le premier article de loi de la Chine communiste ciblant spécifiquement la corruption.
De 1951 à 1978, on ne trouve aucun cas de sanction appliquée pour corruption. Mais à partir de 1978, de nouveaux espaces sont offerts à la corruption, en particulier à ceux des hauts fonctionnaires : la réforme de l’économie et l’ouverture graduelle de celle-ci en direction des pays étrangers élèvent rapidement le niveau de vie des Chinois et renforcent les pouvoirs des cadres dirigeants. En 1987, le Secrétaire du Parti de la province de l’Anhui, Hong Qingyuan, est condamné à dix ans de prison pour corruption : il s’agit de la première application de l’article de loi de 1952 à l’encontre d’un haut fonctionnaire du Parti.
Treize ans plus tard, du 13 au 14 février 2000, le Tribunal du peuple de niveau intermédiaire de Nanchang se réunit pour examiner les malversations du Vice-gouverneur de la province du Jiangxi, Hu Changqing. Le 15 février, convaincu de corruption à grande échelle et de détournements massifs, le Vice-gouverneur est condamné à mort, puis exécuté le 8 mars. C’est le premier haut fonctionnaire de ce niveau à subir cette peine.
Seule la stabilité peut garantir au Parti communiste de rester au pouvoir sur une longue période et de développer le pays, et c’est actuellement le maître mot du gouvernement chinois. Au nom de ce concept, le Parti maintient une politique de croissance, stabilise le prix de la propriété foncière, contrôle internet et les grands groupes de communication américains qui veulent s’implanter en Chine, s’assure à long terme des débouchés à l’exportation et des approvisionnements en matières premières ( Yidai yilu , la Nouvelle route de la soie).
Le Secrétaire général du Parti, Xi Jinping, a pris toutes les mesures nécessaires pour préserver cette stabilité et, bien sûr, la lutte contre la corruption des hauts fonctionnaires en fait partie.
À la fin de l’année 2012, le Secrétaire général, appuyé par le Comité central, a décidé de s’attaquer plus particulièrement à la corruption des cadres de haut niveau, qui s’était généralisée sous le second mandat de son prédécesseur, Hu Jintao, et a lancé une campagne inédite contre ce fléau. Un arsenal juridique et un dispositif policier très efficaces ont alors été mis en place, ainsi que des directives visant à rappeler à l’ordre les cadres du Parti. Pour l’aider dans cette tâche de contrôle des hauts dirigeants, Xi Jinping bénéficiait de l’aide d’un membre du Comité central, Wang Qishan, un Prince rouge comme lui, très efficace 3 . Ce dernier n’a pas été reconduit dans ses fonctions lors du 19e congrès du PCC…
En janvier 2014, un consortium international de journalistes, dont fait partie le journal Le Monde, a publié une série d’articles sur des fuites d’informations en provenance de paradis fiscaux (offshore leaks). Les investigations ont montré que plus de 20 000 Chinois de Hong Kong et de Chine populaire, souvent liés au Parti commu

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